Le nouveau régime des aides publiques pour la rénovation énergétique en 2020

Le nouveau régime des aides publiques pour la rénovation énergétique en 2020

La Loi de Finances 2020 introduit un nouveau régime des aides pour la rénovation énergétique, encore complexe, malgré la volonté de simplification du gouvernement.




Le CITE ne disparaît pas en 2020, il demeure accessible de plusieurs manières cette année et s’effacera lentement à partir de 2021. Une prime ou plutôt deux primes, mais une seule accessible en réalité, pour l’instant, enfin peut-être, sont créées pour peu à peu remplacer le CITE.

 

Une seule chose demeure parfaitement claire : toutes les aides publiques à la rénovation sont réservées aux logements achevés depuis plus de deux ans. Ouf, un point acquis. Pour le reste, il faut lire attentivement des textes divers, dont la loi de finances 2020, le Code Général des Impôts et des textes publiés par l’ANAH. Voici un résumé cohérent – en tout cas, nous l’espérons – des nouvelles dispositions en vigueur depuis le 2 janvier 2020.

 

Le CITE demeure bien présent

 

Pour comprendre, il faut clarifier les périodes de travaux en cause. Un crédit d’impôt s’étale sur cinq ans à partir de la formulation de la demande et les lois de finances successives ont élargi la période durant laquelle les ménages pouvaient formuler une demande de crédit d’impôt pour certains types de travaux.

 

Le CITE – premièrement - reste donc en application pour certains travaux engagés avant le 31 décembre 2019 et sur des périodes qui, selon la nature des travaux, peuvent avoir commencé dès 2005 (acquisition et pose d’équipements de chauffage et de production d’ECS à base d’ENR, …), … voire en 2012 (micro-cogénération d’une puissance de production d’électricité ≤ 3 kVA/logement, par exemple).

 

Ils peuvent enfin avoir commencé en 2014 (acquisition d’un système de charge d’un véhicule électrique), en 2016 (audit énergétique – sauf s’il était obligatoire – comprenant des propositions de travaux dont une au moins permet d’atteindre un très haut niveau de performance énergétique) ou depuis le 1er janvier 2019 (dépose d’une cuve à fioul).

 

Tout cela est exposé dans la nouvelle rédaction de l’article 200 quater du Code Général des Impôts (version en vigueur au 6 janvier 2020) qui explique en détail les modalités du CITE (Crédit d’Impôt pour la Transition Energétique) qui continuent de s’appliquer. Du coup, le CITE existe encore de cette première manière, tant que tous les dossiers commencés sous son régime ne sont pas purgés.

 

CITE résiduel et CITE forfaitaire

 

Deuxièmement, le nouvel article 1761 bis (le bis est important) du Code Général des Impôts, créé par l’Article 15 de la loi de finances 2020, indique qu’une prime de transition énergétique est désormais instituée pour tous les travaux à venir. Mais, les potentiels bénéficiaires de la prime, si leurs travaux ont été commandés avant le 31 décembre 2019 (acceptation d’un devis + versement d’un acompte) et continuent en 2020, peuvent pour les dépenses effectuées entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020, demander aux Pouvoirs Publics de bénéficier malgré tout du CITE, plutôt que de la prime. Ils ne peuvent pas cumuler les deux, tout de même.

 

Troisièmement, en 2020, les ménages qui n’ont pas droit à la nouvelle prime parce qu’ils n’entrent pas dans les conditions de ressources qui lui sont attachées, peuvent toujours bénéficier du CITE. Le Gouvernement appelle ça le « CITE résiduel ».

 

Quatrièmement, de plus, un CITE forfaitaire de 300 € est maintenu pour les bornes de recharge électrique pour tous les propriétaires occupants. En janvier 2021, le CITE résiduel devrait disparaître, tandis que le CITE pour les bornes de charge sera maintenu. Voilà, ça c’était le CITE : simple et clair pour tout le monde ?

