La dernière rénovation HQE au gaz individuel dans Paris ?

La façade rénovée du 65 rue Meslay dans le troisième arrondissement de Paris

La chaudière murale gaz individuelle constitue la base de la rénovation du chauffage individuel en immeuble collectif dans les villes. A défaut, il ne restera que le chauffage électrique direct.




Pour le compte de la RIVP et avec le soutien financier et juridique de la Ville de Paris, l’entreprise générale Genere vient d’achever la rénovation d’un ensemble de trois bâtiments collectifs rue Meslay à Paris dans le IIIème arrondissement en septembre 2023. Conçue par le cabinet Philippe Roux architectes associés – Philippe Roux, chef d’agence et associé, Luc Viel, chef de projet -, avec le bureau d’études Cotec – Ahmed Zeroual, chef de projet -, cette rénovation atteint un excellent résultat : 67% de gain sur le CEP, 69% sur le Ubat, certification NF Habitat HQE Niveau supérieur (7 étoiles), …

 

Pourtant, ce sera sans doute l’une des dernières de ce genre.

 

Une rénovation parfaite

 

La rénovation du 65 rue Meslay a commencé par un marché de maîtrise d’œuvre passé en 2016, une demande de permis de construire déposée en 2018. Les travaux ont débuté à l’automne 2021, au milieu de la pandémie du Covid 19 - petit retard de chantier bien explicable – pour une livraison en septembre 2023.

 

Le chantier était complexe. La date de construction des bâtiments s’étend du début à la fin du XIXème siècle, une partie des bâtiments n’avait pas de fondations. Il a fallu déposer la structure porteuse des planchers bois qui avait tendance à pousser vers l’extérieur les façades en briques et pans de bois. Une structure métallique a été installée pour reprendre la charge des planchers bois. ©PP

 

Avant rénovation, cet ensemble de bâtiments était une copropriété avec des ateliers, des bureaux et des logements. Devenu quasi-insalubre, l’ensemble a été préempté par la Ville de Paris qui a décidé de le transformer en logements.

 

20 logements ont été créés, ainsi qu’un ascenseur pour conférer un accès PMR à 5% des logements du bâtiment. Il y avait trois cages d’escaliers, une a été supprimée. ©PP

 

Une isolation par l’extérieur en laine de roche a été posée sur les quatre façades de la cour et sous le porche qui conduit à la rue Meslay. En revanche, l’ABF (Architecte des Bâtiments de France) a refusé une ITE sur la rue Meslay. Les concepteurs se sont donc rabattus sur une ITI en laine de roche. Les fenêtres sur cour sont pourvues de protections solaires extérieures pour le confort d’été et l’occultation. Sur la rue, l’ABF n’a pas accepté de protections solaires extérieures. ©PP

 

Toutes les fenêtres ont été remplacées par des menuiseries portant du double vitrage et fournies par Menuiseries Helleux. Elles portent des entrées d’air et, dans le cadre de la certification HQE, les débit de ventilation ont été vérifiés à la livraison. ©PP

 

Côté santé et qualité de vie, les compteurs électriques ne sont ni adossés, ni accolés à une pièce de sommeil, la totalité des matériaux utilisés dans les logements atteint une étiquette A+ ou davantage. Les sols portent les planchers originels ou bien un revêtement de sol Forbo Marmoleum.

 

A l’extérieur, les matériaux et revêtement utilisés ont une durée de vie moyenne supérieure à 35 ans, une fréquence moyenne d’entretien supérieure à 10 ans, …

 

Bref, cette rénovation a obtenu un label NF HQE Habitat 7 étoiles, avec un niveau Qualité de vie de 2 étoiles, un respect de l’environnement à 2 étoiles aussi et une performance économique 3 étoiles.

 

Des chaudières gaz à condensation sur conduit collectif 3CE

 

Mais voilà, comme l’indiquaient les concepteurs lors de la visite le 13 septembre dernier, s’ils devaient reconcevoir cette opération, leur solution pour le chauffage serait du chauffage électrique direct – perfectionné, connecté, avec détection de présence, auto-apprentissage pour une auto-programmation et tout, mais du chauffage électrique direct tout de même – et des ballons thermodynamiques pour la production d’eau chaude sanitaire. Le responsable de la RIVP notait à cette occasion que le coût de maintenance et la fiabilité des ballons thermodynamiques en collectif ne parvenaient pas encore à des niveaux qui lui convenaient. En gros, ils ne sont pas assez fiables et leur entretien revient trop cher.

 

Les logements dans cette rénovation sont donc équipés de chaudières gaz murales Atlantic étanches à condensation, raccordées à des conduits collectifs 3CE de Poujoulat. C’est une solution éprouvée et efficace. ©PP

 

Dans chaque logement, la chaudière est pilotée par un thermostat programmable connecté, accessible avec l’application CozyTouch d’Atlantic et les radiateurs de chaque pièce sont pourvus de robinets thermostatiques. ©PP

 

Mais, depuis le 1er juin 2023, les chaudières individuelles gaz haute performance (à condensation) ne sont plus éligibles à MaPrimeRenov’ et, à compter du 1er janvier prochain, elles ne rapporteront plus de CEE, puisque la fiche d’opération standardisée BAR-TH-106 "Chaudière individuelle à haute performance énergétique" sera annulée et pas remplacée. Bref, les chaudières individuelles à gaz ne bénéficieront plus d’aucun soutien financier en rénovation. Ce n’est pas encore le cas des chaudières collectives pour lesquelles les fiches BAT-TH-107 et 107-SE existent toujours. Dans un communiqué de presse publié le 9 septembre 2023, la FFB avance de plus noirs desseins encore : "un amendement gouvernemental au projet de loi de finance serait en préparation pour exclure les chaudières gaz du champ de la TVA à 5,5 % et les soumettre au taux de 20 %. Leur éligibilité à l’éco-PTZ se trouverait également menacée", indique le communiqué. Rappelons que la RE2020 rend très difficile l'installation de chaudières gaz en construction neuve. Dans ces conditions, pourquoi les interdire ? Autant, les étouffer brutalement, sans avoir à endosser l'opprobre d'une interdiction.

 

Dans un bâtiment en milieu urbain dense, comme le 65 rue Meslay derrière la Place de la République à Paris, hormis des chaudières gaz individuelles ou du chauffage électrique direct associé à des ballons thermodynamiques, il n’y a pas d’autre solution. Du chauffage collectif, que ce soit à partir d’un réseau de chaleur ou d’une chaufferie consommait trop de place au rez-de-chaussée, au détriment du local poussettes ou du local vélos, par exemple. Des pompes à chaleur individuelles étaient inconcevables : rappelez-vous, l’ABF n’a même pas accepté de l’ITE sur la rue, alors des pompes à chaleur, …

 

Il semble bien que la solution technique devenue standard et déployée dans cette rénovation aura bientôt disparu de la panoplie des concepteurs et des entreprises.

 

Cour étroite, appartements en vis-à-vis, la solution chaudières murales individuelles sur conduit 3CE était bien adaptée. ©PP



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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