Le ciment à la recherche de solutions bas carbone

Le ciment à la recherche de solutions bas carbone

Alors qu’elle a considérablement réduit son empreinte carbone, l’industrie cimentière poursuit ses recherches en matière environnementale.




©Laboratoire Couvrot Site Ciments Calcia - HeidelbergCement Group

 

Il y a deux cents ans, Louis Vicat inventait le ciment articiel (voir notre article sur l'histoire du ciment). Le ciment est constitué principalement de clinker issu de la cuisson à 1450°C d’un mélange dosé de calcaire, d’argile, d’alumine et de fer (le cru). Cette poudre a la faculté de réagir avec l’eau pour agglomérer des sables et des granulats et former du béton ou du mortier. C’est le matériau de construction le plus utilisé au monde (en tonnage), sa production mondiale annuelle s’élève à 1,25 milliards de tonnes.

 

La cuisson du cru dans les fours libère du CO2 provenant de deux sources complémentaires : la dépense d'énergie liée à la nécessité de produire de très hautes températures pour réaliser le processus physicochimique et le phénomène de transformation du calcaire sous l'effet de la chaleur en chaux et en gaz carbonique (CO2). Plus de 60 % des émissions de CO2 lors de la fabrication de ciment proviennent de cette « décarbonatation ».

 

Pour réduire ces émissions, deux leviers sont utilisés : la valorisation de déchets (pneus, biomasse, déchets industriels, plastiques, bois…) comme combustibles alternatifs en substitution de combustibles fossiles et l’incorporation de résidus de production d'autres industries comme ajouts cimentaires ou matières premières (cendres volantes, laitiers de haut-fourneau…).

 

 

1-Déchets solides broyés ©Lafarge France

 

Amélioration du processus de fabrication du ciment

 

Jusqu’au début du 20e siècle, on ne savait transporter la farine (le cru broyé) qu’en la mélangeant avec de l’eau qu’il fallait éliminer avant cuisson. Le rendement énergétique était assez faible.

 

Le passage à la voie semi-humide puis sèche avec le transport de la farine par air a permis d’améliorer considérablement ce bilan thermique. Une meilleure compréhension de physique de la combustion a également permis un meilleur rendement thermique.

 

Les innovations ont aussi concerné le broyage avec des broyeurs qui vont écraser la matière plus finement et plus rapidement grâce à de nouvelles techniques de fragmentation (broyeur à rouleaux). Cette technologie va de paire avec le développement des cyclones permettant de séparer, grâce à un courant d’air tournant, les fines des autres particules.

 

La compréhension de la chimie du clinker était primordiale mais il a fallu attendre la fin du 20e siècle pour comprendre les phénomènes de « prise » du ciment dû à la cristallisation des silicates de calcium hydratés, de durcissement lié à l’enchevêtrement des points de contact entre ces cristaux et à l’agencement des vides entre eux permettant l’acquisition de la résistance et de la durabilité.

 

Vers des ciments bas carbone ?

 

Les ciments bas carbone constituent les ciments de demain. Parmi ceux-ci, les ciments sulfo-alumineux (Aether de Lafarge, Alpenat-Up de Vicat). Leur grand intérêt est qu’ils n’ont pas besoin d’être cuits à 1 450 °, 1 100 ° suffisent. La réduction de leur impact environnemental est automatique avec un bilan thermique réduit de 20 à 40 % selon leur composition.

 

Un projet européen ECO-Binder a été mis en place, visant à mettre en œuvre ces sulfo-alumineux issus des activités R&D du secteur industriel (actuellement produits par 4 cimentiers) dans des pièces préfabriquées à l’échelle 1 et de les soumettre à différents environnements agressifs. Il existe un véritable engouement pour ces ciments car ils ouvrent à une diversité de composition, donc de propriétés, bien supérieure aux ciments Portland.

 

Cette nouvelle génération de produits de construction à base de béton ainsi que les composants préfabriqués de l'enveloppe du bâtiment pourraient permettre une réduction de l’empreinte carbone de 30%, une amélioration des performances isolantes de 20% et une réduction de coût de 15% comparativement à la solution traditionnelle à base de ciment Portland.

 

 

Présentation projet ECO-Binder au salon Bau ©DR

 

Deux nouveaux ciments normés

 

Comme l’ont démontré les recherches, les cristaux de Portland intègrent de l’eau dans leur structure. Aussi, l’idée des laboratoires de R&D est d’intégrer non plus de l’eau mais du CO2, en application de la notion de puits de carbone (sorte de réservoir pour le carbone de l'atmosphère). Plusieurs essais ont été faits pour une nouvelle composition de ciments intégrant dans leurs cristaux, leurs briques élémentaires, du CO2.

 

Alors que ces ciments restent au niveau de la recherche non appliquée et que la recherche sur les sulfo-alumineux est au stade de la description à la fois de sa composition mais aussi des combinaisons clinker/ajouts, donc de ses propriétés et durabilité, deux nouveaux ciments normés sont en attente de publication.

 

Un CEM II C composé de 50 à 64% de clinker de ciment Portland et un CEM VI ternaire, c’est-à-dire un ciment composé de 35 à 49% (<50 %) de clinker de ciment Portland avec deux ajouts [Calcaire + Laitier] ou [Calcaire+ Cendre ou Pouzzolane]. Ces deux ciments ont été intégrés dans la version révisée de la norme ciment EN 197-1 qui est en attente de la révision du Mandat de normalisation pour envoi au vote formel.




Source : batirama.com / Corinne Bailly

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