La biodiversité, un atout pour gérer les risques dans la ville

La biodiversité, un atout pour gérer les risques dans la ville

Comment composer un territoire en phase avec les phénomènes naturels, la faune et la flore ? Voici quelques exemples concrets d’une gestion des risques sur les chantiers qui tient compte de la biodiversité.




Intégrer la biodiversité à la gestion des risques en milieu urbain : le thème choisi pour les 22ème rencontres du Club "Urbanisme, bâti et biodiversité" (U2B*), à Paris est d’actualité, à une époque où les incendies dévastent d’immenses espaces urbanisés, comme en Californie ou en Australie…

 

Où les inondations reviennent régulièrement, notamment dans le sud de la France. Où des espèces exotiques, végétales ou animales, envahissent nos territoires… Et où parallèlement, l’on prend conscience des déséquilibres majeurs que l’activité humaine engendre dans les écosystèmes urbains et péri-urbains.

 

Comment aménager et organiser nos villes pour gérer les risques, qu’ils soient sanitaires ou naturels ? Enrichir la biodiversité et la préserver peut-il contribuer à protéger l'espace urbain ? La lutte biologique peut-elle contrer les risques sanitaires ?

 

Parmi les nombreux échanges de la journée, trois sujets concernent directement les entreprises qui interviennent sur les chantiers de construction : La prévention de l’apparition de l’ambroisie, plante extrêmement allergène qui prolifère depuis des années en France.

 

Les mesures à prendre  pour limiter la progression du moustique-tigre, apparu récemment dans l’Hexagone mais qui colonisait déjà 42 départements en 2018 (sans compter ceux où il est déclaré comme « observé sporadiquement »). La capacité des sols à conserver leur infiltrabilité, alors que leur structure est perturbée par des terrassements.

 

 

La noue paysagère permet d’intégrer la gestion de l’eau dans l’espace urbain. La densité de vers de terre dépend de l’âge de l’ouvrage ; il faut au moins 2 ans avant de constater un début de recolonisation.

 

L’ambroisie, plaie des terrains dénudés

 

Décrétée espèce nuisible à la santé humaine depuis 2017, l’ambroisie est apparue vers 1870 en France. Hautement allergène, son pollen provoque des asthmes décalées dans le temps (avec un pic entre août et septembre-octobre). En 2017, le coût pour la santé a été évalué à plus de 40 millions d’euros rien qu’en Rhône-Alpes où la plante est très implantée.

 

« Trois espèces d’ambroisie sont référencées comme exotiques et envahissantes, plus une, qui est locale ; elles sont vivaces ou annuelles selon les cas, » commente Muriel Botton, Directrice du cabinet Evinerude, un bureau d’étude lyonnais spécialisé qui accompagne collectivités locales et entreprises.

 

« Souvent on se contente de faucher la plante au moment de la floraison, or cela ne résout pas le problème de la grainaison. »  L’ambroisie continue donc de faire des dégâts sur les systèmes respiratoires les plus fragiles. Elle adore les sols mis à nu par l’action de l’Homme, parcelles agricoles, bords de route, chantiers. Mais peu compétitive, elle disparaît rapidement au profit d’autres espèces pionnières.

 

 « Le diagnostic est une phase indispensable afin d’établir un plan de gestion adapté. On choisit les moyens de lutte en fonction du type de terrain et de la densité de la plante ; il n’y a pas de solution toute faite qui soit efficace ». Evinerude forme les maîtres d’ouvrage pour les rendre autonomes dans leur gestion et préconise la mutualisation des moyens de lutte.

 

Fauchage, traitements thermiques, …, mais pour lutter sur le long terme, rien ne vaut la végétalisation. Par exemple, sur un chantier, préserver le couvert végétal existant autant que possible ; et sinon, semer au plus tôt un ray-grass qui va rapidement couvrir le sol, en attendant que l’espace soit paysagé (ou au pire, déposer un géotextile avant que la graine ne monte). Pour restaurer la biodiversité, les associations locales, qui connaissent bien le milieu, sont des alliés précieux et facilement identifiables.

