"On avait parlé d'une éclaircie, elle a eu lieu" : c'est par ces mots qu'Olivier Salleron a débuté la conférence de presse de la la Fédération française du bâtiment ce mercdredi 25 juin 2025. "Mais on partait de très très bas", a-t-il précisé, rappelant que, de fait, la FFB "ne baisse pas la garde". Atrement dit : la FFB souhaite conserver les avancées de 2025 et continuer le combat, car le secteur du bâtiment n'est pas encore sorti de la crise.
La plaquette "Le bâtiment en chiffres", résumant les données structurelles du secteur et ayant été mise à jour (2024), permet à la FFB, sur la base de données officielles, notamment de l’Insee, d'affirmer que le bâtiment faisait travailler 1 749 000 actifs, dont :
– 1 258 000 salariés ;
– 95 000 intérimaires en équivalent-emplois à temps plein ;
– et 396 000 artisans non salariés.
Au global, cela correspond à la moitié de ce qu’on relève dans l’industrie et à deux fois ce qu’on observe dans les activités de banque et d’assurance. Ces emplois ont permis de générer un chiffre d’affaires hors taxe de 208 milliards d’euros, soit un recul de 4 % sur un an et même de 6 % hors effet prix. L’impact de la crise se lit notamment dans l’effondrement de la part du neuf, qui tombe à 43 % comme à la fin de la crise des années 1990. La rénovation énergétique, elle, résiste et compte pour 15 % de l’ensemble.
Selon la fédération professionnelle, "le redressement du logement neuf se confirme" début 2025, "mais à partir d'un très bas niveau", laissant entrevoir une timide sortie de crise après deux années plombées par les coûts de construction et les taux d'intérêt.
Le début 2025 révèle un léger mieux dans le neuf alors que la rénovation cale. © Freepik
Côté logement neuf, en glissement annuel sur les quatre premiers mois de 2025, les mises en chantier progressent de près de 8 %, surtout grâce au collectif alimenté par les effets du
plan de relance Action Logement - CDC Habitat, mais l’individuel se redresse également. De plus, les permis s’envolent de 12 %, une dynamique s’expliquant assez clairement par les impacts combinés de l’amélioration des conditions de crédit et du PTZ ré-élargi. Toutefois, seuls seuls 270 000 logements sortiraient de terre en rythme annuel en 2025, soit un niveau inférieur à 2024.
La sortie de crise du logement neuf "n'est pas présente, elle reste à espérer et surtout à booster avec ce statut du bailleur privé et à condition que les taux d'intérêt restent tels qu'ils sont aujourd'hui", prévient Olivier Salleron. Le gouvernement a chargé deux parlementaires de travailler sur un statut du bailleur privé afin d'améliorer l'attractivité et la rentabilité de l'investissement locatif.
La situation ressort plus contrastée dans le non résidentiel neuf : en glissement annuel sur les quatre premiers mois de 2025, les surfaces commencées s’affichent encore en petite baisse d’environ 2 %, mais les surfaces autorisées se redressent de plus de 5 %, portées notamment par les bâtiments industriels, les bâtiments agricoles et les commerces. Par contre, inutile d'espérer que le bâtiment bénéficie de l’impact prémunicipales habituel, les surfaces commencées et autorisées de bâtiments administratifs s’inscrivant déjà en recul.
La principale déception vient du segment de l’amélioration-entretien qui comptait pour près de 57 % de l’activité bâtiment en 2024, comme indiqué dans "Le Bâtiment en chiffres". De fait, après quelques hésitations fin 2024, il fléchit de 1,2 % sur un an au premier trimestre 2025, en volume, et logement et non résidentiel contribuent tous deux à la baisse. La rénovation énergétique du logement n’est pas en reste, avec - 0,6 % en lien avec le blocage de MaPrimeRénov’ en début d’année, alors que celle du non résidentiel conserve sa dynamique (au-delà de 3 %).
Les annonces rapprochées de la réforme des CEE et du gel de MaPrimeRénov’ n’aident pas, même si la FFB a réussi à sauver l’essentiel : le non gel de MaPrimeRénov’ par geste(s), où les difficultés de l’Anah semblent circonscrites. Pour Olivier Salleron, ce "stop-and-go permanent fait beaucoup de mal, tant chez les ménages que chez les artisans."
Face à cette situation, les entreprises se mettent progressivement en capacité de supporter un tassement durable de l’activité. Toutefois, la forte hausse des défaillances constatée en 2024, avec + 22,5 % en nombre d’entreprises concernées, cède la place à une petite baisse de 0,7 % en glissement annuel sur les cinq premiers mois de 2025.
Et... l'emploi dans le BTP continue de reculer. Selon les données officielles, il abandonne 2,4 % par rapport au premier trimestre 2024, avec 33 000 postes perdus, dont 25 000 salariés. Olivier Salleron précise que la FFB avait établi une "estimation de 50 000, qu'elle garde", et ce d'autant plus qu'à l’horizon de l’été, les chefs d’entreprises se montrent de moins en moins optimistes sur les perspectives d’emploi salarié. "Les entreprises artisanales", pour le président de la FFB, "payent la crise du neuf et de la rénovation énergétique".
Pour commencer, il faut une réouverture de MaPrimeRénov’-travaux d’ampleur à la mi-septembre, comme annoncé par le gouvernement, et dans de bonnes conditions, notamment
en ce qui concerne les barèmes d’aide.
Ensuite, concernant la loi de finances pour 2026, la FFB demande qu’elle retienne :
– a minima, la préservation du budget de MaPrimeRénov’, soit 2,3 milliards d’euros d’engagement État, auxquels s’ajouteront des CEE majorés pour accompagner l’accélération des rénovations d’ampleur ;
– Le maintien du PTZ neuf ré-élargi à tout le territoire et à tous les types de bien, d’autant qu’il est aujourd’hui prévu jusqu’à fin 2027 ;
– Et, enfin, la mise en place du statut du bailleur privé.
En complément, la FFB souhaite un renforcement de la lutte contre la fraude, ce qui passe, entre autres, par la mise en œuvre de l’abaissement à 25 000 euros de CA de la franchise de TVA pour les micro-entrepreneurs du bâtiment. "La fraude est là et elle est bien là", prévient Olivier Salleron, ajoutant que "les gros fraudeurs sont très faciles à traquer, l'Anah connaît parfaitement les noms des sociétés qui reviennent souvent avec des factures à 69 000 euros et quelque."
Enfin, la FFB pousse pour que le travail de simplification raisonnée aille à son terme. À cet égard, elle attend avec impatience la remise du rapport Rivaton sur les marches 2028 et 2031 de la RE2020. Elle souhaite également que les principales préconisations de la proposition de loi TRACE soient retenues pour simplifier sans dénaturer le ZAN. Et elle ne cesse de porter une réforme complète de la REP, dispositif qui ne satisfait personne aujourd’hui.
En conclusion, pour la FFB, "les devoirs de vacances prennent donc sans tarder le relai d’une première moitié de l’année déjà bien chargée."