Un tour de Paris à vélo pour découvrir les bâtiments biosourcés

La Maison de l'Inde, nouveau bâtiment livré par Lipsky+Rollet il y a dix ans, constitue le point de départ de la construction bois périphérique

A Paris, la rénovation des boulevards de Maréchaux facilite l’accès à de nombreux ouvrages biosourcés réalisés notamment en périphérie au cours des dix dernières années. Il est possible de créer un circuit complet.




Tout a commencé avec le nouveau bâtiment de la Maison de l’Inde, à côté de la Fondation suisse et de la Maison du Brésil, deux odes au béton du Corbusier. Au 3e  Forum Bois Construction de Beaune en avril 2013, l’agence Lipsky+Rollet, Olivier Gaujard et les Tyroliens du Sud Rubner expliquent ce projet R+7 qui rivalise avec le R+7 du Toit Vosgien de St Dié-les-Vosges (encore Gaujard). On aperçoit aujourd’hui son impeccable façade en loggias ondulantes de l’avenue Pierre de Coubertin. Un bon point de départ pour une épreuve olympique qui serait de faire le tour de Paris à vélo en repérant les bâtiments biosourcés peu haussmanniens, mais en phase avec des jeux décarbonés.

 

Des perles en bois

 

Si l’on prend vers l’Est, on arrive vite à la seconde étape historique, le bâtiment Opalia (Artbuild), en bordure de périphérique, étonnamment bien conservé malgré la pollution incessante du périph’, grâce à sa double façade. Pour y accéder on rejoint le boulevard Kellermann et Porte d’Italie, on fait un petit détour direction périph’, pour la ZAC Paul Bourget Gerda Taro et la progression de ses lots vers le bois, entre les lots de l’agence Koz et celui, très récent, de Philippon-Kalt pour Elogie Siemp, R+9 et plus de 100 kg de bois par m² de plancher !

 

Opalia résulte du travail de pionnier de Steven Ware d'Artbuild, pour construire des bureaux et espaces tertiaires en bois dès 2006. Opalia défie le temps et la pollution sans occulter le bois et à de quoi séduire la direction de l'architecture de la ville de Paris.

 

Les surprises des bords de l’autoroute

 

Mais on pourrait aussi partir dans l’autre direction, passer sous le périphérique et bifurquer tout de suite à droite pour l’hôtel Joe&Joe, une conception de Woodeum ae Jean-Paul Viguier. Parallèle au périphérique, la rue qui la borde est un peu dangereuse pour les vélos, il vaut mieux faire un petit détour par les charmantes ruelles de Gentilly, notamment pour rejoindre ensuite la passerelle à platelage bois, réservée aux piétons et vélos, pour enjamber l’A6a et accéder à la Promenade des Berges (prolongement de la Passerelle du Cambodge) réalisée par Charpente Cénomane.

 

La passerelle piéton et vélo qui relie Gentilly et Montrouge avec ses platelages en bois, et une vue dégagée sur le prolongement de la passerelle du Cambodge, une promenade sur pente pensée par l'ingénieur Jacques Anglade et réalisée par Charpente Cénomane avec des Techno-Pieux.

 

Le vélo, meilleur vecteur de découverte

 

Jusqu’au Hosta encore en construction porte Brancion, l’application Cartoviz développée par FiBois permet de repérer un certain nombre de réalisations. En 2023, le journaliste Raphaël Pauschitz s’en est inspiré et est parti du Hosta à vélo avec une délégation de Néerlandais, dans le même esprit d’utiliser les confortables boulevards des Maréchaux pour rejoindre d’autres construction bois récentes qui illustrent l’architecture bois contemporaine depuis 10 ans.

 

Ces dernières ne germent pas toujours sur le boulevard intérieur comme l’immeuble du 71 boulevard Poniatowski, un R+9 érigé à partir de la technique Kiwood et High Kiwood et derrière lequel on découvre une surélévation récente et originale par l’agence Equateur. Le boulevard est la voie d’accès pour un chapelet qui se situe parfois un peu plus à l’intérieur, côté Petite Ceinture, voire à l’extérieur du périph’, tandis que les HBM occupent souvent, élégamment, l’intervalle entre l’autoroute et le boulevard.

