Une forte pression de l'Etat pour relancer le nucléaire au plus vite

Une forte pression de l'Etat pour relancer le nucléaire au plus vite

2023, une année charnière pour la relance annoncée du nucléaire en France, où l'on parie plus que jamais cet hiver sur l'atome pour garantir l'approvisionnement en électricité, mis à mal par des réacteurs à l'arrêt.




Dans l'immédiat, les Français qui bénéficient depuis les années 60 d'une électricité peu chère et abondante sont confrontés à la hausse des prix de l'énergie dans toute l'Europe, et surtout à un risque inédit de coupures de courant cet hiver. Au coeur du problème: le nombre important de réacteurs arrêtés - jusqu'à plus de la moitié sur 56 - qui a fait chuter en 2022 la production d'EDF au plus bas depuis 30 ans. Dans un pays qui compte principalement sur ses réacteurs pour produire, se chauffer et s'éclairer, "quand le nucléaire est défaillant, cela se voit beaucoup", résume Nicolas Goldberg, expert énergie au cabinet Colombus consulting.

 

Sous forte pression de l'Etat actionnaire, une course contre la montre s'est engagée pour rebrancher un maximum des réacteurs mis à l'arrêt par la découverte de micro-fissures sur des tuyauteries, et par le retard pris par les grosses maintenances décennales des centrales depuis le Covid. "La voie du progrès, c'est de dire d'abord que 'oui ils ont merdé'", lâchait récemment une source gouvernementale, en critiquant "des méthodes opérationnelles d'il y a 20, 25 ans".

 

 

Une visite ministerielle très médiatisée à la centrale de Penly

 

 

Le nouveau PDG d'EDF, Luc Rémont. Capture d'écran de la vidéo du discours disponible sur Twitter. © EDF

 

 

EDF et son actionnaire en froid ont néanmoins affiché leur unité le 9 décembre lors d'une visite très médiatisée du ministre de l'Economie Bruno Le Maire à la centrale de Penly (Seine-Maritime), avec le nouveau PDG d'EDF Luc Rémont.

 

Alors que plus de 500 soudeurs ont été mobilisés pour réparer les tuyaux, dont certains venant des Etats-Unis, trois réacteurs supplémentaires avaient été rebranchés dans la nuit précédant la visite, augmentant à 40 le nombre de réacteurs opérationnels. Ce qui a permis au ministre de déclarer publiquement sa confiance en EDF, en passe d'être totalement renationalisé. Selon lui, le nucléaire doit devenir "la pièce maîtresse" de la stratégie énergétique de l'Etat, annoncée en février par Emmanuel Macron à Belfort.

 

 

Un futur toujours nucléaire

 

 

Parallèlement à une accélération des énergies solaires et éoliennes, l'Etat mise en effet sur la construction de 6 à 14 réacteurs dits "EPR de nouvelle génération", et de plus petits réacteurs dits SMR, pour "produire plus d'électricité décarbonée dans les meilleurs délais" et accompagner "la réindustrialisation à marche forcée" du pays, selon le ministre. Un revirement de l'exécutif qui a commencé fin 2021, la France ayant décidé en 2015 - après l'accident de Fukushima en 2011 au Japon- de fermer 14 de ses 58 réacteurs (deux ont déjà fermé).

 

"2023 sera une année clé pour la filière, pendant laquelle nous allons franchir plusieurs étapes essentielles à la concrétisation de la relance nucléaire", assure Olivier Bard, délégué général du syndicat professionnel de l'industrie nucléaire GIFEN. L'année sera marquée par la clôture en février du débat public sur le nouveau programme nucléaire.

 

La synthèse sera versée au Parlement à qui il reviendra de voter au plus tard en 2024 la nouvelle feuille de route énergétique du pays, fixant la part de chaque énergie, renouvelable et nucléaire. Sans attendre, le gouvernement a déjà présenté en novembre un projet de loi pour accélérer au niveau administratif la construction de nouveaux réacteurs. Un examen est prévu début 2023 par l'Assemblée nationale.

 

Ce coup d'accélérateur irrite les associations antinucléaires et de défense de l'environnement comme le réseau Sortir du nucléaire qui dénonce "une relance du nucléaire coûte que coûte, quitte à piétiner la démocratie et à reproduire les erreurs d'impréparation du passé".

 

 

Objectif 2035

 

 

Pour avoir les coudées franches, l'Etat doit prendre le contrôle total du groupe et a chargé Luc Rémont de reprendre en main une série de défis techniques cruciaux. Avant même de construire des EPR, EDF doit en effet gérer la prolongation de son parc presque quarantenaire.

 

Pour l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), EDF devra apporter la preuve que ses réacteurs seront à même d'être prolongés au-delà de 50 ans, un seuil que les plus vieux d'entre eux atteindront à partir de 2030. D'ici là, après dix ans de déboires techniques, l'EPR de Flamanville censé être le fleuron de la technologie nucléaire, doit enfin être raccordé au réseau fin 2023, avec plus de dix ans de retard.

 

Mais en 2023-2024, la production risque encore d'être affectée par des chantiers de maintenance et de réparation, d'autant que la filière manque de 15 à 20.000 bras.

 

"La filière est lancée dans un marathon pour les cinq prochaines années", estime Nicolas Goldberg. Le branle-bas-de-combat a commencé pour accompagner la relance, qui passera par un "développement de l'attractivité" des métiers, le renforcement des compétences et l'amélioration de la performance des industriels", selon Olivier Bard, du Gifen.

 

Depuis la falaise qui domine la forteresse nucléaire de Penly, là où le premier des nouveaux EPR est envisagé, le directeur du projet EPR2 d'EDF, Gabriel Oblin, l'assure: "On sera au rendez-vous" pour une mise en service en 2035. "Si c'est 2034, c'est mieux!", a lancé le ministre.

 




Source : batirama.com & AFP / Photo : capture d'écran video du discours de Bruno Le Maire à la centrale de Penly (Seine-Maritime), avec le nouveau PDG d'EDF Luc Rémont © EDF

1 Commentaire
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  • par Nouvelleau
  • 13/12/2022 22:59:57

Extraits d’un article de Corinne Lepage : ''Le nucléaire ne coûte pas cher…'' Voici une idée répandue qui trouve régulièrement de nouveaux échos. Pourtant ce qui veut être affiché comme une évidence apparaît bel et bien discutable. Disponibilité du parc, balance énergétique, démantèlement, enfouissement des déchets figurent comme autant d'arguments régulièrement écartés de l'… …. En France, l'Etat soutient la recherche nucléaire par l'intermédiaire du CEA…. …. enfin, il faudrait aborder la question de l'assurance du risque nucléaire plafonné à un peu plus de 2 Mds d'euros (les Suisses évaluent un accident nucléaire à un coût pour la Suisse de 4.000 milliards !), du coût de la gestion des déchets,….

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