Le gros oeuvre au défi de la décarbonation

Toiture solaire Edilians

L’arrivée de la RE2020 en particulier a accéléré la décarbonation du gros œuvre tout en renforçant la poursuite des objectifs de performances des bâtiments.




Par étapes, la réglementation et les labels environnementaux poussent l’exigence de performances des bâtiments, pour la thermique avec la nouvelle RE2020, pour l’acoustique ainsi que pour la protection incendie. Le plus grand saut qualitatif concerne les objectifs de décarbonation du bâti tandis qu’en parallèle, les produits continuent à évoluer en durabilité, résistance mécanique et esthétique.

 

Stand Perrin sur Artibat

Le stand du groupe Perin au salon Artibat 2023 © Emilie Wood

 

Ainsi le fabricant spécialisé dans le gros oeuvre, Perin & Cie a annoncé sur Artibat le lancement de son bardage ventilé en béton fibré (BFUP) de Ductal, qui offre une grande résistance mécanique avec une faible épaisseur. L’obtention de l’agrément CSTB est attendu en septembre. Ces produits sont décoratifs, matricés en finesse avec différentes esthétiques : du bois, des vagues, des dessins, un aspect métal, etc.

 

De la thermique à l’énergétique

 

IsoBric Wienerberger

La RE2020 encourage une stratégie globale. ISObric, une brique de 20 cm à isolation intégrée a été lancée en juin 2023 par Porotherm (Wienerberger). Ses trois rangées d’alvéoles remplies d’isolant en laine de roche hydrophobe lui donne une résistance thermique R =2m²K/W, lui permettant d’assurer 30 à 45% de la performance de la paroi. Son poids inférieur à 18,5 kg diminue son impact carbone et facilite sa mise en oeuvre.

 

La décarbonation passe aussi par la production d’énergie renouvelable sur site. L’offre globale d’Edilians combine des écrans de sous-toiture comme le nouveau SKINReflex et des tuiles dont les tuiles solaires. Une belle réalisation est située dans l’îlot B107 de la ZAC Bastide Niel à Bordeaux. La toiture et le bardage de cet immeuble de logements sociaux conçus par le groupement Delta Construction et BPM Architectes, sont habillés par 3.500 m² de tuiles Diamant Huguenot coloris argentique ainsi que par 900 tuiles Solaire Max d’Edilians (voir photo de une).

 

Le biosourcé revient au galop

 

weberdry bitfondation

Weberdry bitufondation © Weber


Largement utilisés dans le passé en construction traditionnelle, les matériaux biosourcés séduisent à nouveau. Ainsi, Weber enrichit encore sa gamme d’imperméabilisation avec deux produits bitumeux de protection des fondations pour parois enterrées formulés à partir de résines végétales qui les rendent inodores. Prêts à l’emploi et sans solvant, ces produits, weberdry emulfondation et weberdry bitufondation, offrent un confort d’application optimal pour les artisans.
 

Un autre atout des matériaux biosourcés est de réduire l’impact carbone du gros oeuvre. Préfabriquée en béton très bas carbone, les dalles de la gamme de planchers Rlite de Rector intègrent en usine des panneaux isolants biosourcés en fibre de bois, espacés par des nervures en béton armé. Résultat, les dalles sont allégées en poids et avec un impact carbone réduit.(Plus d'infos à la fin de notre article sur la mise en oeuvre du système Caméléo de Rector).


De son côté, Unilin Insulation étoffe sa gamme de panneaux de toiture Usystem Roof avec de la fibre de bois. Deux nouveaux produits viennent d’être commercialisés, Usystem Roof OS Comfort Natural et Usystem Roof DS Natural Wool, un panneau sandwich chevronné à base de fibre de bois et pare-vapeur intégré (R =6,10m²K/W). La mise en oeuvre de ces matériaux biosourcés demande de contrôler sur chantier le taux d’humidité et de veiller aux potentiels infiltrations d’eau.

 

Doerken Delta XX Plus

© Doerken

En mars dernier, Doerken a élargi sa gamme en proposant une membrane temporaire de protection des éléments de construction en bois, le Delta Woodixx.

 

Économie circulaire

 

Une autre voie majeure de la décarbonation est l’économie circulaire avec l’incorporation croissante dans les produits de matière recyclée. Depuis plusieurs années, l’industriel PRB a développé une gamme complète "Responsable & Durable". "Cette gamme compte neuf produits éco-conçus bas carbone. Actuellement en phase de test, un nouveau produit, le PRB Mortier de réparation R3 R&D rejoindra cette gamme fin 2023", confie Cyrielle Henrionnet, chargée de communication et marketing digital. Nouvelle étape de cette décarbonation, PRB s’engage depuis janvier 2023 à incorporer des granulats recyclés dans ses bétons fabriqués dans son usine de Sorgues.

