La Tour Watt, plus haute surélévation en bois d’Europe à Paris

La Tour Watt, plus haute surélévation en bois d’Europe à Paris

Cinq années de travaux de réhabilitation, d’extension et de surélévation de la Tour du Loiret révèlent une tour rebaptisée Watt à la mesure des immeubles neufs du haut de l’avenue de France.




La réhabilitation de la Tour du Loiret sur fond des tours Duo qui culminent à 180 mètres. La réhabilitation de la Tour du Loiret se distingue par la plus haute surélévation de quatre étages en bois en Europe. Vincent Lavergne a présenté son projet aux USA et l’université de Chicago va venir bâtir un immeuble en bois au pied de la tour. © Sergio Garzia

 

Avec retard, la ZAC Rive Gauche découvre la construction biosourcée. Pendant des années, il était convenu de construire en béton, ou peut-être en métal, au-dessus des poutres en béton qui enjambaient les voies ferrées.

 

Finalement, pour rompre l’effet d’un espace trop minéral, un bardage en chêne est apparu au 121 avenue de France (îlot T8, Rudy Ricciotti), puis ce furent les 75 logements des Hariri sur ressorts, où l’enveloppe est en bois, en 2018 déjà.

 

En 2017, l'agence Vincent Lavergne Architecture et Urbanisme en collaboration avec les ateliers WOA s’était adjugé dans le cadre du concours AdivBois sa Tour Commune de 50 mètres en bois, dont les travaux n’ont pas encore démarré. A côté, le Berlier (Moreau Kusunoki) monte actuellement ses façades Techniwood avec du bois brûlé, tandis que le Wood’Up de LAN, autre lauréat du concours AdivBois de 2017, devrait démarrer en 2022.

 

Non loin, l’université de Chicago prévoit un immeuble d’habitation R+9 en structure bois avec Parc Architectes/Studio Gang. Le New G par AAVP est bien avancé avec ses étages en bois sur socle surélevé en béton.

 

 

La Tour du Loiret, baptisée en fonction de son adresse d’origine et de l’entrée qui se faisait par la rue du Loiret, avant la création de la dalle et de la rue Louise Bourgeois.© Julien Hourcade

 

 

Montage à l’aveugle des panneaux CLT pour la surélévation et l’extension, une collaboration Lignatec et Rialland. ©Sergio Garzia

 

Au débouché de la rue Watt

 

La réhabilitation de la Tour du Loiret accompagne ce mouvement tout en l’ayant devancé, puisque le concours de réhabilitation de cet IGH social pour le personnel roulant de la SNCF a été bouclé il y a longtemps, avec un démarrage de chantier dès octobre 2016.

 

L’architecte qui a construit cette tour livrée en 1973 n’a pas laissé son nom mais il a utilisé de l’amiante comme l’architecte Albert à Jussieu. Le programme de réhabilitation d’ICF La Sablière prévoit d'encapsuler les façades amiantées, et de créer des salles de bains privatives là où elles étaient partagées.

 

Un bâtiment rigoureusement tramé avec tant de béton que l’agence Nadau Lavergne (donc Vincent Lavergne en charge des projets parisiens), y voit la possibilité de réaliser une surélévation de 4 étages, voire plus s’il avait été possible de dépasser 50 mètres à partir de la nouvelle rue Louise Bourgeois à la hauteur de la dalle de la ZAC Rive Gauche.

 

Non seulement la structure supportera la surélévation, mais elle permettra d’accrocher une extension sur la face plus ou moins aveugle qui donnait sur les voies à présent recouvertes. Il sera même possible de grignoter les voiles entre deux chambres pour les agrandir en forme de L, quitte à refaire des poutres à l’aide de plaques de carbone. Avec l’extension et la surélévation, on revient peu ou prou au même nombre de logements.

 

 

Focus sur l’extension en CLT dont les baies sont détramées.©Sergio Garzia

 

Manifeste et réalités

 

Devenu seul maître à bord avec sa nouvelle structure VLAU, Vincent Lavergne va faire de ce long chantier une sorte de manifeste, relayé sur place par le jeune Elliott Torchio (VLAU) et l’agence A&B PMCR pour l’aménagement intérieur.