 

 

L'ambroisie : fauchage, traitements thermiques, …, mais pour lutter sur le long terme, rien ne vaut la végétalisation

 

Un chantier sans eau stagnante

 

Le moustique-tigre (Aedes albopictus) a colonisé 5 continents en moins de 20 ans. Il progresse vers le Nord de la France et couvrira à court terme une grande partie du territoire. Sa piqûre est bénigne, mais ce petit insecte peut transmettre la dengue, le chikungunya ou le zika, s’il a au préalable piqué une personne infectée.

 

Contrairement au moustique commun, le moustique-tigre pique tout au long de la journée et plutôt sur le bas du corps car il ne vole pas haut. Il est important d’apprendre à le reconnaître pour le repérer (deux fois plus petit, rayé noir et blanc).

 

Le moustique-tigre établit le plus souvent ses quartiers chez des particuliers ou sur un chantier, dans de petites réserves d’eaux stagnantes. Une fois installé, il est très difficile à déloger…

 

Benoît Viseux, Responsable de projet Médiation Faune Sauvage à la LPO, précise : « Il n’existe pas d’insecticide sélectif. La solution est de nettoyer une fois par semaine le moindre petit récipient pouvant contenir de l’eau stagnante, afin d’interrompre le cycle de développement de l’insecte ; en prenant soin de curer les parois verticales, où s’accrochent les œufs (les larves, elles, se développent dans l’eau). Et couvrir les réservoirs d’eau avec un voile moustiquaire ou un simple tissu. » Il détaille dans une fiche-outil les bonnes pratiques et les points clés pour limiter l’expansion du moustique-tigre**.

 

 

Inutile de combler mares et étangs, qui ne sont pas des zones de prédilection pour le moustique-tigre mais sont au contraire très utiles pour maintenir les prédateurs des larves de moustiques ! 

 

Des vers de terre pour des sols bien absorbants

 

Dans les villes, le cycle naturel de l’eau est fortement perturbé. Nombre de collectivités testent de nouveaux systèmes pour limiter les bouleversements engendrés par l’imperméabilisation des sols et le manque d’espaces verts. Réintégrer de la végétation (par le biais de toits végétalisés, noues, parkings enherbés, etc.), faire ré-émerger un cours d’eau enterré, sont des exemples d'actions pour se protéger des inondations et de la chaleur.

 

« Les chantiers sont un véritable traumatisme pour la structure et la vie des sols, » explique Patricia Letainturier, Chargée de développement chez Infraservices, un bureau d’études VRD et hydraulique, qui pratique des techniques alternatives de gestion intégrée des eaux pluviales.

 

« Par exemple, dans une noue, le sol tassé ne permet plus la pénétration des eaux de pluie. Nos tests en laboratoire montrent que par leur activité, les lombrics améliorent significativement la capacité d’infiltration du sol. Nous vérifions par des tests in situ actuellement en cours l’efficacité d’une recolonisation du sol avec des vers de terre ; ils sont capables de s’adapter à de nouvelles conditions écologiques.»

 

Une fois de plus, il est préférable de prévenir plutôt qu’essayer de réparer les dégâts ; un terrassement bien étudié et mené avec discernement limitera le bouleversement des strates de sol. L’idéal est de conserver la terre végétale sans mélanger les strates, afin de pouvoir la remettre une fois les aménagements achevés. Que de temps gagné ensuite, pour la gestion de l’eau !

 

Là encore, l’information et la formation des acteurs de la construction sont primordiales pour qu’ils prennent conscience qu’ils peuvent eux aussi participer à préserver une biodiversité qui est plus que jamais au cœur des enjeux de demain.

 

Pour gérer au mieux toutes les questions liées à la biodiversité sur le chantier, en lien avec le maître d’ouvrage et l’architecte, nommer un référent biodiversité permet d’optimiser la vigilance des points clés et la sensibilisation des équipes, voire de courtes formations.

 

 

Ce test, mené en laboratoire par Infraservices, indique que plus la pluie est dense, plus le rôle des vers de terre est important sur la perméabilité du sol.

 

* créé en septembre 2013 par la Ligue Protectrice des Oiseaux (LPO), U2B est un espace de réflexion et d’échanges qui rassemble des acteurs publics et privés de l’urbanisme et du bâtiment. Au programme : les questions, résultats et progrès de chacun concernant la biodiversité dans l’urbanisme et le bâtiment. Faisabilité d’approches nouvelles, réalisation d’opérations exemplaires.

 

** disponible fin janvier sur le site urbanisme-bati-



Source : batirama.com / Emmanuelle Jeanson

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