La CAPEB demande de la cohérence et ne voit pas encore la reprise

Jean-Christophe Repon à droite, président de la Capeb

La conjoncture n'est toujours pas porteuse pour les artisans. Les changements réglementaires sont trop fréquents et déstabilisateurs. Les propositions de la CAPEB ne sont pas entendues et elle en a marre




Au cours de sa conférence de presse de rentrée, le 4 septembre à Paris, la CAPEB a commencé par dresser l’état de l’économie pour les artisans. Au cours du second trimestre 2025, l’activité des artisans en volume a encore baissé de 4,5 %, dont 9 % en construction neuve, 1,5 % en entretien-rénovation et même 1,5 pour travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements après une baisse identique au trimestre précédent. Ceci après une réduction de 5 % de l’activité globale en volume au 1er trimestre 2025 et de 6 % au quatrième trimestre 2024.

 

 

 

Des signaux encourageants, mais pas de traduction dans l’activité

La Confédération observe des signaux encourageants dans le secteur du bâtiment, notamment une hausse de 50 % des crédits à l’habitat sur un an au premier trimestre 2025 par rapport au premier trimestre 2024 et la reprise dans l’existant avec un nombre de logements vendus cumulé sur 12 mois en hausse de 8,4 % en juillet 2025 par rapport à juillet 2024. Mais elle constate que cela ne se traduit pas encore en augmentation de l’activité pour les artisans.

La CAPEB explique que la construction de maisons individuelles a baissé de 15,1% en glissement annuel et c’est le segment de la construction neuve où les artisans sont les plus actifs, contrairement au collectif et au tertiaire qui plutôt pris en charge par de plus grandes entreprises. L’ensemble des corps de métiers est affecté par ce recul d’activité, avec des évolutions en volume comprises entre - 3 % pour les entreprises d’électricité et - 5,5 % pour les entreprises de menuiserie-serrurerie. À l’échelle régionale également, le recul est notable et compris entre - 2,5 % pour la région Hauts-de-France et - 9 % pour la région Centre-Val de Loire. Ce repli généralisé affecte directement les carnets de commande, en diminution ce trimestre. La durée moyenne d’activité garantie recule à 68 jours en moyenne, tandis que les soldes d’opinion restent défavorables tant pour la construction neuve (- 17 points) que pour l’entretien-amélioration (- 6 points).

Les tensions de trésorerie se maintiennent, une entreprise artisanale sur cinq faisant encore état de besoins de financement au deuxième trimestre 2025 pour un montant moyen de 30 000 euros. Ces difficultés continuent d’impacter les perspectives d’emploi : les entreprises artisanales du secteur ont vu leurs effectifs salariés reculer de 3,4 % sur un an au 1er trimestre 2025, soit 28 300 emplois supprimés. Les perspectives sur l'emploi restent défavorables : les intentions de licenciement et de non-renouvellement des contrats (12 %) dépassent les intentions de recrutement (7 %).

 

 

 

Cohérence, cohérence !

Cette chute d’activité et d’emploi s’inscrit dans un contexte aggravant où les signaux envoyés par les pouvoirs publics sont négatifs. Aucune mesure forte n’est venue soutenir la rénovation énergétique des logements. Au contraire, le Gouvernement a décidé début juin de suspendre le dispositif Parcours accompagné MaPrimeRénov’, privant brusquement les ménages et les artisans d’un soutien financier crucial aux travaux. Et, depuis le 2 septembre, exit désormais les aides pour l'isolation des murs intérieurs et extérieurs. Cette isolation, dans le cadre des rénovations par geste simple, c’était pourtant l'un des premiers postes de travaux demandés. Seule l'isolation des combles et des sols reste subventionnée. Si les finances publiques constituent un levier essentiel, elles ne peuvent à elles seules répondre à l’ampleur des besoins. Les aides doivent être mieux ciblées et bénéficier à un maximum de ménages, et non à une minorité. La Capeb rappelle en effet que 2,6 milliards d’euros ont été mobilisés pour seulement 90 000 bénéficiaires, quand l’objectif affiché reste la rénovation d’ampleur de 370 000 logements et 750 000 logements d’ici 2050. Une dynamique de masse doit impérativement être engagée, souligne la Capeb, au bénéfice de l’ensemble de la filière : industriels, distributeurs, artisans et clients.

Enfin, la baisse du coefficient de conversion de l’électricité dans le DPE, à compter de 2026, reclassera automatiquement près de 850 000 logements chauffés à l’électricité en meilleures catégories énergétiques sans aucun travail. La Capeb déplore une mesure technique aux conséquences lourdes : en faisant artificiellement sortir des logements du statut de passoires thermiques, elle risque de freiner la demande de rénovations performantes. Dans le même temps, la confiance des ménages s’étiole face à l’instabilité des aides et des réglementations. Malgré une épargne abondante (18,8 % du revenu disponible), les projets de rénovation sont reportés ou annulés, faute de confiance dans l’avenir et de visibilité sur les politiques publiques.

 

 

 

Entourloupe sur la représentativité des TPE

La CAPEB alerte également sur la nécessité de reconnaître pleinement les TPE, qui représentent 96 % des entreprises du secteur et emploient la moitié des salariés. La récente publication des arrêtés de représentativité patronale dans le secteur du bâtiment, en introduisant contre toute logique quatre nouveaux périmètres à côté des deux périmètres historiques des entreprises occupant jusqu’à 10 salariés et des entreprises occupant plus de 10 salariés, affaiblit significativement la possibilité pour les TPE de négocier des règles qui soient adaptées à leurs spécificités et dilue leur place face aux grands groupes du secteur. De même, malgré des accords signés avec les organisations de salariés représentatives, leur extension se fait attendre, tandis que des accords favorisant les grandes entreprises sont validés en dehors du cadre paritaire. Une telle distorsion de la démocratie sociale nourrit un profond sentiment d’injustice. L’U2P a d’ailleurs annoncé son intention de contester les arrêtés de représentativité patronale. Il semble que la Direction Générale du Travail soit très réactive aux demandes des grandes entreprises et particulièrement obtuse en ce que concerne les TPE.

Dans l’immédiat, la CAPEB espère qu’avant le 8 septembre, le ministère du Logement publiera enfin des arrêtés sur trois sujets qui lui tiennent à cœur et qu’elle présente depuis des mois, voire plusieurs années :

– simplification de la qualification RGE via la VAE (Valorisation des Acquis de l’Expérience), allègement des critères de qualification de base ;

– Simplification du recours aux Groupements Momentanés d’Entreprises (GME) ;

– Reconnaissance et lancement de l’élaboration d’un parcours de rénovation énergétique par gestes. L’élaboration d’un tel parcours, bien adapté aux particuliers et aux professionnels, fait largement consensus au sein de la filière.

 

Jean-Christophe Repon, le président de la CAPEB, indique que "quelle que soit l’issue du vote de confiance attendu lundi 8 septembre prochain, la CAPEB restera pleinement mobilisée pour défendre les droits et les intérêts des entreprises artisanales du bâtiment. À court terme, nous attendons l’aboutissement des travaux engagés avec le ministère du Logement et nous porterons haut la voix des TPE lors des prochains rendez-vous de la profession, comme les Renodays, la Semaine des métiers du BTP ou encore les WorldSkills. Notre objectif est clair : faire reconnaître la place essentielle des artisans dans l’économie et dans la vie quotidienne des Français." © Capeb



Source : batirama.com / Pascal Poggi / 

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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