Règlement F-Gaz : le Parlement Européen accélère la disparition des HFC

Un groupe froid de forte puissance au R290

Le Parlement Européen a suivi les recommandations de sa commission de l’Environnement (ENVI) et voté largement pour accélérer la disparition des HFC, mais aussi contre le développement des HFO.




Le 30 mars, le Parlement Européen, réuni en session plénière, a adopté la proposition de sa Commission sur l’environnement (ENVI) sur l’évolution du règlement F-gaz par 426 voix pour, 109 voix contre et 52 abstentions. Vous trouverez ici les "Amendements du Parlement européen, adoptés le 30 mars 2023, à la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux gaz à effet de serre fluorés, modifiant la directive (UE) 2019/1937 et abrogeant le règlement (UE) nº 517/2014".

 

Pour rappel, le règlement F-gaz est un règlement européen visant à réduire l'utilisation des gaz à effet de serre avec comme objectif de diviser par cinq les émission de CO2 d'ici 2030.

 

151 amendements

 

La procédure est la suivante. Il y a un an, le 5 avril 2022, la Commission Européenne a proposé un texte révisant le règlement F-Gaz. ENVI, la Commission Environnement du Parlement Européen a étudié la proposition de la Commission et répondu, sous la conduite de son rapporteur Bas Eickhout, par une contre-proposition modifiant le texte de la Commission.

 

Le 30 mars, le Parlement Européen a adopté sa position définitive que vous pouvez lire, en anglais en suivant le lien du paragraphe au-dessus. Maintenant, un trilogue va s’engager avec le Conseil Européen, qui représente les Etats membres, et avec la Commission, afin de parvenir à un texte commun à l’automne pour une entrée en vigueur début 2024.

 

Le texte adopté par le Parlement Européen le 30 mars compte 151 modifications, des amendements dans le jargon eurocrate, par rapport au texte de la Commission. Nous sommes bien sûr très tentés, mais nous résistons vaillamment à l’idée de les lister toutes.

 

Les principales dispositions

 

Premièrement, l’amendement 4, l’amendement 22 et l’amendement 139 expliquent clairement que on ne doit pas réduire les HFC et laisser se développer les HFO, générateurs de PFAS, et évoque la révision du règlement Reach. La pire crainte d’une partie de l’industrie, qui n’a pas d’autres remplacement du R134a dans leurs compresseurs que des HFO, sont ainsi réalisées. Pour les installateurs, il est prudent de ne plus poser de systèmes contenant des HFO : l’incertitude règne quant à la possibilité d’assurer leur maintenance dans un futur proche.

 

Mais, amendement 12, rien n’est tout à fait perdu, puisque le Parlement reconnaît que l’accélération de la réduction des quotas prévue par sa proposition, pourrait handicaper les fabricants de pompes à chaleur, alors que le programme RePowerEU prévoit leur déploiement à grande échelle. Le Parlement enjoint donc, amendement 102, à la Commission de surveiller attentivement le marché et, si nécessaire, d’augmenter le quota de HFC (comprendre R32) des fabricants de pompes à chaleur, sans toutefois toucher au quota global.

 

Le texte insiste sur la lutte contre le commerce illégal des HFC, sur la vérification de l’étanchéité des circuits réfrigérants chargés en HFC. Les amendes administratives sont augmentées (amendement 132) et peuvent atteindre dix fois la valeur des produits et systèmes concernés en cas de récidive dans les 5 ans.

 

Le texte insiste également sur la nécessaire récupération des HFC qui sont retirés de machines thermodynamiques existantes et sur l’augmentation des compétences des intervenants, installateurs et mainteneurs, à la fois à propos de la manipulation des HFC, mais aussi de l’apprentissage du R290.

 

L’amendement 13 souligne que le basculement vers des hydrocarburesR290, R600, … - conduira à une réduction des coûts pour les fabricants. En effet, les quotas de HFC seront payants (5€ par TeqCO2 pour la période 2024-2020, davantage ensuite selon l’amendement 99), les hydrocarbures échappent à ce système.

 

Le Parlement recommande aux Etats membres de modifier et, surtout, d’harmoniser leurs règlements d’urbanisme et leurs procédures pour que la mise en place de pompes à chaleur utilisant des hydrocarbures soit facilitée.