 

La prime de transition énergétique

 

Ensuite, la nouvelle « prime de transition énergétique » créée par la Loi de finances 2020 est en réalité inaccessible. Destinée à financer, sous conditions de ressources, des travaux et dépenses en faveur de la rénovation énergétique des logements, elle ne sera versée à personne sous cette forme mais sera seulement accessible fondue dans MaPrimeRénov’ pilotée par l’ANAH et dont la loi de finances ne fait pas mention.

 

La loi de finances explique que les caractéristiques et conditions d’octroi de la « prime de transition énergétique » ne peuvent être moins favorables pour le bénéficiaire que celles régissant le crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater du code général des impôts dans sa rédaction résultant de la loi de finances 2020. Mais ça n’a aucune importance, puisque que personne ne bénéficiera de cette prime, hormis à travers le mécanisme MaPrimeRénov’ de l’ANAH qui en modifie assez largement les caractéristiques.

 

Toujours selon article 1761 bis du Code Général des Impôts, la prime de transition énergétique est attribuée pour le compte de l’Etat par « l’agence mentionnée à l’article L. 321-1 du code de la construction et de l’habitation ». Vite, allons voir de quelle agence il s’agit : surprise, c’est l’ANAH ou Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat.  Du coup le rôle de l’ANAH et les missions qui lui sont imparties sont nettement accrus.

 

Dans un délai de trois mois – d’ici fin mars, donc -, précise l’art. 15 de la loi de finances 2020, « le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur l’opportunité d’élargir la prime de transition énergétique aux propriétaires bailleurs pour lutter contre la location des passoires énergétiques ». Pourtant, le résultat semble acquis dès à présent, puisque un texte de l’ANAH explique que MaPrimeRénov’ sera accessible aux propriétaires bailleurs en 2021.

 

Bref, la nouvelle loi de finances 2020 institue une prime à la place du CITE, mais pas tout à fait puisque le CITE perdure en 2020 au moins de quatre manières différentes et qu’il est prévu qu’un petit bout de CITE dure encore en 2021 voire au-delà pour la pose d’une prise d’alimentation pour véhicules électriques.

 

Reste à comprendre les modalités de cette nouvelle prime : quelles conditions de ressources, quels travaux, quels montants, quand et comment est-elle versée ?

 

De la « prime de transition énergétique » à MaPrimeRénov’

 

Tout d’abord, l’ANAH, chargée de gérer la nouvelle prime pour la transition énergétique, l’a fusionnée avec les aides prévues par son programme « Habiter Mieux Agilité » pour créer le surensemble MaPrimeRénov’. Il n’est pas possible d’accéder seulement à la « prime pour la transition énergétique ». Seul le guichet MaPrimeRénov’ est ouvert.

 

L’ANAH indique que MaPrimeRénov’ s’adresse en 2020 aux propriétaires occupant leur logement. Ce qui est restreint par rapport au CITE, accessible aux propriétaires occupants, mais aussi aux locataires et aux occupants à titre gratuit pour leur résidence principale, si le logement est achevé depuis plus de deux ans. Selon l’ANAH, MaPrimeRénov’ sera élargie à l’ensemble des propriétaires occupants, propriétaires bailleurs et syndicats de copropriété dès janvier 2021.

 

Ensuite, la loi de finances 2020 investit l’ANAH de pouvoirs étendus et la charge de la police du nouveau système. L’ANAH pourra en effet « habiliter des mandataires » dont le rôle consistera à proposer aux bénéficiaires un accès simplifié à cette nouvelle prime. Ouf, tous les signataires des programmes coup de pouce isolation et coup de pouce chauffage pourront être rattrapés en devenant mandataire de l’ANAH.

 

Si l’ANAH découvre des irrégularités, elle pourra prononcer des sanctions pécuniaires contre les mandataires (max 4% de leur CA HT lors du dernier exercice, 6% en cas de manquement répété) ou contre les personnes physiques bénéficiaires (max 50% du montant de la prime) et peut écarter mandataire et bénéficiaire du système pendant 5 ans.

