Le Congrès National du Bâtiment Durable, cohésion et fragilité

Réunis à Lille Grand Palais les 4 et 5 septembre, sous l’égide de CD2E, les entités régionales du Réseau Bâtiment Durable montrent une image fédérée dans un contexte politique qui les affectent toutes.

S’il y a une chose à laquelle le Plan Bâtiment Durable – lancé en 2009, dirigé depuis par l’avocat Philippe Pelletier et soutenu par l’ADEME – a contribué, c’est d’avoir rempli la carte des acteurs régionaux du Réseau Bâtiment Durable. Pour ce faire, on s’est appuyé sur des entités régionales indépendantes, le BDM du PACA, Odéys en Nouvelle-Aquitaine, et justement le CD2E dans les Hauts-de-France, qui a réussi la prouesse de rassembler 150 exposants pour l’édition 11 à Lille Grand Palais, tout en proposant un congrès conçu avec un souci de fraîcheur dans la conception.

 

 

 

Une démarche originale

Même si les noms des entités (Envirobat, Ekopolis, …) se télescopent et que le sigle CNBD (Congrès National Bâtiment Durable) est peu connu, cela fait déjà un certain nombre d’année qu’il est possible partout en France, et aussi dans les DOM-TOM, de soumettre un projet de construction à une démarche alternative originale. Améliorer le projet notamment par des réunions publiques, afin de décrocher des médailles bronze, argent ou or. À noter que le réseau travaille en partenariat avec l’Alliance HQE et Effinergie (mais pas BBCA).

 

Edwood présente son nouvel atelier au coin pitchs de l'espace d'exposition, Ephémère Square faisant la démonstration d'une prise en charge complète des différents besoins pour ce type d'événements. Avec Wall Up Préfa, Ephémère Square est sans doute la révélation du Canopée Challenge de Xylofutur qui s'est le mieux épanouie. © Jonas Tophoven

 

 

L’écologie sur la sellette

Les coupures régionales politiques de l’AURA et des Pays de la Loire ont montré une fragilité de ces entités au même titre que pour les interprofessions régionales FiBois, avec actuellement le couperet d’une remise en cause de l’ADEME et de la lutte contre le changement climatique au profit de "l’adaptation". Mais c’est justement quand les organismes révèlent leur fragilité qu’ils font le mieux ressortir leur utilité.

En Île-de-France, Ekopolis se démène en faisant le grand écart entre une région du camp de ceux qui remettent actuellement en cause l’ADEME, et un président, Jacques Baudrier, adjoint au maire de Paris, communiste, de plus en plus investi dans la construction. Le Plan Bâtiment Durable, ça ronronne ou bien on n’a pas accès à tout son travail occulte dans les hautes sphères du pouvoir. Les Ekopolis et Cie, ça bouillonne.

 

Fiboo, nouvel acteur de l'isolation biosourcée, appuyé par un groupe familial conséquent. © Jonas Tophoven

 

 

Les Hauts-de-France, cluster européens des biomatériaux

À Lille, CD2E avait déjà considérablement contribué au succès de l’édition 2023 de Forum International Bois Construction. Sa démarche de stimulation de l’industrie biosourcée en fait presque un acteur national, ou pour le moins un modèle d’efficacité. Ce n’est pas un hasard si on trouve, parmi les exposants du CNBD de Lille, des acteurs comme Batilin, . Mais aussi des acteurs pionniers du réemploi comme Métisse ou Rewood, et un environnement alternatif dans le bois, partant de nouvelles scieries et passant par des spécialistes de la commercialisation locale pour aller jusqu’à la conception de façades et justement la fin de vie.

Le Forum Bois Construction de Lille, en 2023, c’était la découverte d’une région qui ne dispose pas de beaucoup de ressources en bois sur le papier (un peu comme les Pays de la Loire), mais qui est en pointe sur le biosourcé et les nouvelles approches sociales. Même effet en 2025.

 

Forêt Vivante, dans l'Aisne, une nouvelle scierie qui change le monde de la première transformation avec une proximité assumée vers la foresterie durable et les architectes de la nouvelle archtecture climatique. © Jonas Tophoven

 

 

Un CNBD avec une première mondiale

Le CNBD, entièrement équipé dans l'espace d'exposition par le partenaire local d’Ephémère Square, offrait une tribune aux petits acteurs. Ainsi, on a pu assister à l’émergence du premier bloc à base de Miscanthus, sans doute au monde. Cela part d’un agriculteur proche de l’agglomération de Lille, spécialiste des pommes de terre, qui cherche à cultiver sans engrais ni pesticides l’espace réglementaire entre les bâtiments et les champs de son exploitation de 200 hectares. Finalement, le miscanthus, une sorte de roseau asiatique, occupe toute la surface cultivée et l’agriculteur s’équipe des machines que le fabricant des producteurs de parpaing a développé pour les blocs biosourcés (troisième installation d’Europe après Isohemp pour le chanvre et un producteur portugais). Le Miscanbloc profite du travail de Vicat qui mêle du ciment prompt pour stabiliser des blocs de chanvre mais aussi potentiellement des blocs de miscanthus dont le comportement est proche.

Après la paille, le chanvre et le lin, la France se dote d’une quatrième filière agricole pour la construction et conforte sa position de leader européen des biomatériaux de construction (sans doute en association avec la Wallonie qui accueille Isohempet les isolants à base d’herbe de Gramitherm). Et elle ne naît pas comme il était un temps prévu, parrainée par l’aménageur Epa France en IDF.

 

Morgane Croquelois, pionnière de réemploi du bois comme profession à part entière, sur son stand au CNBD. © Jonas Tophoven

 

 

C’est dur d’être leader

Comme si cela n’était pas assez, Fiboo arrive avec un groupe régional qui dispose de moyens. Cette fois, il s’agit d’isolants à base de fibres de bambou, sans liant ciment, pour du flex ou semi-rigide type fibre de bois.

En fait, dans les industrieux Hauts-de-France, tout progresse ou presque, sauf peut-être l’essentiel. La filière de construction en bois de peuplier piétine et en plus, désormais, la région ne lui vient plus en aide pour compenser les prix de vente face à l’épicéa. L’export des grumes vers l’Asie fonctionne à plein. Le recyclage et réemploi du bois, Rewood l’expérimente en pionnier national mais c’est dur. Pour autant, c’est ici que se déploie la construction en châtaignier (Amélie Fontaine), voire en grisard (peuplier sauvage par Vivarchi), un mouvement soutenu par FiBois Haut-de-France qui prolonge, notamment avec le prescripteur Thomas Baudot, son engagement pour le bois d’œuvre de peuplier. Il ne faut donc pas prendre les Hauts-de-France de haut.


Source : batirama.com Jonas Tophoven / © Jonas Tophoven

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