Le solaire thermique entre crise... et relance indispensable

Le solaire thermique entre crise... et relance indispensable

Produire de la chaleur grâce à l’énergie solaire – thermique ou photovoltaïque - en déplaçant les énergies fossiles sera indispensable pour atteindre le BEPOS




Au salon Intersolar 2017 qui s’est tenu à Munich du 30 mai au 2 juin, le solaire thermique était encore une fois le parent pauvre. La prospérité du marché du solaire thermique est liée au prix des énergies fossiles.

 

Il se développe lorsque le prix du pétrole monte et s’effondre lorsque le baril baisse. Après avoir frôlé 120 $/baril début 2014, le prix du pétrole a chuté brutalement jusqu’à moins de 40 $/baril mi-2015. Depuis, il a légèrement remonté, mais se maintient en dessous de 60 $/baril.

 

 

 

Ovum, un industriel autrichien, a conçu plusieurs systèmes qui combinent pompes à chaleur, stockage d’eau et photovoltaïque pour couvrir de manière autonome 75% des besoins annuels de chaleur dans une maison individuelle. ©PP

 

Une impulsion règlementaire

 

Du coup, le marché de la chaudière fioul revit, mais celui du solaire thermique accuse une faiblesse durable. Pourtant, tout espoir n’est pas perdu. Une impulsion règlementaire va remplacer l’intérêt financier à court terme.

 

Nous sommes en effet à la veille de l’entrée en vigueur des dispositions de la Directive européenne sur l’Efficacité Energétique des Bâtiments. Elle demande que les bâtiments neufs soient « Net-zero Energy » à partir de 2018 pour les bâtiments publics, de 2020 pour tous les bâtiments.

 

En France, net-zero energy se tréduit par Bepos (Bâtiments à Energie POSitive). S'y est ajouté le Label E+C- pour que maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre, bureaux d’études et entreprises puissent s’entraîner avant 2020. Tous les bâtiments gros consommateurs d’eau chaude sanitaire, depuis les maisons individuelles jusqu’à l’hôtellerie, en passant par tout le logement collectif et les divers bâtiments d’hébergement, auront avantage à adopter des solutions solaires thermiques.

 

 

 

Associer production photovoltaïque et production d’eau chaude sanitaire thermodynamique ou directement par effet Joule est devenu courant. A Intersolar 2017, une bonne dizaine d’exposants proposaient diverses solutions de ce type. ©PP

 

Intégration photovoltaïque

 

A Intersolar 2017, une vingtaine d’industriels, des petits et des gros, des nouveaux et d’autres installés depuis longtemps, proposaient de nouvelles idées pour maintenir et relancer les applications thermiques de l’énergie solaire. La première grande tendance observable consiste à utiliser l’électricité photovoltaïque pour chauffer de l’eau de manière à maximiser l’autoconsommation.

 

Ovum Heiztechnik GmbH proposait par exemple une étroite intégration de tous les composants clefs pour le confort d’une maison : pompe à chaleur pour le chauffage basse température et pour le rafraîchissement actif, ballons thermodynamiques pour la production d’ECS, panneaux photovoltaïques, onduleur, automate de pilotage qui dirige l’électricité photovoltaïque d’abord vers les équipements du logement.

 

Le but est d’utiliser au maximum l’énergie photovoltaïque produite sur site ; grâce à une architecture hydraulique et à pilotage spécifiques. Les ballons thermodynamiques sont mixtes : leur condenseur fonctionne sur l’air extrait en été et sur le retour du chauffage en hiver. Les pac Ovum sont soit géothermiques (3 et 9,5 kW), soit air/eau (7 modèles de 10 à 35 kW).

 

Solutions Ovum pour les maisons neuves

 

Pour les maisons neuves à faibles besoins d’énergie, Ovum propose aussi Thermotresor, une pac avec un stockage en eau morte de 470 l, assurant chauffage, rafraîchissement et production d’ECS. La production d’ECS s’effectue de manière instantanée jusqu’à 50°C grâce à un échangeur à plaques.