 

Un regard neuf sur l'économie circulaire

 

Le boulevard intérieur fait 33 km, mais si l’on dessine un parcours qui relie environ 32 sites et fait le tour de Paris, on arrive à près de 50 km. Le restaurant de La Ferme du Rail, proposant des plats à partir d’une agriculture urbaine, est indiqué comme pause de midi, d’autant qu’il est ouvert le dimanche, quand le boulevard est plus calme, et qu'il offre une promenade sur un tronçon de la Petite Ceinture. Il convient de préparer l’excursion pour ne pas s’attarder à chaque site, quitte à faire des pauses choisies, et dans ce cas, le tour de Paris est olympiquement jouable.

 

On y découvre certes ces ouvrages récents en bois, mais aussi bien d’autres choses et on jette un regard neuf sur un Paris neuf. A vrai dire, même si les constructions en bois se multiplient dans cette zone périphérique, les mollets font remonter l’impression d’une grande rareté du biosourcé. Le ratio du circuit bien adapté est d'une réalisation tous les 2 kilomètres en moyenne (sauf Cluster de la ZAC Rive Gauche). Pas cette fois à cause du tissu urbain haussmannien intra-muros qui ne laisse au biosourcé que quelques cours intérieures invisibles. Les dix dernières années montrent certes une émergence du bois mais, là où l’on construit, surtout une hégémonie criante de la maçonnerie traditionnelle.

 

ZAC Rive Gauche et ZAC Bruneseau, cluster biosourcé

 

A force de boucler le tour de Paris avec des parcours de mieux en mieux nourris de références de construction, de rénovation, de surélévations, les murs de béton contre lesquels se dresse la construction biosourcée finiront-ils par tomber comme les murailles de Jéricho ? L’Opalia abrite les services architecturaux de la ville de Paris. A quelques centaines de mètres se dresse, avec le quartier Bruneseau et la ZAC Rive Gauche, un véritable cluster de la construction bois : Nudge, tour Watt, Université de Chicago, Air du Temps, Le Berliet, Wood Up. Les travaux pour la Tour Commune pour une livraison en février 2026, et la tour Ré-alimenter Masséna semble relancée rue Regnault.

 

Paris révèle ses ambitions décarbonées

 

Le Paris olympique a voulu réduire son empreinte carbone de 50% par rapport à Londres mais au Village des Athlètes, le bois pourtant bien présent est complètement occulté pour la structure sauf lot D. Il en va de même côté aménagement intérieur, et ne parlons pas des ouvrages éphémères, avec l’exception du Grand Palais Ephémère.

 

Le monde va venir questionner Paris en 2024 et la municipalité a de la chance, elle peut montrer son engagement climatique non seulement par le développement des pistes cyclables, mais par l’intérêt des constructions biosourcées récentes que ces nouvelles pistes permettent d’identifier. Ce n’est pas de la poudre aux yeux car à l’intérieur de ce périmètre travaille sans doute le plus grand cluster architectural mondial en matière de construction durable.

 

Une ceinture verte bâtie ?

 

Le message de Paris 2024, c’est que la capitale est à la hauteur de la COP21, par son incroyable tissu de concepteurs, par le chapelet des réalisations récentes et par sa volonté d’aller encore plus loin, comme l’impose la crise climatique. La pacification de ce cauchemar urbain qu’est le boulevard périphérique passe par l’Hosta, par la ZAC Paul Bourget Greta Taro ou la passerelle du Cambodge. Le signal des grattes ciel Duo et bientôt de la tour Triangle devrait être contrebalancé. Mais pas par une "Tour de la terre" de Bobigny enterrée en 2010. Par touches, mais systématiquement, la construction biosourcée devrait devenir le ciment qui relie la capitale à sa périphérie immédiate.

