A quoi ressemble un bâtiment de bureaux à énergie quasi-nulle ?

A quoi ressemble un bâtiment de bureaux à énergie quasi-nulle ?

Le Fraunhofer Institut ISE instrumente depuis 3 ans la nouvelle mairie de Fribourg conçue comme un bâtiment à énergie quasi-nulle : la production d’énergie sur site dépasse ses besoins annuels.




Fin 2017, la nouvelle Mairie de Fribourg-en-Brisgau – pas le Fribourg suisse, mais le Fribourg allemand en Bade-Wurtemberg – a été mise en service. Baptisé « Rathaus im Stühlinger », c’est un bâtiment de 22 650 m² de surface utile qui abrite des bureaux et un centre d’accueil des administrés de Fribourg pour toutes sortes de démarches administratives. Sa construction a tout de même coûté 85 millions d’euros.

 

 

 

Le bâtiment de la nouvelle Mairie de Fribourg-en-Brigau a été conçu comme un bâtiment à énergie quasi-nulle. © Ingenhoven Architects

 

Petit rappel, la Directive européenne sur l’efficacité énergétique des bâtiments 2010/31/UE du 19 Mai 2010 demandait que tous les bâtiments neufs soient à énergie quasi-nulle à partir du 1er janvier 2019 pour les bâtiments publics, à partir du 1er janvier 2021 pour tous les autres bâtiments.

 

La France avait traduit énergie quasi-nulle par Bepos ou bâtiment à énergie positive. La Loi sur la Transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015 avait repris l’obligation de construire des bâtiments publics neufs Bepos à partir de 2019. Puis le niveau E4 du Label E+C- consacrait le Bepos en 2016. Lors de la publication des premiers textes de la RE2020, surprise : toute référence au Bepos ou à des bâtiments à énergie quasi-nulle a totalement disparu.

 

Le reste de l’Europe, en revanche, continue de développer des bâtiments à énergie quasi nulle. La nouvelle Mairie de Fribourg-en-Brisgau a été le premier bâtiment public construit avec cette ambition. C’est, aujourd’hui encore, le plus grand bâtiment d’Europe à énergie quasi-nulle.

 

Le plus grand bâtiment d’Europe à énergie quasi-nulle.

 

Petit bémol toutefois. L’énergie primaire prise en compte est calculée selon la méthode allemande EnEV – l’équivalent allemand de la RT en France – et ne porte que sur le chauffage, le rafraîchissement, la ventilation, la production d’ECS et l’éclairage. Les « autres usages », notamment la consommation de la bureautique, des serveurs informatiques, de la cuisine et des chambres froides du restaurant et de la cafétéria ne sont pas comptabilisés.

 

Durant l’été 2017, 840 employés se sont installés dans ce nouveau bâtiment. Il a été ouvert au public en novembre 2017. Selon le Fraunhofer Institut ISE, l’un des challenges dans la conception d’un bâtiment à énergie quasi-nulle de plusieurs niveaux est que la surface utile augmente avec chaque niveau, entraînant une demande accrue d’énergie, tandis que la surface de la toiture, disponible pour une production d’énergie sur site, demeure constante.

 

Dans le cas du bâtiment Rathaus im Stühlinger, ingehoven architectects, les concepteurs, ont résolu cette difficulté en utilisant non-seulement la toiture, mais aussi la façade pour produire de l’énergie sur site.

 

 

 

Le bâtiment combine production solaire thermique, production solaire photovoltaïque, émission par dalles actives, par la ventilation double-flux, par des panneaux rayonnants dans certains locaux, production de chaleur par des pac géothermiques, plus une chaudière gaz consacrée à l’ECS, production de rafraîchissement par échange direct avec les sondes géothermiques. © Ingenhoven Architects

 

Des systèmes techniques complexes

 

Pour commencer, ce bâtiment est certifié passif. Ce qui témoigne de l’excellence de son enveloppe et minimise ses besoins d’énergie : 45 kWhEP/m².an seulement pour le chauffage, le rafraîchissement, l’ECS, la ventilation et l’éclairage. Soit 60% de moins qu’un bâtiment de bureaux neufs simplement réglementaire en Allemagne en 2014 au moment de la conception de cette nouvelle Mairie de Fribourg-en-Brigau.

 

Ensuite, l’émission de chaleur et le rafraîchissement sont assurés de trois manières complémentaires : par des dalles actives – circulation d’eau à basse température dans les dalles de béton entre niveaux -, par des plafonds rayonnants dans les bureaux et les salles pouvant recevoir un public nombreux : cafétéria, salles de réunion, … et par le système de ventilation double flux à récupération de chaleur et de froid.

 

Les centrales double-flux sont en effet équipées de batteries air/eau dans la veine de soufflage, en aval de leurs batteries de récupération. Les besoins de chaleur sont couverts par deux pompes à chaleur géothermiques eau/eau qui alimentent les dalles actives, les batteries, des CTA et les plafonds rayonnants.

 

La production de froid est couverte par un échange direct entre les sondes enterrées et le réseau de distribution d’eau dans le bâtiment. Les pac géothermiques sont arrêtées et seuls fonctionnent les circulateurs sur le réseau de sondes enterrées et sur la distribution dans le bâtiment. Les deux pac installées sont réversibles et pourraient, le cas échéant, apporter un rafraîchissement actif. Ce qui n’a pas été nécessaires en près de 4 ans d’exploitation du bâtiment.

 

La production d’ECS est assurée par des panneaux solaires hybrides – thermiques et photovoltaïques à la fois – installés en toiture, complétés par une chaudière gaz. Les panneaux hybrides, plus des panneaux photovoltaïques en toiture et en façade, soit 880 panneaux PV au total, produisent de l’électricité sur site.

 

 

 

Les panneaux photovoltaïques en façade ont été conçus et installés par a2-solar. Ce sont des modules verre/verre de 3,5 m de haut pour 60 cm (deux cellules) de largeur. Chaque panneau pèse près de 100 kg et affiche une puissance nominale de 220 kWc. © Ingenhoven Architects

 

 

Les données analysées par le Fraunhofer Institut ISE montrent que, du point de vue énergétique, le but est dépassé grâce à une production d’électricité de 47 kWh/m².an en moyenne, contre des besoins et une consommation mesurée de 45 kWh/m².an.

 

Hormis en 2018, première année d’occupation pleine et année d’apprentissage et de réglage, le bâtiment produit chaque année plus d’énergie primaire qu’il n’en consomme. Du point de vue de son empreinte environnementale, le Fraunhofer Institut ISE estime que le bilan est positif : grâce à son utilisation des ENR sur site, à son exportation d’électricité décarbonée, le bâtiment non-seulement n’émet pas de carbone, mais il absorbe 10 tCO2/an.

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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