Le Bâtiment passif : bois, matériaux biosourcés mais pas uniquement

Le Bâtiment passif : bois, matériaux biosourcés mais pas uniquement

Le bâtiment passif obéit à trois règles incontournables dont une parfaite étanchéité à l’air. Il concerne la construction neuve mais aussi la rénovation.




Photo : Renovation passive à Saint-Etienne, d'une ancienne centrale électrique de Manufrance ©Pascal Poggi

 

« Retour vers le futur des bâtiments passifs », une visioconférence rassemblant 165 participants, sous l’égide de la Capeb Rhône et de ses co-organisateurs*, tord le cou aux idées reçues et illustre le propos par des exemples de bâtiments passifs instrumentés.

 

Depuis 30 ans, le principe constructif passif est validé et de nombreuses constructions répondant à ses critères sont sorties de terre. Non seulement en Allemagne, où est né le label de performance énergétique des bâtiments Passiv Haus, mais un peu partout dans le monde, notamment ces trois dernières années.

 

En France, début juin, on comptait 323 bâtiments ayant obtenu le label Bâtiment passif (version française, délivrée par l’association La Maison Passive) et bon nombre d’autres non labellisés.

 

 

Ces bâtiments labellisés Bâtiment Passif Classique, Plus ou Premium par le BET Heliasol obéissent à trois règles incontournables : être très bien isolé, sans ponts thermiques ou presque, et être « vraiment » étanche à l’air.

 

Les points clés d’un bâtiment passif

 

Franck Janin, du bureau d’études thermiques Heliasol (17 bâtiments certifiés et une trentaine d’autres en attente de labellisation), rappelle que tout type de bâtiments est susceptible d’obtenir la certification, dans le neuf comme en rénovation lourde.

 

 « Depuis 1990, des méthodes pour construire des bâtiments très peu énergivores sont au point, mais elles ne sont toujours pas mises en œuvre dans les réglementations. Pour des constructions qui durent 50 ou 100 ans, la réglementation devrait n’être qu’un garde-fou, pas une norme à atteindre, car elle est vite dépassée. »

 

Le spécialiste rappelle les critères de cette méthode passive, exclusivement basée sur la physique du bâtiment :

 

  • Un besoin de chauffage inférieur à 15 kWh d’énergie utile par m² de surface de référence énergétique et par an. Cela correspond à un besoin de puissance de chauffage de 10 kW/m2 le jour le plus froid (3 fois plus exigeant qu’une maison RT 2012).

 

  • Une consommation totale en énergie primaire (tous usages inclus) inférieure à 120 kWh par m² de surface de référence énergétique par an.

 

  • Une perméabilité à l’air de l’enveloppe, mesurée sous 50 Pascals de différence de pression, inférieure ou égale à 0,6 volume par heure ; soit 3 à 4 fois plus ambitieuse que la RT 2012.

 

  • Et une fréquence de surchauffe intérieure (> à 25°C) inférieure à 10 % des heures de l’année.

 

Un chauffage, oui, mais en appoint

 

Les apports solaires et les apports internes (habitants, équipements et éclairage) sont suffisants pour chauffer le bâtiment qui respecte ces critères, sauf froid exceptionnel. Bien entendu, le mode constructif doit être adapté aux exigences du lieu choisi, notamment à son climat.

 

 « Prévoir un moyen de chauffage est nécessaire dans un bâtiment passif, mais uniquement en appoint. Il sera le 2e ou 3e poste de consommation, alors qu’il reste le 1er dans un BBC », précise Franck Janin.

 

« Par définition, le bâtiment passif est celui qui pourrait être chauffé en réchauffant l’air en sortie d’une ventilation au débit hygiénique, sans surventiler. La consommation de chauffage sera de 15 kWh/(m2.an) ; soit de 150 L/an de fioul pour 100 m2, par exemple. »

 

L’énergie primaire renouvelable, un pari sur l’avenir

 

La notion d’énergie primaire utilisée dans la RT fait référence à des énergies fossiles disponibles en permanence. Elle ne tient compte ni des cycles jour-nuit, été-hiver, ni de la distance à la production, ni du stockage de l’énergie. De ce fait, elle n’est pas adaptée à la construction passive.

 

Les énergies renouvelables entrant en ligne de compte dans les calculs d’un bâtiment passif, c’est plutôt la notion d’énergie primaire renouvelable (Ep-R) qui doit être utilisée : on se réfère donc à une consommation CEp-R inférieure à 60 kWh/(m2.an), plutôt qu’à une consommation en énergie primaire Cep, électricité spécifique comprise, inférieure à 120 kWh/(m2.an).