 

Des passerelles piéton-vélo en bois ! Des Hosta à rythme régulier qui habitent les no man’s land ! Des surélévations, extensions et réhabilitation affichant une approche biosourcée tout autour des boulevards des maréchaux, en phase avec le gazon du Tram et les nombreux arbres plantés. Et surtout, une mise en avant des constructions biosourcées par des guides, des panneaux, des pistes, des signaux, des promenades organisées, une volonté de développer et de visualiser cette ceinture verte.

 

La seconde forêt

 

A l'occasion de la journée internationale des forêts, et du début du printemps et qui sait déjà de l'été, le 21 mars, voici le périple de ce qu'on pourrait intituler "La seconde forêt"  :

  • Maison de l'Inde (Lipsky+Rollet)
  • ZAC Paul Bourget (KOZ, Philippon-Kalt)
  • Opalia (Artbuild) avec l'école Levasseur
  • ZAC Bruneseau et ZAC Rive Gauche (Wood Up, Le Berlier, Tour Watt, Nudge, Persiennes, Université de Chicago, Air du Temps, Aurore, Tour Commune, Ré-alimenter Masséna...)
  • Aurore (Moon Architectures)
  • 71 Boul Poniatowski + Claude Decaen (Philippe Roux Architectes Associés, Equateur)
  • Wikivillage (AAA)
  • Les Venelles (LA Architecture) et tennis (Bruno Mader)
  • La Ferme du Rail (Grand Huit)
  • Hilton La Villette (Calq)
  • 007 (Anne Carcelen)
  • Arena-Chapelle Charbon (h20 architectes), tour H1 Chapelle International (Armand Nouvet Architecture et DATA Architectes)
  • Groupe scolaire Binet (DE-SO)
  • Crèche Bichat (Quatro architecture), Totem de la Porte de St Ouen (Hardel Le Bihan)
  • Stream (PCA-Stream), Thémis (Corinne Vezzoni architectes et Michelle Lenne-Haziza)
  • Enjoy (Baumschläger Eberle Architekten)
  • La crèche Péreire (Ivan Lamboley)
  • Les logements sociaux rue de Courcelles (Raphaël Gabrion Architectures)
  • CHU Promesse de l'Aube (Moon Architectures)
  • Gymnase Suchet (KOZ)
  • Sixième Toit (non visible)
  • Bâtiment social en cours de la rue van Loo (WRA)
  • Logements étudiants rue Bertelotte (NZI),
  • Installations sportives du Lycée de Vanves (Exploration Architecture)
  • Hosta (Hardel le Bihan)
  • Rue des Arbustes (Djuric-Tardio)
  • Logements Villa Mallebey (Pascal Gontier)
  • Institut du Judo (Architecture Studio)
  • Boul Jourdan R+11 non construit (Pascal Gontier)
  • Résidence Simone Veil (AAVP)
  • Passerelle du Chaperon Vert (Patrick Bertrand)
  • Hôtel Joe&Joe (Jean-Paul Viguier)
  • Maison de l'Inde.

Soit 32 balises pour 48 constructions et sans doute, sur le parcours, d'autres réalisations en bois insoupçonnées.

 

Source : batirama.com/Jonas Tophoven © Jonas Tophoven

L'auteur de cet article

photo auteur Jonas TOPHOVEN
Jonas Tophoven est journaliste de la presse professionnelle de la construction et du bois en France et en Allemagne depuis 30 ans. Le thème qui lui tient particulièrement à cœur est la réduction drastique des émissions de GES dans la construction, première émettrice humaine du monde devant l'agriculture, avec un impact renforcé en France. Il a d'abord travaillé pendant 12 ans sur la construction sèche, puis depuis 15 ans sur la construction bois préfabriquée et il collabore depuis 10 ans à la programmation des quelque 150 conférences annuelles du Forum Bois Construction, congrès des acteurs de la construction biosourcée.
2 Commentaires
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  • par Yasmina Sandoa
  • 01/02/2024 17:37:27

Cartoviz: https://www.fibois-idf.fr/cartographie-des-projets-bois-et-biosources Super outil et belle idée cette promenade constructive dans cette deuxième forêt !

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  • par maisou
  • 29/01/2024 17:01:24

Super ! mais où est cette carte cartoviz ?

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