 

Les ouvrages bois, par G. Rialland (95), ne sont pas vraiment un problème. Le dernier niveau est aplani avec évacuation des déblais par la cage d’escalier, et la face nord aveugle est transpercée pour accéder à une extension sur 8 étages surplombée par des terrasses.

 

La prise au vent fait pencher pour une structure en CLT. Le compagnon charpentier Pascal Nogaro dirige ce chantier qui est la plus haute surélévation en bois d’Europe. Les ouvriers ont 4 semaines pour assembler les 4 niveaux et ajouter l’extension : « Les panneaux de bois sont levés par camion grue, une manœuvre en aveugle pour le pilote qui reçoit les instructions de son collègue par talkie-walkie ». Dans les extensions, la maîtrise d’œuvre augmente la taille des baies et trompe la trame, mais maintient un rapport avec l’existant.

 

Protection incendie de la Tour

 

Les ouvrages bois sont déjà en place quand démarre la dépose de la façade amiantée. Mais le retard pris par ce chantier vient du fait que l’amiante est découvert à l’intérieur, derrière les faïences. En façade, l’amiante a uniquement été encapsulé.

 

Au point que le chantier entre dans les eaux troubles de l’actuelle réglementation incendie pour les logements de 4e famille. Derrière le bardage en métal déployé, VLAU propose un pare-pluie rigide, en tôle, d’abord rejeté puis tout de même prescrit. Pour la surélévation, il fallait à l’origine une plaque de BA25, maintenant, c’est 2 ! Par contre, le sprinklage de la surélévation n’a pas été évoqué.

 

 

Les baies adoptent une nuance de gris et leur format si rigide devient aléatoire. ©Sergio Garzia

 

Ce qui manque encore

 

Ce qui est bluffant, c’est la façon dont VLAU travaille la façade de la tour pour atténuer la régularité de ses petites baies. Ces dernières deviennent une sorte de complément au patchwork volontairement déstructuré des caissons à métal déployé.

 

De même, l’extension et la surélévation avec des terrasses occulte la régularité géométrique de la tour, qui plaisait il y a 50 ans. On est face à une réhabilitation qui ne se devine plus. Pour l’heure, contrairement à l’esquisse du concours, cette masse de métal déployé n’est pas contrebalancée par de la verdure, ce sont les usagers de la SNCF qui décideront de l’emploi qu’ils feront des terrasses.

 

De même, le socle du bâtiment n’est pas encore tout à fait fini et devrait contribuer par un jardin à atténuer l’effet du métal. Les locaux communs au sommet de la tour, qui offrent une vue unique sur le quartier, ont été conçus pour permettre une grande variété d’usages, et sans en imposer. Sans oublier les 207 m2 de terrasses privatives (contre 85 m2 partagés), et donc pas de place pour des panneaux photovoltaïques ou chauffants.

 

 

Entré par la rue Louise Bourgeois, caissons en aluminium Polymiroir, une scène de film en alternative à Melville. ©Sergio Garzia

 

Conception-réalisation

 

La réhabilitation, menée en conception réalisation avec Eiffage Amélioration de l’Habitat, fait ses devoirs en se calant sur le Plan Climat parisien et en remontant l’étiquette énergétique à B, grâce à une réduction, en principe, de 71% des consommations en énergie primaire.

 

Les labels sont nombreux : NF Habitat et HQE Rénovation, Effinergie rénovation Cerqual, Plan Climat Air-Énergie Territorial, Plan Biodiversité, Bas Carbone avec analyse du cycle de vie des matériaux. Le bilan émissif n’est pas nommé, sans doute parce que le chantier a démarré trop tôt. Le montant des travaux est de 11,5 millions d’euros HT pour une surface de plancher de 6053 m2, soit 1890 euros/m2, ce qui, désamiantage compris, est raisonnable.

 

 

Vue sur Paris, au Nord, à partir de la terrasse commune, avec l’une des terrasses privatives au premier plan, puis la Cité du Refuge de Le Corbusier. ©Sergio Garzia

 



Source : batirama.com/ Jonas Tophoven

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