Rénovation d’un bâtiment industriel à Nantes en bord de Loire

Rénovation d’un bâtiment industriel à Nantes en bord de Loire

La Salle à Tracer, partie du chantier naval Dubigeon, a été transformée en bâtiment de bureaux HQE sans perdre son âme de bâtiment industriel.




Le SNBVI (Syndicat National des Bardages et Vêtures Isolés) rassemble les industriels du bardage, de la vêture et de l’Isolation Thermique par l’Extérieur (ITE). Présidé depuis janvier 20189 par Stéphane Lambert, Responsable du BE et de la Normalisation chez Faynot, le SNBVI pousse le concept de la Façade Intelligente.

 

Pour démontrer l’intérêt de cette idée, le syndicat a organisé Mardi 5 juin 2018, une visite de bâtiments à façades emblématique sur l’Île de Nantes et à proximité immédiate. Le premier bâtiment visité était la « Salle à Tracer », une construction en béton, datant de 1915, une époque où construire en béton était encore très rare.

 

©AIA Life Designers

 

Réhabiliter sans détruire

 

La « Salle à Tracer » a déjà une longue histoire. Construite au bord de la Loire, les pieds dans l’eau, en structure poteaux-poutres en béton, elle abritait sur trois niveaux, l’atelier de conception des chantiers naval Dubigeon. Fondés en 1760, les chantiers Dubigeon avaient développé au XIXe siècle une spécialité de construction de navires à coque en acier.

 

A Chantenay, une commune adjacente de Nantes, au second étage de la Salle à Tracer, dans une immense pièce de 65 x 13 m, sans poteau, ni cloison, 6 à 9 personnes travaillaient à genoux sur un épais plancher bois, clouant de petits repères en laiton qui permettaient ensuite de façonner les gabarits en bois utilisé pour la fabrication des coques de navires en acier.

 

Quand les chantiers navals Nantais Dubigeon déménagent dans l’Île de Nantes, ils vendent la Salle à Tracer à une entreprise de mécanique marine. Les chantiers Dubigeon fermeront définitivement en 1987. En 1982, Jacques Fétis, un industriel Nantais qui, en 1978, a fondé Secodi, un spécialiste des moteurs Diesel, rachète cette entreprise de mécanique marine. Pendant presque 30 ans, la Salle à Tracer demeure en l’état, son rez-de-chaussée était occupé par des activités de Secodi.

 

©AIA Life Designers

 

AIA Life Designers installe ses équipes dans la Salle de Traçage

 

Au début des années 2010, le cabinet d’architecture AIA Life Designers cherchait un lieu pour sa nouvelle Agence Nantaise. Par hasard, le cabinet était déjà locataire d’une partie d’un bâtiment appartenant à Jacques Fétis. Ils le convainquent de réhabiliter, puis de leur louer la « Salle de Traçage ». En réalité, il n’attendait que ça et avait conservé le bâtiment en l’état, espérant qu’une solution de réhabilitation respectueuse apparaîtrait un jour.

 

Il s’ensuivra 18 mois de travaux, dont 9 de curage et de réparation des ouvrages en béton. AIA Life Designers, le nom énonce déjà tout un programme. Le groupe, nommé à l’origine Architectes Ingénieurs Associés, a été fondé en 1975 à Saint-Herblain et rassemble 5 métiers principaux : AIA Architectes, AIA Ingénierie, AIA Management (conduite des chantiers), AIA Environnement et AIA Territoires (urbanisme). Aujourd’hui, le groupe AIA emploi plus de 600 personnes dans 8 Agences en France, en Chine et en Suisse. 230 Personnes, environ, travaillent dans la « Salle de Traçage » réhabilitée.

 

 

 

Selon Jérôme Milteau, Architecte chargé des travaux chez AIA, contrairement à l’usage qui demande une parfaite rectitude, le bâtiment a été modélisé « de travers » pour respecter sa déformation dans le temps et reconstruit en tenant compte de cette contrainte. ©PP

 

Réparer le béton de la Salle de Traçage

 

La Salle de Traçage est construite en bord de Loire, sur des fondations que l’on considèrerait comme inadéquates aujourd’hui. Du côté de la Loire, la rivière entre sous le bâtiment à marée haute. Au fil du temps, la structure poteaux-poutres en béton, moins ferraillé que ce qui serait considéré comme nécessaire aujourd’hui, a bougé.

 

La construction date de 1915, un moment où l’acier produit en France était avant tout consacré à l’effort de guerre. Bref, lorsque Jérôme Milteau, l’un des architectes d’AIA qui dirigera les travaux de réhabilitation, commence les premiers relevés, il est très vite clair qu’aucun poteau n’est parfaitement vertical, qu’aucune poutre n’est tout à fait horizontale.

 

En outre, en un siècle, le béton en façade était très dégradé par endroit, sous l’effet des influences marines que l’on peut ressentir jusqu’à Nantes. Le but des réparations était de consolider sans toucher aux fondations, sans alourdir les charges. Tous les travaux de curage du béton font fait ’objet d’une inspection hebdomadaire par le CEBTP.

