BTR 499
BATIRAMA N°499 I OCTOBRE - NOVEMBRE 2021 23 DOSSIERS INNOVATIONS SUR ARTIBAT Appréhendée à la veille de son entrée en vigueur, la RE 2020 soumet les matériaux à la question environnementale. L’enjeu est la diversité de l’offre. L es jeux sont-ils faits ? La RE 2020 fera-t-elle la part belle à la construc- tion bois ? Les pouvoirs publics ont affiché leurs choix, et le mode de calcul retenu pour l’analyse de cycle de vie dyna- mique des matériaux oriente la prescrip- tion. Pour Samuel Gardavaud, PDG de Gardavaud Habitations dans le Doubs et aussi président du CNDB (Comité national pour le développement du bois), cet argu- ment n’explique le succès du matériau. Il rappelle le travail mené depuis quinze ans. « Nous nous sommes structurés et nous avons investi dans des ateliers, des bureaux d’études, des machines numé- riques, de la logistique de chantier… » Ce qui se traduit par une offre de maison individuelle ou de construction collec- tive qui répond aux standards de qualité et de budget des maîtres d’ouvrage. Il le souligne : « La part de marché du bois est passée de 2-4 % il y a 10-15 ans à quelque 10-12 % aujourd’hui. Ce matériau est aussi utilisé pour 30 % des agrandissements et pour la moitié des surélévations. » Le pari des ciments verts Laurent Truchon, directeur délégué de CIMBéton, est optimiste pour le maté- riau béton. « Les résultats des simulations menées avec des bureaux d’études indé- pendants indiquent qu’il existe des solu- tions pour respecter la RE 2020 jusqu’en 2025. » Après cette date, les seuils seront relevés. Pour réduire l’empreinte car- bone, poursuit Félicien Thiou, responsable construction durable chez CIMBéton, il faut « utiliser les ciments à basse teneur en clinker, redimensionner les éléments... ». Par ailleurs, la rédaction de fiches (FDES) précisément renseignées devrait sensi- blement réduire l’empreinte carbone des bétons. Le métal à mal avec la RE2020 En revanche, le secteur de la construc- tion métallique dit prendre la mesure des conséquences de la RE 2020, pour lui- même et pour toute la filière bâtiment. Patrick Le Pense, responsable du secteur construction chez ArcelorMittal, pose un avis tranché : « Toutes les industries sont d’accord sur la nécessité d’une transition énergétique. Mais les choix pris dans le cadre de la RE 2020 sont politiques, dog- matiques, anti-techniques et anti-scien- tifiques. Le texte est inapplicable et se retrouvera non opérationnel. Il ne sera pas possible d’atteindre les performances, ce qui donnera lieu à des actions juridiques comme à la mise en difficulté d’entre- prises. » Vers une réduction de 35 % des éner- gies carbonnées Si l’acier est peu présent en maison indivi- duelle, il répond aux besoins du collectif : création de balcons rapportés, de cour- sives… Il est surtout adapté aux mar- chés des bâtiments agricoles, de l’indus- trie agro-alimentaire, de la logistique… Ce secteur parie sur l’avenir avec des solu- tions de production innovantes. Patrick Le Pense évoque la production d’acier sans haut fourneau, sans charbon. L’une des voies consisterait « à effectuer une réduc- tion directe du minerai de fer dans un four alimenté en hydrogène vert ». Cette indus- trie s’est aussi placée sur les rails d’une réduction de 35 % des énergies carbo- nées en 2030 et de la neutralité carbone en 2050. BERNARD REINTEAU La filière gros-œuvre connaît l’importance du chantier de la transition environnementale. Outre l’application de la RE2020, au 1 er janvier 2020, le tri sélectif s’impo- sera sur les chantiers. Dès janvier prochain, l’application de la RE 2020 traduira concrètement le tournant créé par la stratégie nationale bas carbone mentionnée en 2015 dans la loi de transition énergétique, et pré- sentée en 2018. Son but : atteindre, en 2050, un niveau « incompressible » d’émissions de CO 2 , soit 80 Mt CO 2 eq. C’est pratiquement l’estimation du seul secteur du bâtiment en 2015 : 88 Mt CO 2 eq, soit 20 % des émissions totales d’alors. À l’échéance de 2050, le sec- teur du bâtiment, se voit alloué une part de 5 Mt CO 2 eq, avec une marche intermédiaire à 45 Mt CO 2 eq en 2030. Le décret de la RE2020 publié Le décret relatif à la RE 2020 et l’ar- rêté présentant les règles de calcul (1 800 pages) sont parus cet été. Les besoins énergétiques doivent être réduits d’environ 30 % par rapport à la RT 2012 : l’isolation thermique et le traitement des ponts thermiques sont renforcés ; le calcul du bilan bioclimatique (Bbio) doit, en plus de la maîtrise des déperditions en hiver (isolation et étanchéité à l’air), prendre en compte le comportement estival. Les concepteurs soumettront leurs projets au double indice car- bone du chantier et de la vie de l’ou- vrage. Il faut trier les déchets de chantier et recycler Autre sujet important à prendre à bras le corps : celui des déchets de chantier. Après l’entrée en applica- tion, en février 2020, de la loi contre le gaspillage et en faveur de l’écono- mie circulaire, une consultation s’est tenue en juillet dernier dans le but de rédiger un décret sur la responsa- bilité élargie du producteur pour les produits et matériaux de construc- tion. En clair, il s’agit de traiter les dépôts sauvages et de développer le recyclage pour éviter la saturation des décharges. 42 millions de tonnes de déchets Rappel : le bâtiment produit chaque année quelque 42 millions de tonnes de déchets dont 30 Mt (75 %) sont inertes. Le texte doit s’appliquer au 1 er janvier 2022. Les fournisseurs – indus- triels, importateurs… – seront impli- qués dans la gestion du tri sélectif de sept catégories de matériaux : métal, plastique, verre, bois, fraction miné- rale, plâtre et papier. Un maillage ter- ritorial de points de reprise sera déve- loppé, et deux éco-organismes – un pour les inertes, l’autre pour le second œuvre - seront chargés de gérer cette activité. À noter qu’à l’ouverture de la consultation publique, 26 entreprises ont annoncé se regrouper autour du projet Valobat, initié par le groupe Saint-Gobain. LES RÉGLEMENTATIONS SE BOUSCULENT EN 2022
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