La région Île-de-France a voté mercredi le plan d'aménagement du territoire qui s'imposera aux élus jusqu'en 2040, dont une mesure "anti-ghetto" controversée sur les logements sociaux. Dans la foulée, elle a décidé de mettre à disposition un espace pour la construction d'un nouveau stade pour le PSG, si le club de foot parisien devait quitter le Parc des Princes que la mairie de Paris ne veut pas vendre.
Enfin, elle a adopté une motion pour demander à l'État d'abandonner le projet de LNPN (Ligne nouvelle Paris Normandie), une nouvelle ligne ferroviaire censée réduire les temps de trajet entre la capitale et plusieurs villes normandes.
Le Sdrif (Schéma directeur de la région Île-de-France), qui a fait l'objet d'une enquête publique avec 8 700 contributions, a été adopté par une "très large majorité" des élus du conseil régional présidé par Valérie Pécresse (LR), ainsi que l'a annoncé l'institution dans un communiqué, alors que le précédent Sdrif datait de 2013.
Le document comprend une "norme anti-ghetto" visant à freiner la production de logements sociaux dans les communes qui en comptent déjà au moins 30 %, afin d'instaurer "une mixité sociale réelle plutôt que de laisser la misère entretenir la misère", ainsi que l'a déclaré Valérie Pécresse.
Les services de l'État avaient retoqué une clause plus restrictive dans l'avant-projet du Sdrif, en 2023, estimant que son application entraînerait une baisse de la construction de logements sociaux de 21 %.
En outre, le Sdrif prévoit :
– la protection de 38 000 hectares d'espaces agricoles ;
– Le triplement des fronts verts contre l'artificialisation des sols ;
– Et, enfin, la création de 140 nouveaux espaces verts.
Le Sdrif veut créer "un nouvel équilibre entre la ville et la nature". © Freepik
Ce nouvel équilibre est inspiré du concept de la "ville du quart d'heure" de l'urbaniste Carlos Moreno. Autrement dit, il s'agit de permettre à chaque Francilien de travailler, éduquer ses enfants, se divertir, pratiquer du sport ... à moins de 20 minutes chez lui, avec la création de 144 "polarités", c'est-à-dire des zones regroupant les différents services.
Aujourd'hui, selon une étude menée par l'IPR (Institut Paris Région), 74 % des Franciliens de la grande couronne ont accès en moins de 20 minutes à la plupart des services. C'est l'accès à la santé qui pèche le plus, a précisé à l'AFP son directeur général, Nicolas Bauquet. Et dans les communes les moins denses, seuls 20 % des habitants ont un accès jugé satisfaisant aux services.
Selon les élus communistes, à l'issue de l'enquête publique, "la clause a été vidée de sa substance". Ils y voient "une défaite idéologique de Valérie Pécresse" dans la nouvelle mouture, selon eux seulement "incitative".
Quant à Adrien Delacroix (groupe socialiste, écologiste et radical), il s'est alarmé d'une mesure qui va "bloquer le développement de l'offre" dans les communes dont les maires souhaitent dépasser les 30 % de logements sociaux, "à l'heure d'une crise majeure du logement" en Île-de-France.
Ce à quoi Jean-Philippe Dugouin-Clément (UDI), le vice-président de la région, a répondu que la clause n'avait "pas bougé" et que la région continuerait, comme elle le fait depuis 2016, à ne pas financer le logement social dans les villes comptant plus de 30 % de logements sociaux.
La région Île-de-France a décidé mercredi de mettre à disposition un espace pour la construction d'un nouveau stade pour le PSG, si du moins le club de foot parisien devait quitter le Parc des Princes, que la mairie de Paris refuse de vendre.
Le Parc des Princes, le stade du Paris Saint-Germain, appartient à la mairie de Paris, qui refuse de le vendre au propriétaire qatari du club. © Arne Müseler
Selon le Sdrif, voté ce mercredi, une cinquantaine d'hectares seraient réservés au futur équipement, dont la localisation précise n'est pas encore connue ... Toutefois, des mairies franciliennes se sont déjà portées candidates, dont celle de Montigny-le-Bretonneux (Yvelines) et Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Le club n'a pas encore déterminé la localisation de son futur stade et "mène des études sérieuses", précise la direction du PSG.
