Reims : la cathédrale de verre et de béton revoit le jour

Reims : la cathédrale de verre et de béton revoit le jour

Les Halles du Boulingrin à Reims, vont revoir le jour. Ce bâtiment recouvert d’une mince voûte en béton armée réalisée par Eugène Freyssinet a été entièrement restauré et sauvé !




Infiltration d’eau et condensation ont, au fil des ans, détérioré cette gigantesque cathédrale de verre et de béton construite en 1929. Ses dimensions (100 m de long x50 x19m de haut) et ses verrières rappellent, en effet, la grande Dame de Reims. Mais, faute de maintenance et d’entretien, elle devient insalubre dans les années 60.

 

Classées in extremis Monuments historique en 1990 alors que sa destruction avait été envisagée, les halles vont revivre après plus de 4 ans d’études et de travaux. A l’origine, sa construction est le fruit d’une étroite et rare collaboration entre un architecte, Eugène Maigrot et un ingénieur célèbre, Eugène Freyssinet.

 

Une prouesse technique

 

Cet ingénieur audacieux couvre les halles d’une mince voûte en béton armé de 7cm d’épaisseur sur des poteaux béton cintrés. Avantage : ces voûtes minces permettent de dégager un très grand espace, sans aucun poteau : une véritable prouesse technique à l’époque.

 

Le dernier avatar sera la voûte du CNIT à Paris, demeuré pendant longtemps la plus grande surface sans poteau existante au monde.

 

Ce projet architectural et technique a dû respecter un cahier des charges précis pour sa restauration auquel se sont ajoutées des contraintes réglementaires contemporaines : sécurité, accessibilité aux personnes handicapées, confort lumineux, acoustique.

 

Tout d’abord, le projet vise à restaurer l’architecture originelle des lieux, avec trois zones bien délimitées : à l’ouest, les étals historiques en faïence, au centre la zone dite du Carreau, et à l’est, la zone de Gros, surélevée.

 

L’ancien sous-sol se transforme en vide sanitaire

 

De la même façon, François Chatillon, architecte en chef des Monuments historiques, s’est attaché à retrouver les matériaux et les couleurs employés à l’époque : béton, verre jaune et blanc, imposantes grilles vertes (déposées, décapées et repeintes).

 

Seule modification de taille, pour des raisons techniques : l’ancien sous-sol qui servait de lieu de stockage a été reconverti en vide sanitaire sous toute la surface du rez-de-chaussée, après reconstruction et renforcement total du plancher.


Dès le mois de septembre, les Halles du Boulingrin retrouveront leur vocation de marché, dans un quartier rénové grâce à d’importants travaux de voierie en cours (rues piétonnes). Les anciennes boutiques de la façade sud ont été remplacées par deux halles commerciales dont les façades en VEA apportent un air de jeunesse à l’édifice.

 

Enfin, dans les mêmes lieux, des expositions et évènements culturels et sportifs seront organisés.




 

 

  1. Inhibiteur de corrosion

« Nous avons utilisé deux techniques pour restaurer et protéger le béton, explique Alexandre Murienne, assistant de François Chatillon, architecte en chef des Monuments historiques. En zones courantes (rez-de-chaussée, galeries extérieures et murs périphériques), un inhibiteur de corrosion a été pulvérisé sur les fers apparents, après enlèvement du béton dégradé. Un mortier de réparation a ensuite permis de restaurer le béton.

 

 

  1. Protection cathodique

Sur les murs périphériques du sous-sol (ici photo du vide-sanitaire), une autre technique a été employée : ces murs épais de 15 cm d’épaisseur, en contact avec la terre, ont reçu une protection cathodique. Explication : une fois les murs percés, les treillis soudés du béton sont reliés avec des anodes afin de créer un effet “masse”. Un courant continu est ainsi diffusé dans les parois permettant de repousser l’humidité.

 

 

  1. Fenêtres élégantes en verre jaune

Des techniques très pointues ont été utilisées pour la restauration du béton et pour la création de nouvelles fenêtres, avec des bétons dits de composites ciment verre ou CCV. Ce micro-béton, riche en ciment (rapport sable/ciment=1), contient des fibres de verre (diamètre des filaments de 10 à 30 μm). Objectif : rendre toute la finesse du projet initial de Freyssinet, notamment pour les meneaux des fenêtres.

 

 

  1. Vitrage jaune armé

Quant au vitrage utilisé sur la verrière, il a fait l’objet de recherches approfondies dans les archives municipales ! Ambition : retrouver la teinte jaune d’origine fabriquée à l’époque par Saint-Gobain. Une mission accomplie qui a permis de reconstituer à l’identique 900 m2 de vitrage (coulé en Pologne) armé avec une maille d’un demi-pouce (voir photo ci-dessus).




 

 

  1. Etals en faïence et mosaïque Art Déco

Un travail minutieux a été fait sur la restauration des étals fixes en faïence du marché, ceux du boucher, du charcutier, du poissonnier, etc. Ces éléments de style Art Déco, mis en valeur par la grande horloge, ont été restaurés pour retrouver l’ambiance des lieux. «On n’a pas utilisé de la faïence blanc sanitaire» précise Alexandre Murienne. «On a conservé la mosaïque en bon état ainsi que certains éléments légèrement fissurés». Le fournisseur d’origine, les Céramiques du Beaujolais, a complété le puzzle en contretypant faïences et carrelage.

 

 

  1. Et la lumière fut

Enfin, les Halles ont bénéficié d’un important travail sur la lumière. Objectif : une mise en valeur lumineuse du bâtiment grâce à la restauration de la verrière mais aussi grâce à la création de puits de lumières sur les terrasses inaccessibles et la réalisation de faux plafonds. Il faut l’avouer, le pari est réussi : l’atmosphère créée par la verrière et les voutes cintrées au dessus des étals, comme des autels d’offrandes profanes, évoquent l’ambiance recueillie et bienveillante d’un Temple… de marchands.

 

 

Un peu d’histoire

 

 

A l’origine, les halles doivent intégrer un projet de raccordement au chemin de fer, comprendre des aménagements destinés à la vente en gros, au détail et à la criée, un espace réservé à la boucherie et un autre à la poissonnerie. L’eau doit être abondante et facilement utilisable.

Les 4 et 5 mai 1923, c’est le projet d’Emile Maigrot qui s’impose de par son concept architectural : une simple construction en béton armé sur arc parabolique doté d’une couverture. Avec le retour de la guerre, en juin 1940, les verrières, détruites, sont remplacées par un verre triple épaisseur de Saint-Gobain.

Si ce matériau assure une meilleure isolation, il transfère aussi la condensation sur les voûtes et entame leur dégradation, provoquant la carbonatation du béton. Fin 1959, un treillis métallique est mis en place pour recueillir les morceaux de béton qui se détachent de la voûte.

 

Depuis, aucune réparation d’envergure n’est effectuée et il faudra attendre le projet actuel de restauration des Halles. Source : Ville de Reims.

 

 

Fiche chantier

 

 

  • Coût de l’opération : 31 617 521 € TTC intégrant un partage de la maîtrise d’ouvrage et du financement entre la Ville de Reims et l’Etat.
  • Entreprises : 19 lots et 47 entreprises, 60 compagnons sur le chantier

 

 

Source : batirama.com / Fabienne Leroy

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