Bio Création Bois rebat les cartes de la filière française du bois

Bio Création Bois rebat les cartes de la filière française du bois

Fournisseur historique des agencements de boutiques bio, le Breton a réagi l’an dernier à la crise des approvisionnements pour aller vers le circuit court de forêts gérées en futaie irrégulière.




Bio Création Bois poursuit une politique de fourniture basée sur le bois massif sans colle.

Photo © Anais Bouchard

 

 

Un an après la crise des approvisionnements, Anthony Meignen, directeur général de Bio Création Bois, fait le bilan suivant : le prix des fournitures de certains produits à base d’essence résineuses a doublé en un an. En janvier, une baisse de l’ordre de 10% est intervenue mais il semblerait que les prix repartent à la hausse. Sur ces mêmes références, les délais de livraison ont atteint 8 à 10 mois pour un camion complet, mais on est revenu à une situation normale. Le directeur général se réfère notamment à l’épicéa 3 plis de 22 mm qui n’est pas fabriqué en France, un camion représentant 200 panneaux de 10 m2.

 

Pour Bio Création Bois, ce produit est stratégique car il remplace les panneaux de particules, medium voire contreplaqués exclus en fonction d’une politique de fourniture basée sur le bois massif sans colle. Bio Création Bois espère bien proposer à ses clients des alternatives, notamment en feuillus français, mais pour l’heure, les contreplaqués font des progrès quant aux additifs de colles mais n’ont pas encore franchi le pas des colles à base de lignine.

 

Bois de la Fayolle près de Clermont-Ferrand, une base du sourcing en gestion jardinée.

© Cabinet Susse

 

Aller à la rencontre des forestiers

 

Le directeur commercial de Bio Création Bois, Benjamin Saint-Mard, est aussi un forestier, qui gère d’ailleurs ses parcelles en futaie irrégulière. Suite à la crise de approvisionnements de l’an passé, Bio Création Bois s’est interrogé sur ses méthodes d’achat et sur ce qui s’interpose à la mise en place d’approvisionnements en circuit court. Clairement, BCB doit ce type de questionnement à ses clients historiques. Mais la démarche, qui semble facile et courante, bute sur des difficultés qui doivent interpeller toute la filière bois.

 

La première interrogation a porté sur la traçabilité du bois via le label PEFC. Selon Benjamin Saint-Mard, ce label ne permet d’assurer la traçabilité du bois qu’à hauteur de 20 à 30%. Par ailleurs, ce label ne permet pas d’assurer que le bois est issu de forêts gérées en coupe irrégulière. Dans un premier temps, BCB a décidé d’aller à la rencontre des forestiers pour développer son propre label. Cette première rencontre avec les propriétaires un peu partout en France a permis de constater la présence de la matière, voire l’existence de bois sous-utilisés. Une réflexion de fond s’est engagée pour comprendre la filière bois et trouver les moyens d’agir.

 

Bois Rivaud près d’Autun, autre source d’approvisionnement en gestion durable jardinée.

© Cabinet Susse

 

Echantillonnage en cours

 

« L’un des obstacles est que deux années s’écoulent entre le repérage d’un arbre sur pied et son exploitation dans un élément d’agencement. Par ailleurs, il faut définir la traçabilité avec le propriétaire, l’exploitant, le scieur, le sécheur… ». Il n’est donc pas question pour l’instant de définir une gamme de produit standard. Pour l’heure, des premiers plots vont alimenter les trois sites d’Ulterïa (dont fait partie BCB) pour des tests. L’enjeu est notamment de tester des essences secondaires et moins employées, notamment face à la flambée du chêne.

 

Tout est à faire, alors que l’on n’est même pas dans la situation de la construction bois, avec ses exigences structurelles, mais « seulement » dans l’agencement. Il faut définir les essences, les épaisseurs, les qualités visuelles et le prix. Par contre, les forêts françaises gérée en futaie irrégulière existent.

 

Régénération naturelle dans une forêt bourguignonne

© Anais Bouchard

 

La futaie irrégulière pour l’agencement

 

BCB s’est donc adjoint l’expertise de Tristan Susse (Cabinet Susses), expert forestier qui connaît bien le milieu de la futaie irrégulière : « La futaie irrégulière existe en France. Mais pour valoriser ces essences secondaires, il lui faut passer par la demande de l’aval. Lorsque j’ai commencé à travailler, l’essence reine était le hêtre, puis le chêne.

 

Le sapin souffre du réchauffement, l’épicéa est appelé à diminuer pour les mêmes raisons, le châtaignier souffre d’une désaffection italienne, et il existe des gisements de charmes, de frêne (quoique malade), d’érables. Il convient de faire le lien entre les essences sous-valorisées et la demande de l’aval ». Par ailleurs, l’attention se porte sur le merisier, essence noble pour l’agencement mais hors marché depuis une dizaine d’années.

 

Agencement de magasin (boutique Faguo) avec des solutions BCB

© BCB

 

Adapter la filière de transformation

 

Selon Anthony Meignen, l’un des problèmes à résoudre se situe au niveau des scieries trop spécialisées. Il faut également établir des normes de qualités pour les essences secondaires. « Tout est à faire », estime Benjamin Saint-Mard qui insiste davantage sur un changement de l’état d’esprit que sur des conséquences commerciales à court terme.

 

Il faut développer de nouveaux cahiers de charges, sans doute intégrer le circuit court par pourcentages à élever graduellement. Jusqu’à un certain point, la réflexion approfondie de BCB lui profite comme acteur historique du bio. Mais au-delà, l’implication de la filière bois sera nécessaire et d’ailleurs, des contacts sont pris avec FIBois Bretagne.

 

Agencement de bureaux (Terrot)

© BCB

 

Un laboratoire pour la construction biosourcée

 

La démarche de BCB est en pleine actualité et interpelle donc sur ce plan, de même que son intérêt vient du constat de la difficulté pratique des choses. Difficile, en effet, de relier aujourd’hui une sylviculture présentée comme plus durable à une offre également plus durable, en aval. Difficile de combiner circuit court et futaie irrégulière en approvisionnement. Difficile, mais pas impossible. Pionnier sur le plan de l’agencement écoresponsable, BCB poursuit son rôle de défricheur et son modèle pourrait stimuler également le monde de la construction biosourcée.

 


Source : batirama.com/Jonas Tophoven
 

L'auteur de cet article

photo auteur Jonas TOPHOVEN
Jonas Tophoven est journaliste de la presse professionnelle de la construction et du bois en France et en Allemagne depuis 30 ans. Le thème qui lui tient particulièrement à cœur est la réduction drastique des émissions de GES dans la construction, première émettrice humaine du monde devant l'agriculture, avec un impact renforcé en France. Il a d'abord travaillé pendant 12 ans sur la construction sèche, puis depuis 15 ans sur la construction bois préfabriquée et il collabore depuis 10 ans à la programmation des quelque 150 conférences annuelles du Forum Bois Construction, congrès des acteurs de la construction biosourcée.
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