Les pompes à chaleur qui utilisent l’eau, l’air comme réfrigérant, ou sans fluide du tout

Mirai utilise l’air comme réfrigérant pour produire du froid à très basse température et de la chaleur. © PP

Les progrès techniques des pompes à chaleur stagnent. Les deux dernières ruptures technologiques (l'inverter et les échangeurs à microcanaux) ont plus de 20 ans. Voici trois exemples de technologies alternatives.




Lors de sa visite de l’usine de pompes à chaleur Intuis de Feuquières-en-Vimeu, Bruno Le Maire a annoncé un plan en huit points pour produire un million de pompes à chaleur en France. Le point 4 de ce plan consiste à "Stimuler l’innovation pour développer en France des pompes à chaleur aux plus hauts standards écologiques de demain", grâce à des incitations financières issues du Plan France 2030. Nous avons quelques idées à proposer. Voici cinq idées de "pompes à chaleur au plus hauts standards écologiques de demain". Seulement trois sont françaises, mais plusieurs s’adressent à l’industrie, autre point du plan présenté par Bruno Le Maire.

 

 

 

Utiliser l’eau ou l’air comme fluide réfrigérant

La dernière version du Règlement Européen F-Gaz sévérise et accélère le retrait des fluides HFC du marché européen. Pour les pompes à chaleur domestiques, il ne reste plus guère que le R290 comme fluide d’avenir. Il possède un très faible GWP (égal à 3), mais il est classé A3 : franchement inflammable. Ce qui restreint ses possibilités d’installation.

Deux fabricants ont eu d’autres idées et utilisent l’eau comme fluide réfrigérant.

 

L’entreprise allemande Efficient Energy avait développé le eChiller45, un groupe de production d’eau glacée qui utilisait l’eau – R718 dans la nomenclature Ashrae – comme fluide réfrigérant. L’entreprise a fait faillite et ses brevets et actifs ont été repris en septembre 2023 par Vertiv, un groupe italien spécialisé dans la construction et la gestion des infrastructures de data centers. Vertiv entend utiliser la technologie de Efficient Energy pour développer une offre de refroidissement de data centers. © PP

 

 

 

 

De son côté, le groupe Johnson Controls développe à Carquefou, près de Nantes, une gamme de chillers utilisant l’eau comme fluide réfrigérant.

Créé en Suisse en 2015 et installé en République Tchèque, Mirai développe, quant à lui, des systèmes thermodynamiques utilisant l’air comme fluide. L’entreprise propose deux technologies : le cycle ouvert ou le cycle fermé. Dans la version boucle ouverte, l’air refroidi à très basse température est introduit directement dans l’espace à refroidir, une chambre froide, par exemple. L’air est réchauffé par compression, puis refroidi par une série d’échangeurs de chaleur et enfin détendu pour atteindre des températures jusqu’à - 160 °C.

 

 

Mirai propose trois machines à cycle ouvert : Mirai Cold 10 avec 4,9 kW de puissance froid et de l’air refroidi entre - 60 °C et -  110 °C, Mirai Cold 15 (9,6 kW, - 40 à - 110 °C) et Mirai Cold 22 (13,6 kW, - 40 à - 110 °C). La maintenance de ces machines est extrêmement réduite : pas de fluide à changer, pas d’huile, etc. © PP

 

 

Dans le cas d’un cycle fermé, un échangeur air/fluide est ajouté en aval du circuit. La température du fluide peut atteindre - 95 °C. Mirai propose quatre nouvelles machines à boucle fermée :

– Mirai Cold 10 T (4,9 kW et une température de fluide allant de - 40 à - 95 °C),

– Mirai Cold 15 T (9,5 kW, - 40 à - 95 °C),

– Mirai Cold 23 T (15,7 kW, - 40 à 95 °C),

– et Mirai Cold 80 T (80 kW, - 40 à 95 °C).

Les solutions de Efficient Energy, de Johnson Controls et de Mirai utilisent des fluides exotiques, l’eau et l’air. D’autres fabricants développent des solutions sans fluide du tout.

 

 

 

La pompe à chaleur acoustique d’Equium

Le français Equium développe une pompe à chaleur acoustique. Des ondes acoustiques sont diffusées et amplifiées dans une chambre remplie d’hélium. Elles compriment et détendent l’hélium, produisant ainsi de la chaleur ou du froid. Ce qui, selon Equium, permet de réaliser un pompage de chaleur ultra-efficace, sans pièce mobile et sans gaz réfrigérant à effet de serre.