 

Né avec les classes Plus et Premium du label, le facteur Ep-R anticipe l’après-transition énergétique, quand les besoins en énergie seront couverts par des énergies renouvelables locales (par exemple, 50 % en 2050).

 

Il est calculé selon l’endroit et le moment où l’énergie est utilisée : pour une énergie produite sur place et consommée immédiatement, il faut produire 1,1 kWh d’Ep-R pour obtenir 1 kWh utile. Si elle est produite à distance et stockée, le facteur augmente pour tenir compte des pertes de charge, il sera par exemple de 1,7 kWh d’Ep-R.

 

 

Simple garantie, le label Bâtiment Passif n’impose rien, si ce n’est une obligation de résultat. L’architecture influe sur le coût constructif : celui-ci augmente pour des formes moins compactes que le cube.

 

Bâtiment passif : bois, matériaux biosourcés mais pas uniquement

 

Un bâtiment passif n’utilise pas forcément des matériaux bio ou géo-sourcés. Cependant, les deux démarches vont souvent de pair : 141 des 323 constructions labellisées sont en structure bois et matériaux biosourcés, 60 utilisent un mix bois-béton et 10 sont en paille, généralement associée au bois et à la terre.

 

Si la forme architecturale la plus efficace est le cube, la liberté de conception est totale. L’important étant d’être adapté au climat local, sans aucune valeur minimale à respecter.

 

Quant au surcoût, il est loin d’être systématique : par exemple, par rapport à une construction RT 2012, il sera de 16 000 € pour 100-120 m2 avec VMC double flux, triple vitrage, isolants et une étanchéité forte (le puits canadien est tout à fait optionnel). Mais globalement, cette construction passive revient moins cher car elle permet de gagner sur l’équipement, sur les abonnements et sur les coûts d’entretien qui y sont liés. Et, dans une moindre mesure, elle permet d’économiser sur la consommation énergétique.

 

 

Le confort d’été est assuré à condition que les usagers aient les bons réflexes (schéma F. Janin).

 

Pas de surchauffe estivale avec les bâtiments passifs

 

Côté confort d’été, la maison passive est gagnante : elle limite drastiquement les entrées de flux de chaleur (en adoptant les bons gestes, comme fermer les volets !). Et la chaleur accumulée par les apports internes et la faible chaleur entrée pendant la journée sont évacuées par aération nocturne.

 

La climatisation n’est pas exclue, mais les besoins en froid doivent être faibles pour rester à moins de 15 kWh. Elle peut même être conseillée dans le tertiaire, tandis que, jusqu’à présent, l’habitat s’en passe très bien (hors ilot de chaleur).

 

Certaines régions d’Allemagne, de Belgique, d’Autriche, et le Luxembourg ont rendu obligatoire le bâtiment passif depuis plusieurs années, pour respecter la directive européenne NZEB, applicable fin 2020 dans le neuf  (Nearly zero-energy buildings). La RE 2020 atteindra-t-elle cet objectif ?

 

 

Comportement de la première Maison Passive Premium labellisée en France, lors d’une semaine de forte chaleur en climat méditerranéen (Ideatectum architecte).

 

* Les 5 A 7 de l’éco-construction pour les pros du bâtiment du Rhône sont disponibles en rediffusion sur le site ecoconstruction-rhone.fr

Les autres co-organisateurs : Agence locale de l’énergie et du climat de la Métropole de Lyon, Agence Qualité Construction, BTP Rhône et Métropole, Chambre des Métiers et l’Artisanat du Rhône, Direction Départementale des Territoires, Fibois Rhône, Hespul, Agence Locale de la Transition Énergétique du Rhône.


Source : batirama.com/ Emmanuelle Jeanson

L'auteur de cet article

photo auteur Emmanuelle JEANSON
Collaboratrice de longue date de Batirama, elle est journaliste indépendante dans la presse pro du bâtiment et de l’énergie depuis ses débuts dans le métier (qui remontent à la dernière décennie du siècle dernier !). Ses sujets de prédilection : tout ce qui contribue à une construction plus soutenable ; les techniques anciennes remises au goût du jour ; les énergies renouvelables ; aller à la rencontre des artisans et de leur quotidien, mais aussi comprendre les enjeux de l’activité industrielle.
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