C'est la question que se pose la FPI et son président, Pascal Boulanger, après que Le Sénat ait approuvé dimanche la création d'un "statut du bailleur privé". Il y voit un "déni de réalité".
Le Sénat a approuvé dimanche la création d'un "", un dispositif fiscal incitatif pour les particuliers cherchant à investir dans le logement locatif, confortant un compromis qui avait déjà émané à l'Assemblée nationale ces derniers jours et que la FPI (Fédération des Promoteurs Immobiliers), entre autres, appelait de ses vœux.
Pour Pascal Boulanger, le président de la FPI, ce qui s’est passé dimanche soir est un "déni de réalité. On vient d’inventer un statut qui n’existe pas et qui n’existera jamais. Le sujet n’est pas de savoir si les promoteurs mettront la clé sous la porte ; le vrai sujet, c’est que les habitants ne pourront pas ouvrir la porte de leur futur logement… puisqu’il ne sera pas construit. Cela va au-delà de nos pires cauchemars !"
Tout le monde semble d'accord...
Dans le cadre de l'examen du projet de budget de l'État pour 2026, les deux chambres du Parlement semblent avoir des avis convergents sur la manière de répondre à la crise du logement. En effet, le Sénat a voté dimanche soir pour un dispositif déjà approuvé par les députés : un avantage fiscal destiné à encourager les particuliers à investir dans un logement pour le louer.
Le nouveau statut prévoit :
– un amortissement fiscal de 3,5 % par an pour un logement neuf à loyer intermédiaire ;
– 4,5% pour un logement social ;
– et 5,5% pour un logement très social, dans la limite de 80 % de la valeur du bien et 8 000 euros par an pour deux logements maximum.
Ce dispositif permettrait de "neutraliser en 25 ans une opération à 300 000 euros d'investissement" pour un logement intermédiaire neuf, ainsi que l'a expliqué la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin, estimé le coût de la mesure à 1,2 milliard d'euros d'ici 2028, pour le seul logement neuf. Cette dernière est parvenue à convaincre la majorité sénatoriale, une alliance entre la droite et les centristes, de réduire la portée de la mesure que les sénateurs proposaient initalement, bien plus avantageuse pour les acheteurs, mais beaucoup plus coûteuse pour les finances publiques.
"Aujourd'hui, on manque de logements locatifs sur le marché partout en France. Et pour ça, il nous faut un dispositif ambitieux", a justifié la sénatrice centriste Amel Gacquerre, ici en photo, regrettant la version "édulcorée" du gouvernement. © Assemblée Nationale
C'est finalement la proposition gouvernementale, fruit d'un long compromis à l'Assemblée nationale mi-novembre, qui a été adoptée par le Sénat. de Montchalin a estimé le coût de la mesure à 1,2 milliard d'euros d'ici 2028, pour le seul logement neuf.Ces votes ne sont pas encore définitifs car le projet de budget va continuer d'être examiné au Parlement jusqu'à la mi-décembre au plus tôt.
...mais les acteurs du logement sont stupéfaits
Une coquille vide
Toutefois, ce vote sur le "statut du bailleur privé" laisse l’ensemble des acteurs du logement stupéfaits. Selon la FPI, l’architecture des amendements déposés à la fois par le groupe Union Centriste, notamment Amel Gacquerre et Hervé Marseille, ainsi que par des sénateurs Les Républicains (dont Marc-Philippe Daubresse, Sophie Primas, Mathieu Darnaud, etc.) répondait "parfaitement à la nécessité de relancer l’investissement locatif et, avec lui, la production de logements dont notre pays a cruellement besoin". En choisissant de sous-amender ce dispositif jusqu’à le vider de sa substance, le "Gouvernement a transformé une réforme structurante en coquille vide".
Selon la FPi, cela a été fait "subrepticement, en déposant trois sous-amendements quelques minutes avant leur examen, privant les sénateurs d’un examen préalable de leur incidence sur le dispositif proposé et en annonçant des chiffres pour le moins critiquables".
Un sabotage méthodique
En empilant les contraintes et en vidant le statut de sa substance, les sous-amendements du Gouvernement ont rendu le système totalement inopérant car, pris isolément, chacun de ces points amenuise l’équilibre économique de l’investissement. Et leur cumul annule l’effet incitatif du statut, voire, dans certains cas, crée un effet négatif.
Pour l’achat d’un logement locatif neuf de 240 000 €, l’effort d’épargne mensuel passe de 400 € (avec les seuls amendements parlementaires) à 700 € avec la version sous-amendée par le Gouvernement. À 400 €, le dispositif était déjà à la limite de la capacité d’endettement du particulier investisseur. À 700 €, aucun ménage ciblé ne pourra se lancer dans un investissement. © Freepik
De la responsabilité du Gouvernement
Un dispositif qui ne produira pas un logement de plus
Ce statut vidé de son contenu ne relancera pas l’investissement locatif : il ne permettra aucun redémarrage significatif de la production neuve (y compris pour l’accession et le social), donc aucune amélioration de l’accès au logement pour nos concitoyens. "Tout ça pour ça : des mois de travaux, des dizaines d’auditions, un rapport parlementaire documenté et chiffré… pour aboutir à un dispositif qui ne produira pas un logement de plus." constate, dépitée, la FPI, précisant que depuis l’arrêt du dispositif Pinel (31 décembre 2024), le nombre de logements vendus à des investisseurs particuliers par rapport à une année habituelle a été divisé par 6,5 !
Un Premier ministre qui doit faire preuve d'autorité
La FPI en appelle "à la responsabilité du Parlement et du Premier ministre". Ce dernier doit désormais faire "preuve d’autorité" en envoyant des messages clairs. En sus, il est indispensable que la commission mixte partitaire (CMP) rétablisse le statut du bailleur privé tel qu’il a été conçu initialement. À défaut, précise la FPI, "nous ne sortirons pas de cette catastrophe, cette crise du logement s’aggravera encore, avec toutes les conséquences que nous dénonçons depuis longtemps sur le PIB, sur les recettes de TVA, sur l’emploi, sur le logement des étudiants et celui de leurs ainés, sur les salariés qui dorment dans leur véhicule…"
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