 

Equium développe le cœur de la pac acoustique, puis s’associe à des acteurs de la pac, qui habillent ce cœur en une machine complète et proposent une offre écologique et économique et simple à installer. Arkteos, un fabricant de pompes à chaleur installé à Guérande, devrait industrialiser les pacs acoustiques. © PP

 

 

Cédric François a fondé Equium en 2017 pour développer des pompes à chaleur thermoacoustiques "scalable". Cette technologie est parfaitement capable de produire des températures de départ d’eau élevées. © PP

 

 

Plusieurs pac thermoacoustiques seront en field test fin 2024, dans des maisons construites par Bouygues Immobilier à Montreuil-Vignier, près d’Angers. Dans le même temps, chez des bailleurs sociaux, des machines seront utilisées pour la réhausse de température sur une production d’ECS solaire existante, avec un COP de 6. La pac thermoacoustique est disponible maintenant en 6 kW thermique pour 2,3 kW électriques absorbés. C’est une pompe à chaleur sans compresseur, sans gaz frigorigène, sans bruit, avec peu de maintenance et un coefficient de performance énergétique (COP) saisonnier élevé. Elle est dépourvue d’inverter, mais embarque un peu d’électronique de puissance pour réguler le son en monofréquence. L’an prochain, Equium produira un cœur de 10 kW de puissance restituée et s’attèlera, avec des partenaires, à produire des racks embarquant plusieurs machines cascadables.

 

 

 

La machine à moteur Stirling de AIRTHIUM

De son côté, le français AIRTHIUM, fondé en 2016 et installé dans l’Essonne, transforme la technologie du moteur Stirling pour produire des pompes à chaleur reposant sur le cycle d’Ericsson et utilisant l’hélium dans son moteur.

 

Cette pompe à chaleur, selon AIRTHIUM peut atteindre 550 °C de température avec des COP de l’ordre de 3,5. La source chaude de la pac peut être l’air extérieur jusqu’à des températures de - 50 °C ou de la chaleur fatale jusqu’à 500 °C. © AIRTHIUM

 

 

Selon la température de sortie, la pac AIRTHIUM utilise différents fluides de transfert : sels fondus de 200 à 550 °C, huiles thermiques de - 20 °C à + 250 °C. En mai 2023, AIRTHIUM a singé un MoU (Memorandum of Understanding) avec McCain, l’un des principaux fabricants de frites au monde, pour déployer sa solution dans une usine McCain.

 

 

 

L’effet Peltier de Halton

Deux entreprises, Halton et Phononic, ont développé une solution de climatisation sans fluide, sans eau, reposant sur l’effet Peltier, à destination des bâtiments tertiaires.

En 1834, le physicien français Jean-Charles Peltier a découvert l’effet thermoélectrique qui porte son nom : un déplacement de chaleur en présence d’un courant électrique reliant des matériaux conducteurs de nature différente liés par des contacts, l’un des contacts se réchauffe, tandis que l’autre se refroidit. Phononic, une entreprise américaine spécialiste du rafraîchissement "solid state" a raffiné le processus.

 

Phononic a mis au point des semi-conducteurs, portant deux faces en céramique de nature différente qui agissent comme échangeurs de chaleur. © PP

 

 

Halton, une société familiale finlandaise, spécialisée dans le traitement d’air, la ventilation, le chauffage et la climatisation s’est emparée de l’invention de Phononic, avec l’aide du français Dominique Bense, pour concevoir et produire le TTAP : un module terminal de traitement d’air qui extrait l’air de la pièce où il se trouve, le remplace par un flux tout air neuf chauffé ou rafraîchi. Il contient un ou plusieurs modules Peltier développés par Phononic, ainsi que des échangeurs entre l’air et ces modules.

 

 

Le 7 décembre, Halton et Phononic ont présenté la première installation de TTAP : 380 caissons installés dans un bâtiment haussmannien rénové par Balzac, rue Pierre Charron à Paris. L’installation disposera d’une capacité de chauffage et de rafraîchissement de plus de 150 kW. © PP

 

 

 

 

Le fonctionnement de chaque TTAP est parfaitement autonome et basé sur la demande. Chaque terminal peut fonctionner en mode chauffage ou rafraîchissement sans activer les autres TTAP. Un TTAP fonctionne en débit d’air constant ou variable. Il est possible d’ajouter ou de retirer des unités de manière simple : seule une alimentation électrique est nécessaire. © Phononic

 

 

Voilà, c’est un petit tour de solutions thermodynamiques très innovantes, certaines encore en développement, d’autres déjà disponibles.




Source : batirama.com / Pascal Poggi 

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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