Acheter un bien à deux est un projet important. Mais attention : selon que vous êtes mariés, pacsés ou en concubinage, vos droits et protections diffèrent en cas de séparation ou de décès. Êtes-vous bien protégés ?
Vous projetez d'acheter un logement en couple ? C’est un beau projet, mais il faut anticiper et s’informer avant de signer. En effet, il est important que chacun des deux acquéreurs ait conscience qu’il ne sera pas systématiquement protégé en cas de séparation ou de décès de l’autre acquéreur. Ces considérations semblent lointaines lors de l’effervescence de l’achat mais elles sont primordiales, car lorsqu’un tel événement survient, l’un des acquéreurs pourrait devoir surmonter des difficultés, notamment financières. Bien sûr, en toute logique, le statut d’époux est le statut le plus protecteur pour chacun des conjoints. Cependant, tous les couples n’étant pas mariés, il est important de faire un état des lieux pour chacun des régimes connus en droit français : le concubinage (union libre), le Pacs, le mariage.
L’achat immobilier par un couple de concubins
Le concubinage se caractérise par son absence de statut et donc son absence de protection à l’égard des concubins. Ainsi, sauf exceptions, les concubins sont généralement assimilés, civilement et fiscalement, à des étrangers l’un envers l’autre.
Les modalités d’acquisition des concubins
Si aucune disposition particulière n’est prévue, les concubins achètent en indivision. L’indivision est un régime juridique dans lequel plusieurs personnes sont titulaires de droits de même nature sur un même bien. Ainsi, les concubins qui investissent ensemble deviennent coindivisaires. Cette indivision est soit égalitaire (chaque concubin est alors propriétaire de la moitié du bien acheté : 50 % / 50 %), soit inégalitaire (sur la base de l’apport personnel et de la participation au remboursement du prêt de chacun des concubins – Exemple : 60 % / 40%).
Il est important de prévoir aux termes de l’acte d’acquisition la participation effective de chaque concubin dans le financement de l’opération. À défaut, lors de la vente du bien ou d’un partage ultérieur des contestations risquent de s’élever entre les deux concubins coindivisaires.
Sans précision de la quote-part d’acquisition, l’indivision sera considérée comme étant à parts égales (50 % / 50 %). © Freepik
L’achat dans le cadre d’une indivision est le plus fréquent mais il est également possible, pour les concubins acquéreurs de créer une SCI (Société civile immobilière). Dans ce cas, c’est la SCI qui se porte acquéreur du bien avec les fonds apportés par les concubins associés ou à l’aide d’un emprunt. L’acquisition par le biais d’une SCI est possible pour tous les couples (concubins, pacsés, mariés), toutefois cette modalité peut s’avérer être un mode de protection intéressant pour les membres du couple vivant en union libre. La création d’une SCI exige des formalités administratives et le règlement de frais de constitution, mais elle permet de définir clairement les parts de chaque concubin associé et facilite la gestion des questions liées au retrait ou au décès de l’un des deux acquéreurs.
Fin du concubinage
Le concubin survivant n’est pas héritier du concubin décédé et ne bénéficie d’aucune protection légale concernant le logement commun. La part du concubin décédé revient à ses héritiers : ses enfants ou à défaut ses parents et/ou frères et sœurs.
Toutefois, le concubin survivant peut recevoir la quote-part de bien immobilier appartenant au défunt si ce dernier a, de son vivant, rédigé un testament dans ce sens. Rappelons néanmoins que le concubin qui hérite par testament d’une partie du patrimoine du défunt est soumis à une lourde fiscalité des transmissions, c’est-à-dire que sur le montant perçu, le survivant est redevable de 60 % de droits auprès des impôts après application de l’abattement minimum de 1594,00 euros. Sauf disposition contractuelle spécifique (par exemple, clause de faculté d’acquisition des droits du prémourant prévue dans l’acte d’acquisition) ou testament, le concubin survivant devient coindivisaire avec les héritiers du défunt.
Dans une situation de séparation, les concubins peuvent décider de vendre le logement indivis et chacun récupère la quote-part correspondante du prix de vente. Il est également possible pour l’un d’entre eux de racheter la part de l’autre et ainsi devenir seul propriétaire du bien. À défaut d’accord entre eux (sur le prix par exemple), le juge pourra acter le partage judiciaire du bien, ce qui conduit souvent à la vente du bien ou au rachat par l’un des deux.