 

 

 

Comme les poutres de béton étaient insuffisamment ferraillées et construites sans cages, elles ont été frettées à l’aides de bandes d’acier. Tous les 30 cm, elles ont été entaillées au marteau piqueur jusqu’au ferraillage, cerclées de feuillards, recouverts à l’aide de béton non-structurel Sika. ©PP

 

Tout a été déposé, sauf la structure poteaux-poutre en béton

 

Les travaux de démolition ont conduit au dépôt de tous les ouvrages du bâtiment, à l’exception de la trame en béton, du plancher classé du second étage et de sa structure support. Le plancher du premier étage a été déposé, poncé et nettoyé puis réutilisé en guise de revêtement intérieur des murs de la nouvelle entrée du bâtiment.

 

La charpente métallique a été démontée, nettoyée. Chaque élément a été inspecté, puis remonté lorsque c’était possible. Les garde-corps sous les fenêtres existantes étaient de lourds éléments en mâchefer. Ils ont été démontés pour alléger le bâtiment et agrandir les ouvrants pour apporter davantage de lumière.

 

Comme le second étage était plutôt bas de plafond, affichant des hauteurs de 2 à 2,10 m sous plafond, alors que le rez-de-chaussée offrait d’amples volumes, AIA a décidé de descendre le plancher du 1er étage de 30 cm.

 

 

 

Le bâtiment original offrait une structure en 13 trames de 5 m, sur une largeur de 13 m. Soit au total 65 m de longueur et environ 2000 m² de planchers sur trois niveaux. Ce n’était pas suffisant pour les besoins de AIA qui voulait 3000 m². Un grand volume en ossature bois, avec un cœur en béton abritant la cage d’ascenseur, a donc été ajouté au bâtiment à l’opposé de la rivière. ©PP

 

 

Ajouter un grand volume à l’entrée

 

Il a fallu renforcer la structure béton du bâtiment pour supporter les charges additionnelles de plus de personnel et de plus d’équipements, bureaux, ordinateurs, etc. Une seconde structure porteuse en acier double la structure béton. AIA a également rehaussé la toiture de 30 cm pour ménager un plus grand volume au second étage.

 

Enfin, un nouveau volume en ossature bois ajoute environ 30 m de longueur au bâtiment, à l’opposé de la rivière. Dans ce volume, une boîte en acier Corten semble flotter. Elle abrite deux salles de réunion et deux bureaux. Toute la façade et la toiture est habillée de zinc VMZinc, membre du SNVBI.

 

Le permis de construire a été déposé en 2014. Les 230 personnes d’AIA occupent le bâtiment depuis le printemps 2017. L’ensemble du chantier a coûté environ 6 millions d’Euros. La Salle à Tracer rénovée a obtenu un Label HQE et affiche des consommations énergétique RT2012-50%.

 

 

 

La boîte flottant dans le nouveau volume ajouté est habillée d’acier Corten et repose sur un cœur en béton qui contient la cage d’ascenseur. ©PP

 

 

 

 

Au premier étage, le plancher a été descendu de 30 cm pour ménager une hauteur sous plafond conforme à ce que l’on attend dans des bureaux contemporains. ©PP

 

 

Au second niveau, le plancher classé avait été nettoyé à la vapeur haute pression, puis numérisé entièrement pour conserver la mémoire des marques de laiton qui servaient à tracer le gabarit des bateaux à échelle 1. Il a été encapsulé dans une chape sèche, sauf une dizaine de lucarnes vitrées qui le donnent à voir de place en place à travers la pièce. ©PP

 

 

 

Le bâtiment est chauffé par des panneaux rayonnants Zehnder. Au RDC et au 1er étage, ils sont montés horizontalement sous les plafonds. Au second étage, ils sont inclinés sous les rampants de la toiture. ©PP

 

 

Tout l’éclairage est assuré par des Leds. En hiver, la ventilation est prise en charge par une ventilation double-flux avec récupération de chaleur GEA. Le bâtiment est piloté par une GTB Delta Dore. ©PP

 

 

En été, la ventilation mécanique est stoppée et le bâtiment passe en ventilation naturelle, grâce à des fenêtres de toit Velux motorisées et commandée par bus de communication sans io-home control, et à des ouvrants latéraux, protégés par des grilles contre les chutes. ©PP

 

 

 

 

Côté Loire, la rivière pénètre sous le bâtiment. Les concepteurs en ont profité pour noyer dans son cours des nappes de tubes en PEHD (polyéthylène à haute densité). Parcourus par de l’eau glycolée, ils constituent le condenseur d’une pompe à chaleur eau glycolée/eau réversible Climaveneta qui fournit la chaleur (100 kW) pour le chauffage des bureaux.

 

 

Le long des façades Est et Ouest, les protections solaires sont classiques. ©PP

 

 

Mais sur la façade sud, côté Loire, le second étage est protégé par des vitrages électrochrome de Saint-Gobain Glass. ©PP

 


Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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