Trés forte réduction d’activité prévue dans le logement social en 2018

Trés forte réduction d’activité prévue dans le logement social en 2018

La réduction des APL et l’instauration d’une « Réduction de Loyer de Solidarité » risquent d’effacer 30 à 50 % de construction de logements sociaux neufs, selon les organismes HLM.




Dans un précédent article, nous expliquions les effets néfastes de la réforme de l’aide publique au logement, proposée par le Gouvernement, à travers l’article 52 du PLF (Projet de Loi de Finances) 2018. L’USH (Union Sociale pour l’Habitat) en remet une couche et publie le Livre Noir de la réforme des APL.

 

Sa dernière partie, à partir de la page 44, est particulièrement instructive. Douze organismes HLM expliquent quelles seront pour eux, dès 2018, les conséquences des réformes proposées par le Gouvernement.

 

 

 

Dans les Département des Alpes-Maritimes, l’Office Public Côte d’Azur Habitat estime que la diminution de ses recettes locatives de 8 millions entraînera, par effet de levier, la disparition de 100 millions de dépenses en 2018 : investissements en construction et rénovation, gros entretien et rénovation urbaine. Ce qui mettra en danger 950 emplois. ©CAH

 

 

Moins de construction neuve et des pertes d’emploi

 

L’Office Public Côte d’Azur Habitat, qui gère 21 000 logements dans les Alpes-Maritimes, perdra 8 millions d’Euros de recettes locatives. Cette baisse risque de pousser l’Office en dessous des ratios prudentiels règlementaires. Ce qui amputera sévèrement ses capacités d’investissement.

 

Chaque année, l’Office investit dans le département 49 M€ en construction, rénovation et gros entretien et dépense 12 M€ en exploitation et maintenance. Il sera contraint de reporter ou d’annuler des projets de construction d’environ 500 logements neufs dans des zones vraiment très tendues.

 

La coopérative HLM Essonne Habitat pointe une autre incohérence. L’article 52 du PLF prévoit la disparition pure et simple de l’APL (Aide Personnalisée au Logement) pour l’accession à la propriété. Concrètement, Essonne Habitat a engagé la construction de 54 logements PSLA (Prêt social accession location) dans l’éco-quartier du Quai des Arts à Ris-Orangis. 34 des 54 logements sont réservés, dont 12 bénéficient d’un financement APL Accession.

 

Alors que le Gouvernement souhaite développer la vente des logements HLM à leur occupants, plusieurs acquéreurs engagés dans ce programme verront leur taux d’effort dépasser 30%, si l’APL Accession leur est enlevée. Pour eux, l’APL Accession représente en effet entre 23 et 40% du montant de la mensualité de remboursement. Ils devront renoncer à leur projet d’accession, les logements reviendront dans le parc locatif social et la politique locale d’habitat engagée par la ville sera remise en cause.

 

 

 

Sur le programme de l’éco-quartier du Quai des Arts à Ris-Orangis, l’APL Accession représente 10 à 40% des mensualité des acquéreurs. Si l’APL Accessions est supprimée début 2018, nombre de projets mixtes accession/location des organismes HLM seront remis en cause. ©Essonne Habitat

 

La rénovation des Centres Bourgs remise en cause

 

Selon Grand Delta Habitat, une coopérative HLM qui gère 17 883 logements dans 8 départements entre le Vaucluse et l’Ardèche, face à la baisse de 5€ des APL annoncée au cours de l’été, il a été décidé de ne pas procéder à l’augmentation de loyer de 0,75% prévue en 2018. Coût pour la coopérative : 1 M€.

 

La RLS (Réduction de Loyer de Solidarité) prévue par l’article 52 du PLF dès 2018 entraînera une perte de recettes de 8 M€ : 42% de résultat en moins, 54% d’autofinancement en moins, 415 logements neufs non produits et 226 emplois dans le bâtiment remis en cause.

 

A court terme, la reconquête des centres bourgs par la rénovation urbaine est remise en cause. De même, face à l’incertitude sur ses recettes 2018, le Groupe Polylogis – Logirep, 3 Moulins Habitat, LogiOuest – a décidé de renoncer à la signature de nouvelles CUS (Convention d’Utilité Sociale) et d’engagements PNRU2 (Programme National de Renouvellement Urbain). Ce qui revient à geler toute action de renouvellement urbain.

 

 

 

Réduire les capacités d’autofinancement des organismes HLM près sur les actions de rénovation urbaine qui bénéficient toujours de multiples sources de financement, mais requièrent un amorçage fourni par les capacités d’autofinancement des HLM. ©Grand Delta Habitat

 

Réduction, réduction, réduction

 

La réaction des organismes HLM est unanime : l’amputation de leurs recettes prévues en 2018 les contraint à réduire la voilure à supprimer ou à reporter des projets de toutes sortes, en construction neuve, en rénovation énergétique, en gros entretien, ainsi que leur participation aux actions de rénovation urbaine.

 

Organisme après organisme, ils livrent depuis quelques jours la triste litanie des réductions envisagées pour 2018. Pour Habitat Réuni, un groupement de 19 sociétés HLM qui gèrent 143 000 logements dans 19 régions, l’amputation de 8% de leurs recettes de loyer, soit 52 M€, soit 40 à plus de 100% de la capacité d’autofinancement selon les organismes, les pousse à supprimer 63% de leur volume de construction neuve en 2018 - 1 712 logements non-construits – et un tiers des opérations de rénovation thermique sera repoussé.

 

L’Office Public d’Habitat Sud Deux-Sèvres prévoit la disparition de 90% de son autofinancement et 12,5 % de ses recettes : tout projet de construction est suspendu, les réhabilitations programmées sont à l’arrêt…

 

 

La Coopérative Habitat de l’Ill gère 3000 logements dans le Bas-Rhin et en construit 150 par ans. En 2018, elle réduira sa production de logements neufs de 50% car son autofinancement sera amputé de 40%. ©Habitat de l’Ill

 

Contre-propositions des HLM

 

Plutôt que de se laisser dépecer peu à peu, les organismes HLM commencent à formuler des contre-propositions. La FOPH (Fédération des Offices Publics de l’Habitat) demande la suppression de la réduction des APL et de l’instauration de la RLS (Réduction de Loyer de Solidarité). Comme le Gouvernement est à l’initiative du PLF, il peut le rectifier en ce sens.

 

Ensuite, la FOPH propose de passer le taux de TVA sur les investissements de 5,5 à 10%. Puis d’accroître les contributions des organismes – de manière concertée et financièrement supportable pour eux – à la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social (CGLLS). Si le Gouvernement maintient ses projets, le fameux choc de l’offre qu’il entend susciter pour augmenter l’offre de logements et réduire les loyers aura bien lieu, mais pas dans le sens souhaité.

 

En attendant, un peu dans le feuilleton du CITE (Crédit d’Impôt pour la Transition Energétique), chaque jour apporte des nouvelles annonces démenties dès le lendemain. Rien n’est donc sûr, tant que le PLF 2018 n’est pas définitivement adopté.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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