L’avenir du photovoltaïque en France, c’est l’autoconsommation

Deux maisons équipées de toitures photovoltaïques en bordure d'une route. © PP

L’augmentation du prix de l’électricité pousse les ménages, les entreprises, les industries, les collectivités territoriales à s’équiper en photovoltaïque pour l’autoconsommation




Le signal prix a une vraie portée : après 39 % d’augmentation du TRVE (Tarif Régulé de Vente de l’Électricité) de janvier 2023 à février 2024, les acteurs économiques de toutes tailles s’intéressent sérieusement à l’autoconsommation photovoltaïque. De plus, la CRE a publié les tarifs de rachat de l’électricité photovoltaïque par EDF. Pour les installations de moins de 3 kWc, le tarif de rachat pour la vente en totalité de la production est de 16,57 c€/kWh et descend à 14,09 c€/kWh pour des installations dont la puissance est supérieure à 3 kWc et inférieure ou égale à 9 kWc. Tandis que le tarif de rachat du surplus, en cas d’autoconsommation et vente du surplus, le prix est fixé à 12,97 c€/kWh jusqu’à une puissance de 9 kWc. Bref, vendre l’électricité produite par une installation photovoltaïque domestique ne vaut plus le coup. Il vaut mieux autoconsommer.

 

 

 

L’autoconsommation est rentable

Nous avons interviewé Paul de Préville, l’un des deux fondateurs d’Ensol, une entreprise d’installation de solutions photovoltaïques en région PACA pour l’instant et en maison individuelle seulement, pour l’instant. L’entreprise a été créée en juillet 2023 et a réalisé 150 installations depuis son lancement. Elle ne fait que du photovoltaïque en toiture et en surimposition, pas d’intégration en toiture. Selon Paul de Préville, la France offre le plus gros potentiel en solaire résidentiel, comparé à ses voisins européens. Ensol estime que le photovoltaïque est rentable dans toute la France, mais plus précisément dans la région PACA, une maison équipée de PV peut réaliser un peu plus de 1000 euros d’économies sur sa facture d’électricité, au TRVE actuel. Ce qui amortit l’installation en huit ans environ. Et, souligne Paul de Préville, le coût des matériaux (panneaux photovoltaïques, onduleurs, …) ne cesse de baisser, tandis que de nouvelles hausses du TRVE sont annoncées pour 2025. Le prix des panneaux a baissé de 65 % en 15 ans, alors que leur rendement a progressé.

 

Une installation de 3 kWc, soit 7 panneaux et 15 m², produit entre 2400 kWh à Lille et 4200 kWh à Montpellier. Pour 6 kWc, soit 14 panneaux et 30 m², la production annuelle en France varie de 4800 à 8400 kWh, un système de 9 kWc produit de 7200 à 12 600 kWh en moyenne. © PP

 

 

Ensol ne pose que des panneaux photovoltaïques du français DualSun. Les panneaux DualSun Flash ne sont pas fabriqués en France, mais entièrement en Chine. Ce sont des panneaux verre/verre, équipés de cellules rectangulaires TopCon et leur rendement est garanti 30 ans. Au passage, DualSun estime que le coût d’installation d’un système photovoltaïque de 3 kWc de puissance, posé par un installateur partenaire DualSun, atteint 9 000 € TTC, soit 600 €/m² ou encore 3000 € TTC/kWc. Pour 6 kWc, le coût atteint 15 500 € TTC (2583,3 € TTC/kWc) selon DualSun et pousse à 22 500 € TTC pour 9 kWc (2500 € TTC/kWc). Selon Paul de Préville, le coût moyen d’une installation PV en toiture est de 10 000 € TTC pour une puissance de 4,3 kWc, soit 2325,6 € TTC/kWc. Au passage, notons que si la puissance PV installés demeure ≤ 3kWc, le taux de TVA applicable aux travaux d’installation baisse à 10 %, contre 20 % si la puissance dépasse 3 kWc. Ce qui explique la bizarre prévalence des installations de 3 kWc sur le marché français, par rapport à tous nos voisins européens, qui, pour la plupart, comme l’Allemagne par exemple, appliquent une TVA nulle aux chantiers PV domestiques. C’est d’ailleurs l’une des propositions de Paul de Préville : supprimer toutes les aides publiques au développement du PV pour les ménages, mais appliquer un taux de TVA nul. En tout cas, ce serait administrativement plus simple et plus efficace.

