Au sein du cluster mondial de l’architecture durable, la banlieue parisienne représente un immense terrain de jeu de la nouvelle architecture climatique, dans la continuité du fondateur Patrick Bouchain créant Zingaro, aidé à l’époque par le jeune BE Bois Yves-Marie Ligot. Bien sûr, cette époque côtoie et relaye une phase d’expérimentation maçonnée dont témoigne presque en face de Zingaro l’espace Renaudie, ou, non loin du nouveau stade Charles Auray par Atelier Ramdam la belle cité-jardin du Pré Saint-Gervais.
Pérégriner à vélo entre le donjon de Vincennes et le beffroi nord en construction de la Basilique Saint-Denis, c’est traverser une banlieue chargée d’histoire architecturale, avec la particularité qu’on y voit l’histoire en train de se faire. La ville de Montreuil atteint juste la maturité nécessaire pour prouver que ses multiples surélévations et extensions en bois disposent de bardages patinés en bon état. Un peu sombre s’il n’y avait plus que ça, mais justement, le remède arrive avec la paille enduite au plâtre, comme Rémy Doucet l’expérimente dans une extension qui valait le petit détour aux Lilas, ne serait-ce que pour la vue sur le nord du Grand Paris.

Un parcours de 20 km avec 10 participants, 8e Parcours Philléas parisien. © Jonas Tophoven
Le bois, le biosourcé, le géosourcé, le réemploi. C’est le credo du Forum, mais les premiers Parcours Philléas étaient très bois, comme le Parcours Philléas olympique de fin septembre, et qui ne se justifiait en clôture des Rencontres de la frugalité heureuse et créative que par la proximité immédiate du Village des Athlètes.
Du bois, il y en a aussi dans ce parcours, à commencer par le Bois Debout, l’immeuble social de 5 étages bâti par AOO3 Architectes il y a une dizaine d’années. Mais après le nouveau lycée international de Montreuil, on débouche déjà sur le groupe scolaire Stéphane Hessel (M'Cube), hommage à l’un des premiers groupes scolaires en paille, sans doute le premier à intégrer des brasseurs d’air désormais standard dans les salles de classe.
À deux pédalades, l’opération Carnot de Graam avec structure en châtaignier, et sur la rue Condorcet, la reconstruction de l’îlot Vert d’Archi 5/REI Habitat qui a brûlé il y a quelques années. Bois brûlé pour l’extension bois de l’agence Ciguë, qui y a relancé le béton de plâtre, autrement dit les chapes à base de plâtre et de granulats de réemploi. Un beau prélude à la seconde étape du trajet, les Ateliers Diderot de Pantin, où officie l’inventeur et architecte Carlos Barba et ses fameuses briques de Broc. Carlos Barba travaille actuellement sur le réemploi d’éléments de coffrage ou de protection en bois à des fins structurelles. Et hop, du réemploi on revient à la structure.

La vue de chez Ciguë dans le haut Montreuil n'a d'égal que celle de chez Mano dans le haut Aubervilliers. © Jonas Tophoven
Chez l’architecte Benjamin Loiseau à Aubervilliers, le pavillon initial est conservé comme structure porteuse d’une extension englobante. À Bagnolet, il signe également une surélévation. Autre surélévation sur le canal Saint-Denis, tout près du Bon coin d’Atelier Radam, également primé au Prix régional de la construction bois. Et là, derechef, les matériaux sont de réemploi.
Que dire de Zingaro par Patrick Bouchain avec Yves-Marie Ligot, ce lieu de réemploi permanent depuis trente ans, grâce à la versatilité du bois ? À Paris, il faut bien choisir le parcours pour faire un tour complet de 60 km avec 120 constructions bois au sens large, une tous les 500 m en moyenne. Une moyenne très élastique selon les endroits, et cela n’est pas différent en banlieue Est.
La banlieue n’est pas seulement le terrain de jeu de la nouvelle architecture du climat, loin de là. Il y a d’autres camarades dans le bac à sable – par exemple l’immense datacenter de La Courneuve que l’on aperçoit de la terrasse de la maison de Mano architecte. Il faut connaître et il faut rouler, un peu comme à Paris. Et savourer l’entre-deux comme il est, les venelles si étroites des Lilas, les maisons des cités jardins avec leurs décennies de vignes vierges, les belles mini-tours esseulées comme à Pantin, les quais minéraux des canaux.

Les parcours Philléas sont conçus pour freiner le délire des ponts, la débauche de carbone des voyages, et ramener l'attention sur le local avec une convivialité professionnelle stimulante. De cette façon, tout à fait en phase avec l'événement du 25-27 février 2026 au Grand Palais, le Forum International Bois Construction lance sa saison. La plupart des sites visités orrespondent de faire à des conférences du programme 2026. © Jonas Tophoven
Le geste de la création du Grand Paris Express pour désenclaver les banlieues et surtout réduire les bouchons perpétuels n’est pas forcément la "bonne action" annoncée. Le bilan carbone reste à évaluer dans la pratique, et il masque de gros appétits immobiliers. Le sujet principal de cette promenade à vélo n’est pas tant d’imaginer une banlieue verte à la Montreuil, que de développer une sensibilité à la banlieue parisienne comme telle.
La construction biosourcé
Point de départ de "saison du Forum International Bois Construction", un parcours de visite à vélo a été organisé le 11 novembre 2025, reliant plusieurs projets de conférences du 25 au 27 février 2026.