 

Cet appareil est couplé à un caisson de ventilation double-flux pourvu d’une batterie eau/air et à un plancher chauffant. Il les alimente en eau chaude ou en eau glacée selon la saison. L’ensemble est piloté par un automate relié à l’onduleur PV.

 

Ovum revendique un SCOP de 5,33 pour son générateur multifonctions Thermotresor, un stockage de 20 kWh de chaleur en combinant plancher chauffant et ballon d’eau morte. Et même la couverture autonome de 75% des besoins de chaleur dans l’année grâce au couplage avec une installation photovoltaïque.

 

 

 

Axiotherm a développé des galets en polyéthylène contenant des matières à changement de phase (PCM, Phase-Changing Material). Il les utilise pour le stockage de chaleur ou de fraîcheur dans des applications de production d’ECS et de ventilation double flux. ©PP

 

Les matériaux à changement de phase

 

Autre tendance à Intersolar 2017, le développement des matériaux à changement de phase pour maximiser le rendement des installations solaires thermiques. L’une des limitations du solaire est son intermittence. D’où l’idée souvent mise en avant de stocker la chaleur lorsqu’elle est disponible pour s’en servir quelques heures, quelques jours ou quelques mois plus tard.

 

En ce qui concerne le stockage de chaleur annuel, pour l’instant, il n’existe pas vraiment d’autres solutions disponibles sur le marché que l’emploi de très grands réservoirs d’eau que l’on chauffe l’été et que l’on utilise ensuite l’hiver durant pour la production d’ECS et le chauffage. L’ingénieur suisse Jenni et son entreprise Jenni Solar Energietechnik AG sont les spécialistes de cet exercice.

 

Nouvelles applications pour les produits à changement de phase

 

A Intersolar 2017, l'accent s'est plutôt porté sur les nouvelles applications des produits à changement de phase (PCM). Ils se liquéfient pour absorber de la chaleur et se solidifient en la restituant.

 

Pour des applications en bâtiment, la clef est la température de liquéfaction. L’allemand Axiotherm a développé toute une gamme de PCM, dont les températures de liquéfaction s’étendent de -40 à +80°C.

 

xiotherm est capable de concevoir un PCM répondant à un besoin spécifique. Pour le rafraîchissement, il recommande des matières dont la température de liquéfaction varie de 5 à 20°C, tandis que le stockage de chaleur solaire est mieux servi par des PCM dont la liquéfaction intervient entre 30 et 42°C, …

 

 

 

Viessmann n’abandonne pas le solaire thermique et continue de développer de nouveaux capteurs sous vide plus efficaces et permettant d’atteindre des températures plus élevées. Ce qui facilité l’installation – immobilisant une surface moindre à puissance égale – et élargit les applications du solaire thermique à l’industrie. ©PP

 

Une application à la ventilation

 

Le but d’Axiotherm n’est pas de fabriquer des systèmes utilisant les PCM : pour amorcer l’intérêt des clients prospectifs, il a tout de même développé les Axiotherm HeatPlates afin de mettre en évidence l’intérêt des PCM dans le bâtiment. Ce sont des galets de 235 x 175 x 6 mm, d’une surface de 910 cm², contenant 140 cm3 de PCM.

 

Un galet possède une capacité de stockage de chaleur de 6 à 12 Wh, pour des applications de -5 à +30°C selon le PCM qu’il contient. A Intersolar, Axiotherm montrait une application en ventilation avec échangeur air/air. Il contient 3 x 62 HeatPlates, pèse 50 kg et, à un débit d’air de 100 à 200 m3/heure, peut accumuler 2,2 kWh de chaleur à des températures comprises entre 20 et 40°C, avec une puissance instantanée de 200 à 500 W.