 

 

 

Le bouche-à-oreille est le nerf de la guerre

Depuis sa création, Ensol étudie, dimensionne, puis pose des systèmes photovoltaïques et promet d’accompagner ses clients pendant 30 ans, soit la durée de vie prévisible de leurs panneaux PV. Pour Ensol, convaincre ses premiers clients a été laborieux, tant la méfiance envers le photovoltaïque est encore vive parmi les ménages français, pour toutes sortes de raisons, mais la crainte de l’arnaque figure en premier. Ensol a donc décidé de jouer la transparence et d’expliquer tous les coûts. Ses premiers clients voulaient maîtriser le coût de leur consommation électrique et réagir à l’augmentation du prix de l’électricité était leur principale motivation. Aujourd’hui, un client Ensol apporte en moyenne deux nouveaux clients, le plus souvent ses voisins immédiats.

 

Certains parmi les clients d’Ensol, encore très peu nombreux, visent l’autarcie et souhaitent produire toute l’électricité qu’ils consomment. Ce rêve, selon Paul de Préville, est encore inatteignable. Mais Ensol leur propose un premier pas vers ce but : le stockage d’électricité. Sans stockage, un ménage peut autoconsommer 40 % de sa production d’électricité photovoltaïque, jusqu’à 50 % en pilotant au mieux ses usages. Avec un stockage d’énergie, il peut monter à 80 % d’autoconsommation. Attention, cela signifie autoconsommer 80 % de l’énergie produite sur son toit, pas couvrir 80 % de ses besoins annuels. Pour maximiser l’autoconsommation, il faut réorganiser l’usage de l’électricité dans la maison : faire tourner les machines à laver, le sèche-linge durant la journée quand le soleil brille, surchauffer le ballon d’eau chaude (après avoir installé un mitigeur directement en sortie du ballon, naturellement), etc. © Ensol

 

 

Jean Bastin, directeur énergie chez Ensol, rappelle que "récemment, les progrès liés aux batteries électriques ont connu un bond fulgurant. Cette technologie est désormais garantie entre 10 et 15 ans, et permet d’augmenter considérablement le taux d’autoconsommation du foyer. À titre d’exemple, une maison en Provence-Alpes-Côte d’Azur, consommant 8000 kWh annuels et équipée d'une centrale solaire d’une puissance de 6 kWc produit 9000 kWh par an. Sans batterie, son taux d'autoconsommation dépasse difficilement les 40 %. L’ajout d’une batterie permet au foyer de consommer en soirée l’énergie produite la journée, doublant mécaniquement son taux d’autoconsommation de 40 à 80 %. Notre client réalise chaque année entre 20 et 30 % d’économies supplémentaires sur ses factures d’électricité".

Ensol propose pour l’instant une application pour suivre la production PV et la consommation, en distinguant l’autoconsommation, la consommation achetée au réseau, la production versée au réseau. En fin d’année, Ensol devrait ajouter à son offre un boîtier d’électronique de puissance pour gérer les flux d’électricité et maximiser l’autoconsommation.

 

En attendant, Ensol propose des stockages d’électricité Enphase si l’installation est pourvue de micro-onduleurs Enphase ou bien Huawei si elle comporte un onduleur centralisé Huawei. Fin avril, Ensol proposera aussi des bornes de recharge pour véhicules électriques. Le but de l’entreprise est d’offrir une complète solution d’électrification des maisons individuelles et de devenir leader dans l’installation de système photovoltaïques sur des maisons individuelles en France d’ici 2030. © Ensol

 

 

 

 

 

D’autres entreprises proposent des solutions de suivi de la production et de la consommation d’électricité. Nous vous parlons régulièrement de la solution de MyLight 150. Mais il existe encore d’autres sur le marché. Ecojoko, l’assistant connecté d’économie d’énergie, suit et analyse l’électricité consommée dans le logement et de suivre en temps réel le surplus de production photovoltaïque qui est injecté sur le réseau, ou la consommation qui sera facturée par le fournisseur d’électricité.

