"Le débat sur la transition énergétique est doublement légitime", a estimé Gérard Mestrallet, car outre les défis environnementaux, "il y a un bouleversement du paysage énergétique et de ses acteurs, c'est la fin du modèle en place depuis 50 ans et essentiellement dominé par d'anciens monopoles", a souligné M. Mestrallet, lors d'une audition dans le cadre du débat national sur la transition énergétique.
Ce débat vise à formuler des recommandations au gouvernement en vue d'une loi à l'automne, pour rendre la France moins dépendante des énergies fossiles et du nucléaire. Le modèle énergétique traditionnel est "finissant", a défendu M. Mestrallet, en raison de quatre grands facteurs, qu'il a surnommés les "quatre D".
Il s'agit de la "dérégulation" des marchés; de l'essor des énergies dites "distribuées" ou "décentralisées" (petites unités de production dispersées plutôt que grosses centrales); de la "digitalisation", c'est-à-dire du développement de nouvelles technologies type compteurs communicants ou stockage évolué de l'électricité; et enfin du "déclin" ou de la "décroissance" de la demande d'énergie en Europe, a-t-il énuméré.
"GDF Suez ne cherche pas à s'accrocher à l'ancien monde mais au contraire accompagner et anticiper les évolutions", a-t-il souligné, remarquant notamment que le métier historique du groupe, la vente de gaz en France, ne représentait plus que 10% de son activité.
Cela passe par un développement accéléré dans les énergies nouvelles, les pays émergents, les services visant à améliorer et réduire la consommation d'énergie, a-t-il expliqué. M. Mestrallet a décliné lors de cette audition ses propositions en matière de transition énergétique, qui collent à la stratégie de son groupe.
Sans surprise, il a notamment défendu le recours pour le chauffage aux réseaux de chaleur et autres chaudières à gaz basse consommation, plutôt qu'au fioul ou aux radiateurs électriques, qu'il a qualifiés d"aberration technologique", lançant ainsi une pierre dans le jardin d'EDF.
Il a aussi prôné, pour financer l'isolation des logements, le remplacement des certificats d'économie d'énergie (CEE) actuellement en cours de réforme par un "passeport rénovation" qui serait financé par les opérateurs. Il a également rejeté l'idée d'étendre à la consommation de gaz la CSPE, une taxe sur les factures de courant qui finance notamment les énergies renouvelables.
Le PDG de GDF Suez a aussi appelé à durcir les normes des centrales à charbon pour préserver les centrales à gaz, actuellement "sinistrées" en raison d'un prix du charbon et d'un cours du CO2 très faibles, alors que le groupe vient de décider de fermer une partie de l'année ou d'arrêter jusqu'à nouvel avis 3 de ses 4 centrales au gaz françaises.
"J'ai une vraie inquiétude parce que le prix du charbon a beaucoup baissé en Europe", ce qui, couplé un cours du CO2 trop faible, "fait que les centrales à charbon tournent à plein et éliminent les centrales à gaz, qui ne tournent plus,", a-t-il dit.
Enfin, il a proposé de fixer un objectif ambitieux de développement du biogaz (gaz naturel d'origine renouvelable) dans le réseau gazier français, à 5% en 2020 et 20% en 2030.
Source : batirama.com / AFP