 

bloc Edycem


Autre acteur, Edycem, la branche béton du Groupe Herige, a dévoilé sur Artibat sa nouvelle démarche d’économie circulaire en circuit court "Circuit + by Edycem". Sont concernées ses trois activités de fabrication de béton prêt-à-l’emploi, de préfabrication et sur sa plateforme de recyclage de Mérignac. L’ensemble de sa gamme de blocs classiques intègre désormais 10 % de granulats récupérés, exclusivement issus des rebuts de production d’Edycem PPL.


Toujours sur Artibat, Perin&Cie a présenté sa nouvelle gamme de produits béton pour les TP et gros oeuvre intégrant dans sa composition le ciment décarboné MCC1R (Clay Cement 1) développé par Materrup à base d’argiles non calcinées. "Les premiers produits disponibles à la vente dès cet été sont des pavés, des pavés drainants, qui ont une double action, décarbonée et une fonction drainante, des aménagements extérieurs (petits pavés, dalles, petites bordures...), ainsi que des bordures TP, de type bordures de trottoir ou caniveaux", présente Jean-Pierre Laviolette, directeur commercial, Perin&Cie.

 

Témoignage : Kader Guettou, directeur général du pôle entreprise chez GA Smart Building

Portrait de Kader Guettou, GA Smart Building

Batirama : Quels sont les impacts de la RE2020 sur le gros oeuvre en termes d’innovations ?

Kader Guettou : Avec la RE2020, l’innovation sur le gros oeuvre est très centrée sur le bas carbone, avec un impact pour le béton structurel ainsi que sur le développement de la mixité des matériaux. Actuellement nous avons trois grands axes de développement, que sont l’optimisation des structures, avec une utilisation du béton lorsqu’il est strictement nécessaire, un travail sur la formulation des bétons afin de réduire leur impact carbone et enfin la conception de nouvelles solutions constructives multi-matériaux à l’exemple de notre plancher mixte bois béton industrialisé hors site, Atom Wood.

Concernant les bétons, nous n’utilisons plus de CEM I dans nos usines, mais plutôt à minima du CEM II, parfois avec du laitier Ecocem issu des rebuts de haut fourneau ou du CEM III. L’impact carbone est réduit d’environ 40%. Nous avons aussi en hors site une fabrication importante de bétons précontraints et là aussi l’enjeu est de réduire leur impact carbone.

 

Quelle influence de l’optimisation de la matière sur l’inertie du bâtiment et sur le confort d’été ?

K. G : Historiquement, nous avons favorisé la structure poteaux poutres dans une dynamique d’économie de matière. Une autre innovation en résidentiel comme en bureaux est de remplacer le remplissage béton des façades par de l’ossature bois. Environ la moitié de nos façades sont dorénavant à ossature bois ce qui réduit la matière utilisée et limite l’impact du poids sur la structure. Le résultat est une façade biosourcée, incluant un isolant tel que la laine de bois, avec une structure béton. En revanche cela demande d’être vigilant en phase chantier pour éviter les désordres liés à l’humidité ou les infiltrations d’eau. L’inertie est toujours apportée par les grandes surfaces de béton des planchers. En tertiaire, nous supprimons les faux plafonds et intégrons les réseaux de circulation d’eau dans des planchers actifs. Un autre exemple est donné par notre plancher Atom Concrete+, qui avant intégrait du PSE qui a été remplacé par l’emploi de liège.

 

Et côté économie circulaire ?

K. G : Nous investissons beaucoup sur le réemploi qui est un axe fort de décarbonation, comme sur nos dernières opérations en bâtiments de bureaux dont notre futur siège social à Toulouse. En particulier, nous faisons appel à l’économie circulaire pour les faux planchers, les baffles acoustiques en plafond, les blocs sanitaires… La terre excavée sur le site est souvent polluée et difficile à réemployer dans le bâtiment. Néanmoins sur une opération récente, nous envisageons avec la maîtrise d’oeuvre de retraiter la terre excavée et de la réutiliser en béton de terre pour des panneaux structurels fabriqués en usine.
 




Source : batirama.com / François Ploye

L'auteur de cet article

photo auteur François Ploye
François Ploye, de formation ingénieur ECP, est journaliste freelance de la presse écrite depuis plus de vingt ans. Après une première expérience professionnelle en maquette numérique 3D et en effets visuels, il a poursuivi sa carrière comme journaliste à la suite de l'écriture d'un livre sur les changements climatiques publié en 2000. Après de premières collaborations (Jeune Afrique, Sonovision, 01 Informatique...), il s'est spécialisé depuis quinze ans dans l'écriture d'articles pour le bâtiment, les énergies renouvelables, l'architecture et la ville. Avec un engagement, celui d'accompagner les mutations d'un secteur confronté à de multiples défis environnementaux et sociétaux.
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