"Le logement, le mal-aimé de la République" (Olivier Salleron)

L'activité du secteur du bâtiment a de nouveau reculé en 2025, de 4 %, selon l'estimation dévoilée par la FFB, qui table sur un rebond en 2026.

Comme une désormais très célèbre publicité pour une chaîne de supermarchés, la conférence de presse de la Fédération Française du Bâtiment aurait pu commencer par une chanson de Claude François : "le mal-aimé", avec non pas un loup en personnage principal ... mais le logement ! C'est d'ailleurs le titre du discours d'Olivier Salleron, le président de la FFB, de ce 16 décemebre 2025 : "le logement, le mal-aimé de la République".

 

"Mal-aimé est un mot direct et grave", explique Olivier Salleron, ici en photo, qui espère "une prise de conscience" sur ce qui est en train de se passer "au niveau de cette crise du logement qui s'amplifie, qui n'en finit plus et qui va sûrement un jour faire descendre les Français dans la rue". © Laure Pophillat

 

 

Et un, et deux, et trois ...

Le secteur demeure hélas plombé par la crise du logement neuf qui dure depuis mi-2022, soit trois années consécutives désormais. L'activité de la filière, qui a déjà perdu 1,2 % et 5,5 % en 2023 et 2024, recule encore de 4 % en 2025. Pour rappel, les mises en chantier pour le logement neuf se sont effondrées d'environ 40 % entre 2021 et 2024.

Selon les estimations de la fédération, l'activité du bâtiment dans le logement neuf a baissé de :

– 8,8 % en 2024 ;

– Et de 6,6 % pour la construction non résidentielle (commerces, bureaux, hôtels, etc.).

 

"Il y a eu un petit sursaut en 2025 mais les niveaux sont les plus bas enregistrés depuis 30-40 ans", précise Olivier Salleron. L'exercice se clôt en effet avec 283 000 logements commencés, certes en hausse de 8,4 % sur un an, mais loin des 360 000 observés en moyenne sur la période de 1980 à 2025. Toutefois, les permis progressent de 16,2 % ; il est donc permis d'espérer une croissance prochaine de l'individuel.

Le collectif, lui, se replie encore, avec un niveau toujours faible : environ 290 000 mises en chantier.

Le non résidentiel neuf poursuit lui aussi sa chute : - 6,6 %. Seuls les locaux commerciaux et les bâtiments administratifs émergent.

 

 

65 000 emplois ont disparu depuis le début de la crise en 2022

Cette année, 20 000 emplois ont disparu dans le secteur et 10 000 de plus pourraient être supprimés en 2026.

 

"On perd encore des salariés, peut-être moins vite que ce qu'on avait pensé", souligne Olivier Salleron, qui calcule que 65 000 emplois ont disparu depuis le début de la crise en 2022. © Freepik

 

 

Pas d'espoir d'une véritable reprise pour 2026 

En 2026, le bâtiment enregistrerait une petite reprise d’activité, soit + 1,8 % à prix constants, du fait du redressement du logement neuf, à + 9,5 %. La progression des mises en chantier observée en 2025 l’explique (+ 8,4 %), mais elle ralentirait sensiblement en 2026 (+ 4,4 %) pour s’établir à un niveau encore faible de 296 000 unités. De fait, sans statut du bailleur privé véritablement incitatif, le collectif fléchirait (- 2,0 %). Les autorisations sur ce segment en pâtiraient encore plus ( -7,2 %), laissant craindre une rechute d’activité globale dès 2027.

S’agissant du non résidentiel neuf, il resterait quasi-étale (+ 0,5 %), sans espoir de véritable reprise compte tenu d’une érosion des surfaces commencées comme autorisées. Elles resteraient pénalisées par les bureaux, mais s’y ajouterait les bâtiments administratifs en année d’élections municipales. Seuls les locaux agricoles et les commerces afficheraient des évolutions positives.

Quant à l’amélioration-entretien, la production se maintiendrait en repli de 0,5 %, du fait du logement (-0,8 %) qui souffrirait de transactions se réalisant le plus souvent sans travaux et d’une rénovation énergétique toujours à la peine (- 1,3 %), une "grosse déception" selon le président de la FFB. La baisse d’ensemble de la rénovation serait légèrement amortie par le non résidentiel, en quasi-stagnation, la hausse de l’investissement des entreprises compensant le repli de celui des collectivités territoriales. 

Quant à l’emploi, il abandonnerait encore 10 000 postes salariés et intérimaires ETP sur l’ensemble de l’année.

 

 

Une dynamique "catastrophique"

Pour le président de la Fédération, cette dynamique "catastrophique" est causée par les "stop and go, les atermoiements, les j'y comprends plus rien sur MaPrimeRénov'", accuse-t-il, en référence aux multiples changements de règles et à la pause estivale du dispositif d'aide à la rénovation énergétique. "Les CEE, Mon accompagnateur rénov', la lutte contre la fraude, le Fonds vert, la SNBC 3 (Stratégie nationale bas-carbone), etc., tout cela ne nous semble plus du tout compréhensible. On reste dans le flou, ce qui est normal au vu du rythme auquel changent les ministres. Mais cette instabilité est dévastatrice pour les entreprises. Aujourd’hui, on est dans l’urgence." explique-t-il.

Cependant, si le Parlement adopte un budget pour 2026 qui comprenne un dispositif d'incitation à l'investissement locatif et une baisse du prélèvement fait sur les recettes des bailleurs sociaux, l'activité du logement neuf pourrait rebondir de 11,2 %. La FFB espère que la commission mixte paritaire sur le budget 2026 puisse permettre de renforcer le statut du bailleur privé approuvé par les deux chambres parlementaires, avec des curseurs fiscaux plus incitatifs et des plafonds de loyers à appliquer aux locataires moins bas.

En parallèle, les professionnels souhaitent une refonte "efficace et pragmatique" de la REP PMCB au 1er janvier 2026, ainsi qu'une réflexion globale sur la rénovation énergétique.


Source : batirama.com / Laure Pophillat / © Laure Pophillat

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