La semaine dernière, le gouvernement avait annoncé lancer une consultation avec les parlementaires et les collectivités sur la taxe foncière, dont l'actualisation de la base de calcul devrait faire augmenter le montant à payer par les propriétaires de 7,4 millions de logements en 2026.
Toutefois, le ministre de la Ville et du Logement, Vincent Jeanbrun, avait de son côté laisser entendre que le gouvernement envisageait de suspendre l'augmentation de la taxe foncière. Enfin, Sébastien Lecornu, aujourd'hui devant le Sénat, a mis un terme aux spéculations : le gouvernement va suspendre d'ici au printemps une hausse envisagée de la taxe foncière, qui avait suscité un tollé dans la classe politique, le temps de "changer [la] méthode" pour son calcul qui sera plus "locale". Eh oui. Mais qui dit suspension, dit partie remise. Alors, pourquoi ce revirement ? Qu'en est-il vraiment ?
La consultation avec les parlementaires et les collectivités sur la taxe foncière devait être une "consultation flash" ayant pour but "d'examiner les évolutions nécessaires" de la taxe foncière afin de "la rendre plus transparente, plus claire et plus équitable, dans une logique de simplification", ainsi que l'ont expliqué à la presse les ministères de l'Action et des Comptes publics et de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation. Elle se voulait "transpartisane avec les parlementaires et les collectivités territoriales, en particulier les associations d'élus locaux".
Car, pour le calcul des montants de taxe foncière 2026, c'étaient les éléments dits "de confort", tels que la présence d'eau courante, d'électricité, de WC ou de lavabos dans le logement, qui devaient être mis à jour et inclus dans les "bases foncières" de Bercy ...
En moyenne, la hausse de cette taxe payée par quelque 32 millions de propriétaires serait de 63 euros pour les 7,4 millions de logement concernés. En dix ans, cet impôt a augmenté de 37,3 %, entre 2014 et 2024, avec une accélération à partir de 2018 en raison de l'indexation de la valeur locative sur l'inflation et non plus sur un coefficient défini en fonction de l'évolution des loyers.
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La présence de chacun de ces éléments dits de "confort" augmente artificiellement le nombre de mètres carrés pris en compte, et mécaniquement le montant de la taxe foncière. © Freepik
L'annonce mardi soir, après publication d'un article du Parisien, de cette mesure technique avait provoqué un esclandre dans la classe politique, chez les responsables de tous bords, tandis que l'UNPI (Union Nationale des Propriétaires Immobiliers) avait elle dénoncé dans cette hausse "une démarche arbitraire et honteuse", "décidée sans transparence ni concertation".
La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, avait promis de faire "un point d'étape" dans "quelques mois" sur l'augmentation de la taxe foncière qui devrait, si elle est effective, profiter aux collectivités locales qui la perçoivent.
"Au moment où on est sur le budget, ce n'était pas le moment" pour l'augmenter, "il y a une volonté du gouvernement de pouvoir suspendre l'application de cette mesure", a déclaré le ministre invité de la matinale de RMC/BFMTV. "La vraie réforme nécessiterait d'être dans une nouvelle logique, des nouveaux paradigmes, et là, on n'est pas dans le moment pour le faire", a-t-il ajouté, précisant que ça n'était pas à lui d'annoncer une éventuelle suspension de l'application de cette mesure.
De son côté, la ministre de l'Action et des Comptes publics, Amélie de Montchalin, avait annoncé réunir aujourd'hui "les associations d'élus, les parlementaires" pour "faire le point" sur cette augmentation, qui devait, si elle était effective, profiter aux collectivités locales qui la perçoivent. "Soit les élus considèrent que, comme c'est une bonne idée et que ça permet quand même de mettre de la clarté, de la cohérence, on le fera. Soit ils veulent qu'on fasse des ajustements, on les fera, mais on avance", avait-elle expliquée, invitée sur Public Sénat.
"J'ai demandé aux ministres concernés de dilater ce calendrier pour nous emmener jusqu'au mois de mai ou juin pour permettre cette approche départementale", voire "commune par commune", a précisé le Premier ministre lors de la séance des questions au gouvernement. "On est en train de traiter nationalement un sujet qui parfois n'a strictement rien à voir d'un département à l'autre", a expliqué le chef du gouvernement, en dénonçant au passage "le procès" lancé par "certains extrêmes ou démagogues" contre les élus locaux qui la perçoivent. "Notre système de revalorisation des bases locatives, tel qu'il existe depuis 1959", est devenu "caduc", a ajouté Sébastien Lecornu, en invitant les élus locaux "à tracer un chemin nouveau sur la révision" de ces bases.
Histoire à suivre, donc.
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"Lorsque vous rajoutez des règles qui peuvent apparaître complètement déconnectées de toute forme de sens commun, par définition, elles deviennent incompréhensibles. Et ça pose une question plus grave qui est la question du consentement à l'impôt", a fait valoir le premier Ministre, en répondant au chef de file du groupe les Républicains Mathieu Darnaud, ici en photo, qui avait dénoncé dans ce mode de calcul "un chef-d'oeuvre du cynisme" et rappelé qu'il voulait dans le budget "plus d'économies" et "moins de taxes injustes". © Vincent Isore / IP3 Press / MAXPPP).