Représentativité : les vrais chiffres de la FFB et de la Capeb

Représentativité : les vrais chiffres de la FFB et de la Capeb

Les chiffres de la représentativité patronale ont été publiés pour la première fois. Quels enseignements peut-on tirer dans le bâtiment ?




Le rapport de force entre la FFB et la Capeb sera-t-il modifié après la publication des chiffres de la représentativité ?

 

Jusqu’à maintenant, personne n’était capable de dire précisément combien d’adhérents comptaient la FFB, la Capeb et la Fédération des Scop BTP, les trois principales organisations patronales dans le bâtiment.

 

De manière empirique, elles se reconnaissaient mutuellement le droit d’être à la table des négociations, selon le principe : les organisations qui sont légitimes pour négocier sont celles qui s’accordent pour se reconnaître réciproquement la qualité d’interlocuteur. Cette époque est révolue.

 

Un cadre juridique

 

Avec la réforme de la représentativité patronale, issue de la loi du 5 mars 2014, et à partir du 1er janvier 2017, un cadre juridique fixe les modalités de calcul de l’audience.



Cette mesure de l’audience effectuée au niveau national interprofessionnel (Medef, Cpme, U2P…) et au niveau des branches (bâtiment…), est un critère déterminant de la représentativité et s’effectue tous les quatre ans.

 

Conditions pour être représentatives



Au niveau de la branche, seules sont représentatives les organisations patronales

  •  qui satisfont aux critères suivants : respect des valeurs républicaines, indépendance, transparence financière, ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation et influence ;
  • qui disposent d’une implantation territoriale équilibrée au sein de la branche ;
  • qui réunissent un nombre d’entreprises, à jour de leur cotisation, représentant  au moins 8% des entreprises adhérant à l’ensemble des organisations professionnelles d’employeurs de la branche ou  au moins 8%  de l'ensemble des salariés employés de ces mêmes entreprises.

 

Le 26 avril, la Direction générale du travail (DGT) et le Haut Conseil du dialogue social (HCDS) ont dévoilé l’audience des organisations d’employeurs.

 

Les résultats : un match à 2



 

Nombre d’entreprises

Dont avec salariés

Dont sans salariés

Nombre de salariés

Audience entreprises

Audience salariés

 

Entreprises jusqu’à 10 salariés

Capeb

53 304

34 661

18 643

114 661

64,50%

49,51%

FFB

29 123

25 514

3 609

115 696

35,24%

49,96%

Fédération des SCOP BTP

216

212

 

4

1 217

0,26%

0,53%

 

Entreprises de plus de 10 salariés

Capeb

3 157

3 157

-

55 382

19,33%

9,38%

FFB

13 021

13 021

-

528 151

79,75%

89,47%

Fédération des SCOP BTP

150

150

-

6 765

0,92%

1,15%

 

Source HCDS /ministère du Travail

 

 

 

Nombre d’entreprises (toutes tailles confondues)

Dont entreprises sans salariés

Nombre salariés

Capeb

56 461

18 643

170 043

FFB

42 144

3 609

643 847

Total

98 604

22 252

813 890

Entreprises du bâtiment en France en 2015

Plus de 400 000

 

Plus d’1 million

 

Les résultats de la représentativité par branche sont riches d’enseignements. Seules la FFB et la Capeb sont représentatives, la Fédération des Scop du BTP n’ayant pas franchi le seuil de représentativité de 8%.

 

FFB et Capeb reconnues représentatives de l’ensemble des entreprises du bâtiment

 

Sans surprise, la FFB est en première position quand le critère retenu est le nombre de salariés, elle représente 90,5% des salariés des entreprises de plus de 10 et 50,22% des salariés des entreprises jusqu’à 10, adhérentes aux deux organisations représentatives. 

 

La Capeb représente, quant à elle, 24,04% des salariés des entreprises de plus de 10 salariés et 49,77% des salariés des entreprises de moins de 10.

 

Cependant, un autre critère permet d’apprécier le poids des protagonistes : le nombre d’entreprises adhérentes. Et là, c’est la Capeb qui arrive en tête avec 56 461 entreprises toutes tailles, contre 42 144 pour la FFB.