 

Axiotherm propose de l’associer à des caissons double-flux équipés d’un double bypass intelligent, de manière à maximiser le stockage de chaleur, la restitution et le confort accru qui en résulte. Axiotherm proposait aussi d’accroître la capacité des stockages solaires en eau morte en immergeant tout simplement des HeatSel, une variante de HeatPlates contenant 335 cm3 de PCM, dans des ballons.

 

Selon les applications, le PCM contenu dans les HeatSel peut être composé pour une température de liquéfaction de -20 à +80°C : ce qui permet de l’utiliser soit en stockage de froid, soit en stockage de chaleur. Selon Axiotherm, chaque HeatSel stocke 13 à 25 Wh. A volume égal, un ballon eau + HeatSel (1,1 HeatSel/litre) stocke 3 fois plus d’énergie qu’un ballon contenant seulement de l’eau.

 

 

 

Dans les collecteurs Vitosol 300-TM et 200-TM de Viessmann, le revêtement cristallin de l’absorbeur agit contre la surchauffe. C’est une protection simple et efficace qui simplifie les installations – pas de drainback – et fiabilise leur fonctionnement en évitant les surchauffes. Grâce à sa conception, le capteur solaire Vitosol 300-TM peut être installé horizontalement, verticalement ou sur des toitures inclinées. ©PP

 

Améliorer les capteurs solaires thermiques

 

L’un des reproches que l’on adresse fréquemment aux installations solaires thermiques est la difficulté du dimensionnement. Pour maximiser l’emploi de l’énergie solaire thermique, il faudrait pouvoir couvrir le plus de besoins annuels possibles. Ce qui conduit à un dimensionnement trop important en cas de faible usage temporaire et de forte chaleur et expose les capteurs à un risque important de surchauffe qui raccourcit leur durée de vie.

 

Viessmann montrait à Intersolar sa nouvelle solution ThermProtect. Appliquée désormais à tous ses collecteurs – collecteurs plans et collecteurs tubulaires sous vide -, elle protège contre les risques de surchauffe. ThermProtec coupe les collecteurs dès qu’ils atteignent une température prédéterminée.

 

Un absorbeur cristallin régule l’apport d’énergie. A partir d’une température surfacique de 75°C, la structure de ce revêtement se modifie et rejette plus de chaleur qu’elle n’en absorbe. La hausse de température du fluide est réduite et évite sa vaporisation.

 

 

 

Simple et efficace, le chauffe-eau solaire fonctionnant par thermosiphon, sans l’assistance d’un circulateur entre les capteurs et le ballon, constitue une solution fiable et peu coûteuse, notamment en maison individuelle. Il s’installe au sol, sur un toit plat ou en pente. ©PP

 

 

 

Viessmann est également l’un des pionniers de l’intégration des systèmes pour maximiser l’autoconsommation de l’énergie solaire thermique et photovoltaïque produite sur site. A Intersolar 2017, l’entreprise montrait l’association de capteurs thermiques, photovoltaïques, d’une pompe à chaleur et d’un stockage d’électricité. Sans le dire ouvertement, Viessmann s’achemine vers des solutions d’autonomie énergétique, au moins en maison individuelle. ©PP

 

 

L'allemand Narva est un spécialiste des installations solaires thermiques de grande puissance. En Autriche, il a participé à des installations où trois rangées de capteurs solaires tubulaires sous vide sont montées sur un trackeur à deux axes, afin de maximiser le rendement. Ces trackeurs thermiques alimentent un réseau de chauffage urbain. ©PP

 

 

Solarus, un hollandais, était le seul exposant à mettre en avant les possibilités du solaire thermique en froid et rafraîchissement. Ses capteurs peuvent fournir une températrure de 50 à 70°C. Ce qui suffit, selon lui, pour amorceer et entretenir une réaction d'adsorption ou d'aborption capables de produire de l'eau glacée.  ©PP

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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