Procédure de rescrit social, télétravail, défense du salarié licencié, etc. : François Taquet, avocat, revient sur toutes les nouveautés en matière juridique de ce mois d'avril 2025.
Procédure de rescrit social, télétravail, défense du salarié licencié, etc. : François Taquet, avocat, revient sur toutes les nouveautés en matière juridique de ce mois d'avril 2025.
Nouvelle rubrique du BOSS dédiée aux "Rescrits"
Fixée par les articles L 243-6-3 et R 243-43-2 du CSS, la procédure de rescrit social permet à un cotisant ou à un futur cotisant de solliciter une prise de position explicite de l’URSSAF sur l'application à une situation précise de la législation sur les cotisations et contributions de sécurité sociale et de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés. La réponse de l’URSSAF, qui doit être notifiée au cotisant dans un délai de 3 mois, est opposable à l’organisme de recouvrement pour l’avenir, tant que la situation exposée dans la demande et la législation en cause n’ont pas évolué.
Moralité, cette procédure a pour objet de sécuriser les relations URSSAF/Entreprises !
Pour être recevable, la demande doit soumettre une question nouvelle et sérieuse. La demande peut être présentée par une entreprise appartenant à un groupe ou par une organisation syndicale ou patronale de branche représentative. L'opposabilité de la réponse vaut alors, selon les cas, pour la seule entreprise, pour le groupe ou pour toute entreprise de la branche concernée.
Depuis le 2 avril 2025, le BOSS (Bulletin Officiel de la Sécurité Sociale) comprend un espace dédié aux rescrits sociaux. On y retrouve les premiers rescrits diffusés par l’administration fin 2024, mais également de nouveaux.
Dans chaque rubrique du BOSS, les rescrits sont listés dans la table alphabétique à l’entrée "rescrit social", avec le numéro de paragraphe.
La publication d'un rescrit social sur le site internet du BOSS permet à tout cotisant d’opposer la prise de position de l'administration à l’URSSAF en cas de contrôle, pour éviter un redressement ou une demande de rectification fondés sur une interprétation différente de la législation
Doit-on dater les faits fautifs dans une lettre de licenciement ?
Pour la jurisprudence, un employeur n'est pas tenu de préciser dans la lettre de licenciement la date des faits invoqués à l'appui du licenciement, même pour faute grave. Mais attention, les motifs avancés doivent précis et matériellement vérifiables pour que la notification soit valable (Cass soc. 6 mai 2025. pourvoi n° 23-19214).
Peut-on revenir sur le télétravail ?
Pratiquement, il convient de regarder la manière dont a été mis en place le télétravail :
– si le télétravail a été mis en place dans le cadre d’une charte, il faut consulter le contenu de ce texte. En effet, le document doit prévoir les conditions dans lesquelles un salarié en télétravail peut revenir à une exécution en entreprise (clause de réversibilité) ;
– Si le télétravail a été mis en place par accord individuel écrit ou verbal, il convient de regarder quel a été l'accord des parties, fidèle au principe que "les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits" (C civil art 1103) ;
– Enfin, il y a le cas où le télétravail n’a pas été formalisé (ou le cas où le document qui prévoit le télétravail ne précise pas les conditions dans lesquelles l’employeur peut y être mis fin) : dans ce cas le salarié peut refuser de mettre fin au télétravail sachant qu'il s'agirait d’une modification essentielle de son contrat de travail en dehors de tout accord de l'intéressé (Lyon, Chambre sociale b, 10 septembre 2021, n° 18/08845).
Avant de revenir sur le télétravail, il convient, de façon pratique, de regarder la manière dont a été mis en place le télétravail. © Freepik
Le salarié convoqué à l’entretien préalable au licenciement
Le salarié convoqué à l’entretien préalable au licenciement doit disposer de cinq jours pleins pour préparer sa défense (Cass soc. 12 mars 2025 pourvoi no 23-12766). Toutefois, la situation est plus complexe qu'elle n'y paraît à premier abord car plusieurs solutions juridiques doivent être prises en compte
Le délai de cinq jours prévu à l’article L 1232-2 du Code du travail est exprimé en jours ouvrables. Il ne comprend donc pas le jour consacré au repos hebdomadaire ainsi que les jours reconnus fériés par la loi et habituellement chômés dans l’entreprise. Le délai commence donc à courir à compter du lendemain de la présentation ou de la remise de la lettre de convocation au salarié : le jour de la présentation de la lettre ou de sa remise au salarié ne compte pas (Code de procédure civile art. 641).
Par ailleurs, si le délai de cinq jours expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (C. trav. art. R 1231-1). Mieux vaut donc envisager ce délai de manière large !
Un employeur peut-il rémunérer plus favorablement une salariée au prétexte qu'elle est son épouse ?
Un employeur ne peut pas rémunérer plus favorablement une salariée au prétexte qu'elle est son épouse (Cass soc . 9 avril 2025. pourvoi n° 23-14016). Il s'agit ici d'une application pratique du principe de non-discrimination en matière de salaire dès l’instant où les personnes effectuent un travail égal. Suivant ce principe, un employeur ne peut donc pas traiter différemment une salariée et son épouse en termes de rémunération.
Période d'essai et auto-entreprenariat
Peut-on prévoir une période d'essai lorsque le salarié occupait déjà le même emploi en tant qu'auto-entrepreneur ? (Cass soc. 29 avril 2025. pourvoi n° 23-22389). Lorsque le salarié nouvellement embauché était déjà dans une relation de travail avec l’employeur en tant qu’auto-entrepreneur, les juges doivent rechercher si l’entreprise a ainsi pu apprécier les capacités professionnelles du salarié. En cas de réponse positive, aucune période d’essai n’est possible. Peu importe donc la forme de la relation antérieure.
Report de l’entretien préalable pour arrêt maladie : pas besoin de tout recommencer ! (Cass soc. 21 mai 2025. pourvoi n° 23-18003)
Dans cette décision, les juges apportent une précision importante sur la procédure de licenciement : lorsqu’un entretien préalable est reporté en raison de l’état de santé du salarié, l’employeur n’a pas à respecter à nouveau le délai de cinq jours ouvrables.
L’employeur doit uniquement aviser en temps utile et par tous moyens le salarié des nouvelles date et heure de l’entretien.
Source : batirama.com / François Taquet / © Freepik