 

C’est encore elle qui tient la corde pour les entreprises de moins de 10 salariés, elle représente 64,66% des entreprises adhérentes aux deux organisations, contre 35,33% pour la FFB. A l’inverse, cette dernière est nettement en tête sur les entreprises de plus de 10 salariés : 80,48% contre 19,51% pour la Capeb.

 

Transparence

 

Compte tenu de ces résultats, la FFB est confirmée comme première organisation d’employeurs du bâtiment et la Capeb reconnue comme première organisation patronale par le nombre d’adhérents.

 

Cette dernière est par ailleurs représentative de l’ensemble des entreprises du bâtiment, quelle que soit leur taille, plus ou moins de 10 salariés. Une grande première pour la confédération qui, avant, ne pouvait participer qu’aux négociations de la seule catégorie des entreprises artisanales.



« Je suis très fier de cette reconnaissance qui vient récompenser le travail mené sans relâche depuis des années par ses représentants chefs d’entreprise élus », se réjouit Patrick Liébus, son président, qui regrette toutefois que la mesure de représentativité des organisations patronales ne repose pas uniquement sur le nombre d’entreprises qu’elles représentent, comme le prévoyait à l’origine la loi du 5 mars 2014.

 

Pour autant, les présidents de la FFB et de la Capeb voient dans cette nouvelle mesure de l’audience qui oblige à démontrer sa représentativité une qualité de clarté et de transparence, « la fin de l’auto-proclamation » pour le premier et « remettre l’église au milieu du village » pour le second.

 

La représentativité : pour quoi faire

 

Si cette mesure de la représentativité a le mérite de donner une photographie du paysage syndical patronal du bâtiment et de suivre son évolution, elle a surtout vocation à déterminer quel organisme peut s’asseoir à la table des négociations, signer des accords de branche, les proposer à l’extension, siéger dans les différentes instances décisionnaires et dans les instances publiques.



Mais l’audience permet aussi de déterminer quelle organisation professionnelle peut s’opposer à l’extension d’un accord collectif (environ 80% des accords font l'objet d'une extension). Le critère retenu est d’employer plus de 50% de l’ensemble des salariés des entreprises adhérant aux organisations professionnelles d’employeurs reconnues.

 

Droit d’opposition pour la FFB

 

Seule la FFB remplit ces conditions, elle dispose donc d’un droit de veto.

 

« La FFB sera en capacité d’étendre ou non des accords sociaux de branche, dans les TPE et PME, se réjouit Jacques Chanut. « Cela évitera les petits accords entre amis dans les couloirs. Pas de « combinazione », pas de jeu d’appareils, on revient à un dialogue social plus serein ».

 

Quel poids dans les instances ?

 

Selon les nouvelles règles, le nombre de voix dont disposent les organisations professionnelles siégeant dans les instances de la branche est proportionnel à leur audience. Cette audience est calculée pour 30% sur le nombre d’entreprises qui leur sont adhérentes et pour 70% sur le nombre de salariés employés par ces entreprises.

 

La base du poids en termes de représentativité serait de 71% pour la FFB et 29% pour la Capeb. Des chiffres à mettre au conditionnel, en attendant la publication prochaine par le ministère du Travail de la liste des organisations professionnelles représentatives.



« Cela ne devrait pas changer grand-chose au niveau des sièges pour la Capeb, mais plutôt au niveau des subventions, qui pourraient être un peu plus importantes », pronostique Patrick Liébus.

 

Financement pour le dialogue social



Justement, l'instauration d'une représentativité patronale a également une incidence au niveau du financement des organisations professionnelles d’employeurs pour le dialogue social.

 

Géré par l’Association de gestion du fonds paritaire national (AGFPN),  le fonds est alimenté par une contribution des entreprises à hauteur de 0,016% de la masse salariale, collectée par les Urssaf comme les autres cotisations sociales et d’une subvention de l’Etat.

 

En 2015, son montant s’est élevé à près de 115 millions d’euros. La Capeb a perçu 311 415 € et la FF,  395 000 € ; sommes servant au remboursement de frais des participants aux réunions paritaires tenues dans le champ de la formation. Elles arrivent loin derrière l’UIMM dans la métallurgie qui a reçu plus de 1,9 million d'euros ou encore la fédération du commerce et de la distribution avec ses 607 000 €.