Le président du Paris-Saint-Germain, Nasser Al-Khelaifi, avait annoncé en février vouloir "bouger" du Parc des Princes car la mairie de Paris refusait de lui céder le stade mythique de la Porte d'Auteuil. Or, le club parisien, engagé jusqu'à fin 2043 dans un bail de trente ans avec la mairie de Paris, actuelle propriétaire du Parc des Princes, considère que l'acquisition de l'enceinte est indispensable afin de mener à bien son projet d'agrandissement à 60 000 places, contre environ 48 000 actuellement.
De son côté, la mairie de Paris a assuré que sa porte était "ouverte" au PSG et qu'il existait "d'autres solutions" que la vente pour que le club reste au Parc des Princes.
"Bien que l'exécutif régional se soit positionné à de nombreuses reprises en faveur du maintien du Paris Saint-Germain au Parc des Princes, le blocage de la Ville de Paris semble remettre en cause la pérennité du stade", affirme la région présidée par Valérie Pécresse (LR) dans un communiqué. Jean-Marc Germain (groupe socialiste, écologiste et radical) lui répond en s'insurgeant : "Vous vous apprêtez à offrir un plateau de 50 hectares non pas au PSG mais aux hommes d'affaires qataris au nom de votre guéguerre médiatique avec Anne Hidalgo".
Quant à Céline Malaisé (gauche communiste, écologiste et citoyenne), elle a dénoncé un projet qui va, selon elle, détruire des terres agricoles.
Cette ligne doit permettre de relier Paris à Rouen en moins d'une heure (contre 1 heure 20 actuellement) ou Paris au Havre en 1 heure 45 (contre 2 heures 05). Le projet, qui vise également à désengorger les voies ferrées aux abords de Paris, est d'aménager le réseau existant, complété par la construction de tronçons nouveaux sur certaines sections, avec une construction prévue à l'horizon 2035-2040.
Une première phase d'étude avait été menée entre 2014 et 2017, et l'État a réaffirmé "son caractère prioritaire" et fixé une feuille de route en 2020, d'après le site de SNCF Réseau présentant l'infrastructure.
Valérie Pécresse a dénigré un projet "dont l'impact écologique et économique serait désastreux pour les communes traversées, notamment dans les Yvelines". D'après la motion adoptée par les élus régionaux, "cette ligne nécessite l'artificialisation de centaines d'hectares de terres agricoles qui sont parmi les meilleures de France". Le projet, estimé à 11,5 milliards d'euros par la région, est en plus une "aberration économique" et "va détruire ou endommager les ressources en eau ainsi que des espaces naturels essentiels à la protection de la biodiversité".
Valérie Pécresse avait émis trois conditions pour apporter son soutien, notamment financier, au projet :
– le maintien de l'arrêt des trains normands dans le Mantois ;
– Un prolongement de la section en souterrain dans les Yvelines ;
– Et, enfin, "que le service fret ne se fasse pas au détriment des voyageurs".
Toutes les conditions édictées par Valérie Pécresse, ici en photos, "ont été refusées par l'État et la région Normandie", est-il écrit dans la motion. © Thomas Laisné / Elle
La décision de l'Île-de-France a suscité la colère de la région Normandie et de plusieurs agglomérations importantes (Rouen, Le Havre, Caen ou Cherbourg) qui, dans un communiqué commun, ont évoqué "un projet d'intérêt national". Ils ont rappelé que Valérie Pécresse "oublie que le projet a été annoncé par Nicolas Sarkozy en 2009, et qu'il a dès lors été porté avec détermination par un gouvernement dont elle était membre".
De plus, peut-on lire dans le communiqué, "les partenaires du projet, dont sa région, ont consacré plus de 100 millions d'euros à ce jour" aux études. "Un projet d'intérêt national ne peut faire les frais d'une opposition locale", écrivent région et villes normandes, appelant l'État à appuyer la nouvelle ligne ferroviaire Paris-Normandie.