Construire avec les occupants, le nouveau challenge de Paris Habitat

Construire avec les occupants, le nouveau challenge de Paris Habitat

Le 25 janvier, Paris Habitat, premier bailleur parisien, a présenté les démarches de concertation engagées pour trois opérations au Pavillon de l’Arsenal. Photo © Vraiment Vraiment




Paris Habitat, engagé dans la rénovation lourde de nombreux immeubles dont les HBM de la ceinture, présentait le 25 janvier au Pavillon de l’Arsenal les démarches de concertation engagées pour trois opérations. L’opération de la rue Alphonse Karr a donné lieu à l’ouverture d’un café dédié côté rue.

 

 

Le nouveau record de contamination et la situation hors de contrôle de la capitale n’a pas dissuadé une foule dense et plutôt jeune de venir au Pavillon de l’Arsenal pour assister à une séance de restitution de plus de deux heures, organisée par Paris Habitat. Ni d’ailleurs un collectif de mal logés de protester bruyamment à l’extérieur, mais sans rapport direct avec l’événement.

 

 

La concertation conduit aussi à des prouesses de représentation graphique. © Vraiment Vraiment

 

Concertation

 

 

La ceinture des HBM (Habitat Bon Marché, modèle des futurs HLM) est déjà depuis quelques années une priorité de Paris en matière de rénovation. Les immeubles sont plus ou moins centenaires et une rénovation lourde est de mise pour réduire les émissions d’usage, mais aussi préparer ces immeubles à un futur climatique difficile à vivre, notamment l’été. Comme les bâtiments sont pour la plupart classés, le recours à une isolation par l’extérieur est impossible, et il faut recourir aux doublages moins performants en termes d’isolation, et qui font perdre de l’espace de vie dans des appartements qui, dans le cas de l’opération de la rue Sthrau du 13e arrondissement, ne dépassent guère une moyenne de 30 m2. Autant dire que ces interventions, chiffrées entre 65 000 et 90 000 euros, doivent être préparées avec doigté. Selon Paris Habitat, les habitants qui vivent souvent dans ces appartements depuis de très longues années sont appelés à voter. Pour autant, quand on change le chauffage, les occultations, l’isolation, la ventilation, en procédant par colonnes, il n’est pas question de réhabiliter le niveau 1 et 3 et pas le 2 car le résident a voté contre.

 

 

Illustration de l’approche Djuric Tardio/Vraimentvraiment pour l’opération HBM Alphonse Karr. © Vraiment Vraiment

 

 

 

L’accent de la soirée (retransmise en direct et désormais en ligne sur le site de l’Arsenal) était mis non sur les performances techniques à atteindre pour diminuer les émissions de GES à l’usage, voire les émissions induites par les travaux de rénovation, et le sens actuel de ces rénovations, qui visent également à préparer Paris à l’ère des grandes canicules et autres désordres climatiques. Cela avait déjà été fait en mai sur le même lieu et avec le même animateur. Cette fois, il s’agissait surtout de témoigner des démarches de concertation engagées auprès des habitants.

 

 

 

Les maquettes amovibles, vecteur de la concertation. © Djuric Tardio Architectes

 

 

Au-delà de l’architecture

 

 

Parmi les invités, l’architecte et enseignant Mirco Tardio, enseignant apparemment populaire, spécialiste des bâtiments à trame convertible. Il était venu témoigner de son travail préliminaire de rencontre des habitants d’un ensemble HBM de 480 logements situés dans le 19e arrondissement (résidence Alphonse Karr). Selon lui, la fréquentation de cette soirée s’explique par l’intérêt majeur que revêt actuellement la réhabilitation au sein du monde architectural. Ce travail de réhabilitation en zone occupée et de profonde concertation avec les habitants correspond à ce qu’il a fait en Italie avant de venir en France, et il l’affectionne particulièrement. Si les bâtiments sont classés et qu’on ne peut pas procéder à une ITE, eh bien, on fait avec : « C’est comme en Italie, on rénove des palais avec très peu de marge de manœuvre en en tirant le maximum ».

 

Les édifices anciens comme les HBM ou les immeubles hausmanniens ont beaucoup de ressources propres pour garantir un confort de vie acceptable en situation limite climatique, il s’agit juste de les exploiter et de montrer aux habitants comment les exploiter. Par contre, Mirco Tardio reconnaît que la démarche de concertation, qui vise à entrer directement en contact avec les 480 logements et leurs habitants, ne fait pas partie du métier de l’architecte. D’où l’importance de s’associer à l'agence Vraimentvraiment, très innovante dans sa méthodologie et qui a réinventé la concertation en éditant des images concernant les différents aménagements des pièces habitées, en fonction de la réalité rencontrée. Ce dispositif est rendu possible par l’investissement de Paris Habitat, mais aussi très largement de la ville de Paris.

 

 

 

La surface moyenne des appartements centenaires de la rue Shtrau est de 30 m2 moins les doublages de l’ITI qui vont s’imposer. © Brunnquell & André

 

 

Tandis que l’opération Alphonse Karr du 19e, orchestrée par l’agence Djuric/Tardio et Vraimentvraiment, n’en est vraiment qu’à ses débuts (il faut compter encore 4 ans pour arriver à l’achèvement), l’opération de la rue Sthrau, dans le 13e, également HBM mais pour 180 logements, est déjà un peu plus avancée. Lors des journées du patrimoine, il avait été possible de visiter un logement témoin mais Xavier Brunnquell, architecte chez Brunnquell & André architectes, est allé plus loin avec la proposition notamment d’un logement pourvu de cloisons déplaçables pour permettre aux habitants de se faire une bonne idée des modifications possibles.  

 

 

La concertation passe par un travail sur des maquettes amovibles et se poursuit dans l’idée d’un logement témoin à cloisons déplaçables. © Brunnquell & André

 

 

 

Nouveau métier

 

 

Les deux agences Fagart Fontana architectes (Line Fontana) et AUC architectes (Djamel Klouche) planchent sur la transformation de la tour Poissonniers désamiantées en résidence universitaire. Même dans ce cas, des opérations de concertation sont actuellement menées avec des étudiants pour valider les choix.

 

 

Quand on songe au fiasco presque total des opérations de rénovation énergétique dans les copropriétés depuis dix ans, force est de constater qu’une sorte de nouveau métier est en train de se créer en amont des opérations proprement architecturales liées à la réhabilitation dans l’existant. Il en va du travail social, sociologique, psychologique avec tout de même une bonne connaissance des enjeux techniques et économiques.

 



Source : batirama.com / Jonas Tophoven

L'auteur de cet article

photo auteur Emilie Wood
Journaliste, photographe, vidéaste, Emilie Wood travaille depuis 2010 pour la presse, qu’elle soit professionnelle dans les domaines du BTP et de l’agriculture, ou généraliste. Pour Batirama, elle écrit sur des sujets aussi variés que la conjoncture BTP, l’évolution de la réglementation, la rénovation énergétique, les réformes, les innovations, ou encore l’actualité de l’immobilier. Elle apprécie particulièrement réaliser des portraits d’entreprises et révéler les femmes et les hommes qui, chacun à leur manière, font une différence, qu’ils soient entrepreneurs ou collaborateurs d’entreprise.
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