Désormais et selon la loi du 8 août 2016, les fonds seront répartis en fonction de l’audience de chacune des organisations représentatives ; soit 50% du nombre des salariés des entreprises adhérentes et 50% du nombre d'entreprises adhérentes contributrices au fonds. Seules les entreprises employant des salariés sont prises en compte.

 

La FFB milite pour supprimer le financement public

 

La question du financement des organisations professionnelles patronales avait d’ailleurs été soulevée en 2016 par le président de la FFB qui s’était élevé contre les subventions de l’Etat et les prélèvements obligatoires (depuis 2015, cotisation de 0,016% pour les entreprises, à laquelle s’ajoute une cotisation de 0,15% pour les artisans).

 

« On veut zéro financement public  et vivre uniquement des cotisations des adhérents, insiste Jacques Chanut. Il faut que les organisations professionnelles patronales soient le vrai reflet des entrepreneurs qui payent leur cotisation. Il faut se recentrer sur l’essentiel : les besoins de nos adhérents et que l’organisation professionnelle soit un véritable syndicat de services. A la FFB, les cotisations des adhésions représentent plus de 98,5% de son budget. Ce qui nous assure une indépendance ; indépendance demandée par les entreprises ».



La position est différente à la Capeb. « Cette mission qui nous est confiée au service de l’ensemble des entreprises doit être rémunérée car il faut les moyens pour bien travailler », argumente Patrick Liébus. « Par contre, il est indispensable que les entreprises sachent à quoi sert cette subvention. Dès qu’il y a transparence, cela me convient ».

 

Le syndicalisme en question

 

A l’heure où le syndicalisme (salarial et patronal) fait moins recette, que doivent faire les organisations professionnelles pour survivre ? « Si on perd des adhérents, c’est qu’ils ne sont pas contents et que l’utilité de l’organisation est remise en cause, alors il faut revoir le modèle, réplique sans hésitation Jacques Chanut. En période de crise, le niveau des cotisations, basées sur la masse salariale, a baissé, alors, à l’instar des entreprises, on mutualise, on restructure ».



L’idée est sensiblement la même du côté de la Capeb, dont les ressources proviennent à 70% des adhérents. Patrick Liébus voit dans cette désaffection envers les organisations syndicales plusieurs raisons : « le papy-boom, les problèmes financiers des artisans dus à la crise et le régime de la micro-entreprise qui a désorganisé le rapport avec l’entreprise classique ».

 

« Il faut évidemment trouver les raisons à cette démobilisation, nous les connaissons, mais surtout trouver des solutions pour inciter à l’adhésion. Qu’est-ce que nous devons apporter ? Comment être utile ? C’est une remise en question permanente de notre organisation »,  estime-t-il.

 

Quelle urgence ?

 

Pour autant Jacques Chanut revient à ce qu’il estime être essentiel, laissant de côté le jeu des chiffres. « La représentativité reconnue entraîne la légitimité, ce qui est d’autant plus important au moment où nous allons engager des discussions avec un nouvel Exécutif et que les négociations seront renvoyées au niveau de la branche.

 

L’urgent, c’est d’avoir des organisations fiables face aux nouveaux gouvernement et parlement. Dans ce moment charnière pour le pays et à l’heure où le bâtiment reprend des couleurs, je souhaite travailler main dans la main avec la Capeb », conclut le président de la FFB.



Un objectif partagé par Patrick Liébus : « Certes, il y aura toujours des divergences entre nous et c’est normal, mais l’important est de travailler ensemble et de définir en commun des orientations dans l’intérêt de la branche et des entreprises et artisans ». Le président de la Capeb reconnaît aussi qu’avec l’arrivée d’un nouveau gouvernement, la branche doit être unie et très forte pour faire entendre sa voix ». Il préconise même des rencontres régulières avec la FFB.

 

Alors concurrents sur le terrain, certes, mais, avec une vision commune affirmée des intérêts de la branche pour mieux les défendre... mais aussi les préserver.

 


Source : batirama.com / Frédérique Vergne

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