 

Le « reste à charge » n’est plus nul, mais finançable

 

L’ANAH a publié une série de tableaux montrant les travaux finançables et les montants de primes associés. Mais deux éléments sont évidents.

 

Tout d’abord, la nouvelle solution ne s’adresse qu’aux ménages très modestes (plafond de ressources annuelles de 20 593 € pour une personne à 48 488 € pour 5 personnes, en Île-de-France + 6 096 € par personne supplémentaire, 14 879 €/1 à 30 572€/5 + 4412€/personne supplémentaire dans les autres régions) ou modestes (25 068 €/1 à 59 026 €/5 + 7422 €/personne supplémentaire en IdF, 19074 €/1 à 44 860€/5 +5651€/ personne supplémentaire dans les autres régions). Au-delà de ces plafonds de ressources, les ménages sont exclus du nouveau dispositif. Mais en 2020, ils peuvent toujours bénéficier du CITE.

 

Deuxièmement, MaPrimeRénov’ ne permet plus de financer la totalité des travaux (fourniture + pose). En effet, le montant cumulé des primes CEE et des aides d’Action Logement de l’ANAH ne dépasse pas 90% de la dépense éligible pour les ménages aux revenus très modestes, 75% pour les ménages aux revenus modestes. Le montant de primes CEE perçues par le ménage et déclaré à l’ANAH sera justifié par la transmission à l’ANAH du « cadre de contribution CEE ». Les Pouvoirs Publics et l’ANAH appellent ça l’écrêtement.

 

L’ANAH indique que le reste à charge peut être financé par un prêt ecoPTZ à taux zéro et/ou par des aides locales. De plus, les montants des dépenses éligibles sont plafonnés.

 

Le tableau global du dispositif MaPrimeRénov’ individuel

Gestes éligibles en 2020

Montants des dépenses plafonnés

MaPrimeRénov’ pour ménages très modestes

MaPrimeRénov’ pour ménages modestes

PAC géothermique, capteurs horizontaux et verticaux

18 000 €

10 000 €

8 000 €

Chaudière à granulés (régulation ≥ Classe IV, silo stockage ≥ 225 l)

18 000 €

10 000 €

8 000 €

Chauffage solaire combiné, dont l’appoint

16 000 €

8 000 €

6 500 €

Chaudière à bûches (régulation ≥ Classe IV, ballon tampon neuf ou existant)

16 000 €

8 000 €

6 500 €

PAC air/eau

12 000 €

4 000 €

3 000 €

Chauffe-eau solaire individuel, dont l’appoint

7 000 €

4 000 €

3 000 €

Ventilation double flux

6 000 €

4 000 €

3 000 €

Poêle ou cuisinière à granulés (≥ Flamme Verte niveau 7* ou équivalent)

5 000 €

3 000 €

2 500 €

Poêle ou cuisinière à bûches (≥ Flamme Verte niveau 7* ou équivalent)

4 000 €

2 500 €

2 000 €

Partie thermique d’un équipement PVT eau (solaire photovoltaïque et thermique)

4 000 €

2 500 €

2 000 €

Foyer fermé, insert à bûches ou à granulés (≥ Flamme Verte niveau 7* ou équivalent)

4 000 €

2 000 €

1 200 €

Chaudière gaz à très haute performance énergétique (pour les bâtiments non-raccordés à un réseau de chaleur vertueux aidé par l’ADEME)

4 000 €

1 200 €

800 €

Raccordement à un réseau de chaleur et/ou de froid

1 800 €

1 200 €

800 €

Chauffe-eau thermodynamique

3 500 €

1 200 €

800 €

Dépose de cuve à fioul

1 200 €

1 200 €

800 €

Audit énergétique

800 €

500 €

400 €

Isolation des murs par l’extérieur

150 €/m²

100 €/m²

75 €/m²

Toitures terrasse

180 €/m²

100 €/m²

75 €/m²

Isolation thermique des parois vitrées (en remplacement du simple vitrage)