 

L’amendement 81 contient une petite vacherie, au demeurant parfaitement rationnelle : "à compter du 1er janvier 2017, la quantité, exprimée en poids et en équivalent CO2, de gaz à effet de serre fluorés contenue dans le produit ou l’équipement, ou la quantité de gaz à effet de serre fluorés pour laquelle l’équipement est conçu et le potentiel de réchauffement planétaire de ces gaz, à la fois à 100 ans et à 20 ans." En effet, certains gaz fluorés se dissipent relativement vite, mais affectent très négativement le réchauffement de l’atmosphère pendant leur durée de vie comparativement courte.

 

 

GWP de 150 à partir de 2030

 

 

L’amendement 152 réaffirme deux échéances :

  • À partir du 1er janvier 2024, les utilisations suivantes sont interdites : l’entretien ou la maintenance des équipements de climatisation et de pompes à chaleur ainsi que des équipements de réfrigération et des refroidisseurs fixes et mobiles par des gaz à effet de serre fluorés énumérés à l’annexe I, dont le potentiel de réchauffement planétaire est supérieur ou égal à 2.500.
  • À partir du 1er janvier 2030, les utilisations suivantes sont interdites : l’entretien ou la maintenance des équipements de réfrigération fixes, à l’exception des refroidisseurs, à l’aide des gaz à effet de serre fluorés énumérés à l’annexe I, dont le potentiel de réchauffement planétaire est supérieur ou égal à 150.

Coup de bol pour le R410A, dont le PRP atteint 2088 et qui équipe tous les DRV, splits, multisplits et pompes à chaleur : il pourra être utilisé jusqu’en 2029, y compris pour la maintenance des systèmes existants. Mais pas après. A partir du 1er janvier 2030, quel que soit l’usage, seul le R410A recyclé sera permis, à condition qu’il soit réemployé par l’entreprise qui l’a récupéré (Amendement 92).

 

Le tableau de l’annexe IV interdit les "systèmes bi-blocs d’une capacité nominale égale ou inférieure à 12 kW contenant des gaz à effet de serre fluorés, ou qui en sont tributaires, dont le PRP est supérieur ou égal à 150, sauf si cela est nécessaire pour satisfaire aux normes de sécurité" à compter du 1er janvier 2027. Autrement dit, d’ici 3 ans, les pac bibloc et les monosplits de 12 kW ou moins ne pourront plus être commercialisés avec du R32, dont le PRP est de 675. C’est dans trois ans et demi seulement.

 

 

Les diverses interdictions des fluides dont le PRP est supérieur à 150 - ce qui englobe le R32 - jointes aux difficultés d'installer des réseaux de R290 dans les bâtiments, laisse augure le développement des solutions eau glacée, dont le fluide est confiné dans la machine à l'extérieur, au détriment des solutions à détente directe. ©PP

 

 

Une réaction différenciée de l’industrie

 

Face à ces propositions issues du Parlement Européen, l’industrie a eu des réactions contrastées. Viessmann, par exemple, s’en est félicité par un tweet de Alix Chambris, VP Global Public Affairs and Sustainability.

 

 

Les fabricants de fluides, les vendeurs de fluides et leurs organisations, en revanche ont dénoncé une démarche, selon eux, impossible. Tout comme les fabricants de climatiseurs et de pompes à chaleur asiatiques qui ont beaucoup misé sur le R32.

 

En réalité, la contre-proposition du Parlement n’est pas si radicale en matière de phase-down des HFC. Voici les calendriers comparés de la Commission et du Parlement. Au début, le Parlement ralentit même le rythme proposé par la Commission. En 2049, le Parlement prévoit cependant 0 quota, là où la Commission laisse 811 814 TeqCO2 par an à partir de 2048. ©PP

 

N'hésitez pas à répondre à notre nouveau sondage : selon vous, le marché de la pompe à chaleur est-il prêt pour ces nouvelles règlementations?



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
1 Commentaire
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  • par Enguerran
  • 23/05/2023 22:59:11

Particulier qui souhaite faire une rénovation cette nouvelle réglementation est très perturbante. Que faire ? Investir 15k€ dans une pompe qui ne pourrait plus être entretenue après 2030 ? Y a t il des alternatives ?

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