De la même façon, si c’est une SCI créée par les deux concubins qui est propriétaire, un concubin peut, selon les clauses des statuts de la société, obtenir le rachat de ses parts ou l'attribution du logement ou encore décider, avec son concubin, la dissolution de la SCI (le logement est vendu et l'argent partagé).
L’achat immobilier par un couple Pacsé
Le pacte civil de solidarité est issu de la loi du 15 novembre 1999 qui a créé un contrat permettant une organisation patrimoniale de la vie commune, pouvant être conclu entre deux personnes de sexes différents ou de même sexe. Deux cas distincts se présentent dans le cadre d’un couple pacsé :
– soit le Pacs date d’avant le 1er janvier 2007 : dans ce cas, les biens achetés sont indivis par moitié comme dans le régime de la communauté des couples mariés, sauf spécification contraire mentionnée dans l’acte d’achat (ainsi, avant 2007, tous les couples pacsés étaient automatiquement soumis au régime d’indivision) ;
– Soit le Pacs date d’après le 1er janvier 2007, dans ce cas, les couples pacsés sont automatiquement soumis au régime de la séparation de biens : chaque partenaire reste propriétaire des biens acquis avant et pendant le Pacs, en proportion de leur contribution financière.
Depuis 2007, le partenaire survivant n’a aucun droit sur l’héritage. Il ne peut hériter, y compris de sa quote-part du bien immobilier, que si le défunt a rédigé un testament en sa faveur. Dans ce dernier cas, le partenaire survivant bénéficie d’une exonération des droits de succession, contrairement aux concubins.
Durant l'année qui suit le décès d’un partenaire pacsé, le survivant peut rester gratuitement dans le logement qui constituait leur résidence principale commune. © Freepik
Dans le cas d’une séparation des partenaires de Pacs, si ces derniers ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la vente du logement ou sur celui qui le récupère, le recours au juge sera nécessaire pour décider du partage ou de l’attribution du logement.
L’achat immobilier par un couple marié
Les conséquences d’un achat immobilier à deux dans le cadre d’un mariage dépendent du choix du régime matrimonial qui a été choisi.
Sans contrat de mariage
S’il n’y a pas de contrat de mariage, c’est le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts qui s’applique. Concrètement les biens achetés pendant le mariage appartiennent aux deux époux pour moitié, sauf si l’un des deux finance une partie de l’achat grâce à un apport personnel qui provient de sa famille, que ce soit par donation ou héritage. Dans ce dernier cas, il est important de pouvoir tracer l’origine des fonds aux termes de l’acte d’acquisition.
En cas de divorce ou de décès, les biens acquis pendant le mariage sont évalués et répartis équitablement à 50 % / 50 %.
Avec contrat de mariage
S’il y a un contrat de mariage avec séparation de biens, les biens immobiliers acquis sont présumés détenus par chacun des époux à hauteur de moitié. Cependant, il est possible de prévoir une répartition inégale directement dans l’acte d’achat. Si chaque époux assume une quote-part du prix (50 % / 50 %, 1/4 – 3/4, ...), chacun sera propriétaire indivis à hauteur de son apport.
En cas de séparation de biens, c’est le régime de l’indivision qui s’applique.
Quel que soit le régime matrimonial
Il est important de noter que la protection mise en place par le statut du mariage existe quel que soit le régime matrimonial. Ainsi, pendant le mariage, un époux ne peut vendre, donner, louer ou hypothéquer le logement de la famille et les meubles meublants sans l’accord de l’autre.
De plus, en cas de décès, l’époux survivant bénéficie d’un droit qui lui permet de rester dans la maison ou l’appartement sa vie durant. Il est également exonéré de droits de succession.
Lors d’un divorce, vous pouvez vous entendre pour vendre votre logement. Le prix de vente sera réparti, dans les proportions précisées dans l’acte d’acquisition, à défaut à parts égales. De plus, la part de l’un peut être rachetée par l’autre. En cas de désaccord, le juge aux affaires familiales peut attribuer le logement à l’un des deux époux.
Source : batirama.com / Nathalie Quiblier / © Freepik