500 €/m²

100 €/équipement

80 €/équipement

Isolation en rampants de toiture, isolation de plafonds de combles

75 €/m²

25 €/m²

20 €/m²

Isolation des murs par l’intérieur

70 €/m²

25 €/m²

20 €/m²

Outre-mer seulement, protection des parois vitrées ou opaques contre les rayonnements solaires

200 €/m²

25 €/m²

20 €/m²

Borne de recharge électrique

1 000 €

-

-

 

 

Dans le cas des immeubles collectifs, MaPrimeRénov’ finance des travaux collectifs

,

Il s'agit des travaux en parties communes ou des travaux d’intérêt général en parties privatives. Le dispositif MaPrimeRénov’ ne prévoit pas de montants de dépenses plafonnés pour les travaux en immeubles collectifs.

 

Ménages aux ressources très modestes

Ménages aux ressources modestes

PAC géothermique, capteurs horizontaux et verticaux

3 000 €/logement

2 000 €/logement

Chaudière à granulés ou à bûches (régulation ≥ Classe IV)

3 000 €/logement

2 000 €/logement

PAC air/eau

3 000 €/logement

2 000 €/logement

Ventilation double flux

3 000 €/logement

2 000 €/logement

Chauffe-eau solaire collectif

1 000 €/logement

750 €/logement

Chaudière gaz à très haute performance énergétique (pour les bâtiments non-raccordés à un réseau de chaleur vertueux aidé par l’ADEME)

400 €/logement

300 €/logement

Raccordement à un réseau de chaleur et/ou de froid

400 €/logement

300 €/logement

Chauffe-eau thermodynamique

400 €/logement

300 €/logement

Dépose de cuve à fioul

400 €/logement

300 €/logement

Audit énergétique

250 €/logement

200 €/logement

Isolation des murs par l’extérieur

100 €/logement

75 €/logement

Toitures terrasses

100 €/logement

75 €/logement

Isolation en rampants de toiture, isolation de plafonds de combles

25 €/logement

20 €/logement

Isolation des murs par l’intérieur

25 €/logement

20 €/logement

Outre-mer seulement, protection des parois vitrées ou opaques contre les rayonnements solaires

25 €/logement

20 €/logement

 

MaPrimeRénov’ : un site internet

 

Le mécanisme MaPrimeRénov’ bénéficie de son propre site internet  Il renvoie notamment à l’outil Simul’Aid€s, géré par le site Faire.

 

MaPrimeRénov’ requiert l’intervention d’entreprises RGE et même de sous-traitants RGE également. Le cumul de primes MaPrimeRénov’ ne peut pas dépasser 20 000 € par logement sur une période de 5 ans. MaPrimeRénov’ est versée par l’ANAH en fin de travaux. Mais, il est possible de demander une avance.

 

L’ANAH précise « En régime de croisière, les délais d’instruction sont de 15 jours pour une demande de prime (notification du droit à subvention), une demande d’avance (versement de l’avance), une demande de solde (versement du solde). Les aides pour les dossiers déposés en début d’année (janvier à mars) seront versées à compter d’avril et impliqueront donc un temps d’attente plus long (jusqu’à 3 mois) ».

 

A partir de Mai 2020, il devrait être possible de déposer une demande par l’intermédiaire d’un mandataire. La liste des mandataires retenus par l’ANAH n’est pas encore connue.

 

Voilà, c’est le nouveau dispositif CITE + MaPrimeRénov’. Le précédent dispositif, le programme Coup de Pouce Chauffage, introduit en janvier 2019 a été interrompu dès fin septembre 2019 et n’aura même pas tenu 9 mois. Ce qui est un record de brièveté. Il faut souhaiter que celui-ci soit plus durable. Les changements constants du régime des aides publiques à la rénovation énergétique sont l’une des causes importantes de son rythme nettement trop lent.

 


Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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