En vertu d'un décret du 12 février 2025, les propriétaires bailleurs peuvent désormais engager, à compter du 1er juillet, une procédure de saisie sur salaire de leur locataire en cas d'impayés de loyers, en passant par un commissaire de justice (ex-huissier de justice) et non plus après autorisation d'un juge comme c'était le cas jusqu'à présent.
Le locataire défaillant a un mois pour contester ou négocier l'injonction de payer. Le calcul des montants saisis n'est toutefois pas modifié.
Pour la Confédération nationale du logement (CNL), d'obédience communiste, cette nouvelle procédure de saisie sur salaire en cas d'impayés de loyers constitue "une nouvelle attaque d'ampleur contre les locataires les plus fragiles", arguant que cette "mesure va réduire un peu plus la voix des habitants en impayés, qui se retrouveront privés de recours immédiat et de protection", ainsi que la Confédération l'a dénoncé dans un communiqué.
"Un commissaire de justice peut engager une saisie sur salaire sans passer par une audience de conciliation, sans débat contradictoire. Le juge n'intervient qu'a posteriori, en cas de contestation", ajoute ladite Confédération, pour qui "cette réforme va accélérer le recouvrement des propriétaires bailleurs au mépris des droits et de la vie des locataires en situation de détresse financière".
Cette nouvelle disposition s'inscrit dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice de 2023. Elle vise à simplifier et accélérer les procédures de saisie d'une partie du salaire d'un salarié, et ce quel que soit son contrat de travail. Toutefois, si le revenu saisissable se compose également des indemnités de chômage et des pensions de retraite, il n'inclut pas le RSA (Revenu de Solidarité Active).
Il est obligatoire de laisser à la disposition du débiteur le "solde bancaire insaisissable" (SBI) qui s'élève à 646,52 euros. © Freepik
Pour engager une procédure, le bailleur doit disposer d'un titre exécutoire, à savoir un document officiel constatant la dette locative et lui permettant d'obtenir le recouvrement forcé de sa créance, ce qui peut être délivré par un juge ou un notaire. Il doit ensuite faire délivrer un commandement de payer par un commissaire de justice. Ce commandement doit être inscrit sur le registre numérique des saisies des rémunérations, ce dès sa signification.
En réalité, selon certains spécialistes (avocats en droit immobilier, notamment) de la question, cette nouvelle qui semble révolutionnaire pour les bailleurs, ne ferait qu'accélérer la procédure d'un ou deux mois. Voici les principales raisons :
– Passer par un juge demeure indispensable car la procédure (qui dure généralement plusieurs mois) pour obtenir un "titre exécutoire" reste une condition sine qua non afin de pouvoir effectuer la saisie ;
– Le locataire, et d'autant plus s'il est de mauvaise foi, peut faire traîner la procédure : ainsi, une fois que la décision d'expulsion a été validée, le propriétaire doit demander à un commaissaire de justice d'adresser un commandement de payer au locataire (ce dernier, dans un délai d'un mois, peut contester cette décision ainsi que la demande de saisie et ainsi faire traîner la procédure judiciaire, sauf si le juge décide de ne lui accorder aucun délai) ;
– Le locataire est ou se rend insolvable : pour éviter d'avoir à rembourser leurs loyers impayés, certains organisent leur insolvabilité, et la procédure peut donc prendre des années ; les propriétaires déterminés à récupérer leurs loyers n'ont donc plus qu'à s'armer de moyens financiers, de courage... et de patience !