 

La solution ecojoko se compose de deux boitiers. Le premier se pose directement sur le disjoncteur ou bien sur le compteur Linky, s'il y en a un, et capte en temps réel les consommations, identifie les pièces et appareils les plus énergivores. Le second affiche sur l’aiguille du haut la consommation électrique en temps réel et les économies d’énergie en cours avec l’aiguille du dessous. De son côté, l’écran affiche la puissance actuelle et la consommation en instantané. © Ecojoko

 

 

 

 

 

Le bouclier tarifaire le plus solide, c’est l’autoconsommation

Fin mars 2024, la Confédération des commerçants de France a saisi le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, de la situation difficile de nombreuses entreprises confrontées à des prix très élevés de l’électricité, du fait de contrats conclus à des périodes particulièrement défavorables. Enerplan a aussitôt profité de cette revendication pour rappeler, qu’à moyen et long terme, le développement de l’autoconsommation solaire, pour l’électricité comme pour la chaleur, est une réponse durable et rapidement déployable pour la maîtrise des factures des entreprises et la souveraineté énergétique de notre pays. L’autoconsommation, ajoutait Enerplan, peut être aussi une solution efficace pour les entreprises, les collectivités ou les bailleurs sociaux, qui voient leurs marges de manœuvre lourdement contraintes par les prix de l’énergie.

 

Pour Laetitia Brottier, vice-présidente d’Enerplan, "L’autoconsommation coche toutes les cases : de l’énergie moins chère et décarbonée, de l’autonomie et de la sécurité d’approvisionnement. Le bouclier tarifaire le plus solide, c’est l’autoconsommation : les ménages l’ont bien compris, leur engouement en est la preuve. À l’heure où le retard de la France dans le déploiement des renouvelables est patent, alors que nous sommes très loin de nos voisins européens sur l’équipement solaire des toitures, il est temps de sonner la mobilisation générale. Non seulement pour réduire les factures, non seulement pour réduire nos consommations d’énergies fossiles, mais aussi pour créer les emplois de la transition énergétique." © PP

 

 

 

À destination des industriels, les offres d’installation et d’exploitation, parfois associées au financement, des installations photovoltaïques se multiplient. Par exemple, Cordier, filiale vin du groupe coopératif InVivo, a confié à Idex la mise en place de son offre parking branché (panneaux solaires sur ombrières et bornes de recharge pour véhicules électriques) pour ses sites de production de Trilles (34) et Cubzac-Les-Ponts (33). À Trilles, la production annuelle des panneaux photovoltaïques est estimée à 631 MWh. Ce qui couvrira 20 % des besoins énergétiques annuels du site de conditionnement. Plus de 20 % des places de parking seront équipées en bornes de recharge pour véhicules électriques. En Gironde, à Cubzac, le site historique de production de vins "Café de Paris" prévoit le déploiement de panneaux solaires au sol, raccordés au printemps 2024. Les travaux d’installation des ombrières débuteront en juillet 2024. 80 % de l’énergie produite sera destinée à l’autoconsommation.

 

 

Un autre type de solution amorce un fort développement : le photovoltaïque à installer soi-même. Comme les offres se multiplient sur le marché français, nous y consacrerons un article spécifique.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
2 Commentaires
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  • par Jeepch
  • 26/04/2024 13:30:54

Je suis en train étudier la pose d’une éolienne pour économiser la batterie liée au photovoltaïque… Qu’en pensez-vous ?

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  • par Sylvain
  • 25/04/2024 16:18:17

Bonjour, il sera utile de détailler l'autoconsommation possible à laquelle on peut s'attendre, et non celle que vendent les vendeurs. Les panneaux produisent en journée, et 70% de leur production totale entre avril et septembre. On cuisine le soir, charge la voiture électrique la nuit, et si on a une PAC elle fonctionne plutôt entre octobre et avril que le contraire. Donc la rentabilité et protection tarifaire n'est pas évidente à atteindre selon ses cas d'usages, et il faut en être bien conscient.

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