Intermat 2018 : en ordre de bataille pour le chantier du Grand Paris

Intermat 2018 : en ordre de bataille pour le chantier du Grand Paris

Le Grand Paris représente le plus grand chantier de la première moitié du 21e siècle. Tous les fabricants et loueurs de matériel mettent en avant leurs meilleures solutions techniques à Intermat 2018.




Le Grand Paris au sens large regroupe plusieurs opérations majeures qui dureront au moins jusqu’en 2030 : la construction du métro Grand Paris Express avec ses 68 gares nouvelles et 200 km de réseau, dont une bonne partie enterrée, l’aménagement de toutes les zones à urbaniser autour des nouvelles gares, leurs dessertes routières, les réseaux d’électricité, de gaz, de fibres optiques, … qui vont avec.

 

 

 

Voici sur le stand Liebherr, toute propre et neuve, une pelle avec benne à grappin à deux câbles. Puis la version déjà en place sur un chantier du Grand Paris Express. Ces engins servent au creusement des emplacements des parois moulées. Le grappin à deux câbles est actionné mécaniquement par le câble de levage et de fermeture. Les lamelles des parois moulées sont creusées par la benne preneuse. ©PP

 

 

 

 

28 milliards d'euros de terrassement ?

 

Estimés à 25,5 milliards d’euros en 2013, le coût global des travaux du Grand Paris Express a été réévalué à 38, 5 milliards par la Cour des Comptes dans un rapport daté de décembre 2017 et publié en janvier. Le 16 avril, la Société du Grand Paris qui gère ces travaux, indiquait pudiquement : « Plus grand projet d’aménagement d’Europe, le nouveau métro est un investissement d’avenir. Au total, près de 35 milliards d’euros, dont 7 milliards d'euros de provisions pour risque et aléas, sont prévus pour construire le Grand Paris Express ».

 

Sur cette somme, environ 28 milliards d’euros devraient être consacrés à des activités qui concernent directement les exposants à Intermat : excavations, creusement de tunnels divers, forages, évacuations et valorisation de déblais, travaux routiers, production, transport et mise en œuvre de millions m3 de béton, fondations spéciales, mesures sur sites, …

 

Un chantier d’excavation de la dimension de ceux du Grand Paris, ce sont non-seulement des matériels de terrassement en grand nombre et de divers types. C’est aussi tout une infrastructure logistique et environnementale. Par exemple, un chantier d’excavation ou de tunnel utilise des boues composées de bentonite, une variété d’argile, pour consolider les parois en attendant l’arrivée des voussoirs ou du béton.

 

Lors du creusement, les pompes récupèrent les boues portant les déblais et les remplacent par des boues de bentonite. En surface, une station de traitement sépare les boues de débris qu’il faut évacuer, traiter et recycler, des boues de bentonite qui sont traitées sur site et réutilisées pour la poursuite du chantier. Autant d’équipements à construire, à installer et à maintenir durant toute la durée du chantier.

 

 

 

Sur le chantier de creusement de la station de la ligne 15 à Champigny-sur-Marne, les fraises à parois moulées sont utilisées pour la réalisation de tranchées très profondes dans des sols particulièrement durs. Contrairement au grappin, la fraise à parois moulées travaille de manière continue pendant l'excavation. Le sol en place est détaché et broyé à l'aide des tambours de fraisage. À l'intérieur de la fraise, une pompe injecte depuis la surface, un flux de nettoyage qui, pompé par d’autres pompes, remonte les déblais de la tranchée vers la surface. Le fluide de support souillé est purifié dans une installation de traitement et réinjecté dans la tranchée. Les fers à béton – il en faudra littéralement des centaines de milliers de kilomètres pour tous les ouvrages du Grand Paris Express, sont formés et assemblés sur site, prêts à être descendus dans la tranchées de la paroi moulée dès qu’elle atteint la profondeur suffisante ©Liebherr, PP

 

 

 

 

 

 

Le sol en place est détaché et broyé à l'aide des tambours de fraisage. À l'intérieur de la fraise, une pompe injecte depuis la surface,  un flux de nettoyage qui, pompé par d’autres pompes, remonte les déblais de la tranchée vers la surface. Le fluide de support souillé est purifié dans une installation de traitement et réinjecté dans la tranchée. ©PP

 

 

 

 

Le calendrier est confirmé

 

Au total, le chantier du seul Grand Paris Express produira 43 millions de tonnes de débris. Fin Février, le gouvernement – en l’espèce, le Premier ministre et la ministre des Transports – ont réaffirmé le calendrier du Grand Paris : les travaux seront terminés en 2030, mais sûrement pas pour les jeux olympiques de 2024.

 

En effet, en plus du Grand Paris Express, n’oublions pas d’ajouter les aménagements nécessaires aux Jeux Olympiques 2024 à Paris. Un rapport rendu au gouvernement le 30 mars pointe un risque de dépassement des travaux de 500 millions d'euros : petits joueurs, va !

 

Les chantiers des programmes « Réinventer Paris », « Inventer la Métropole du Grand Paris » et « Réinventer la Seine » vont eux-aussi susciter des travaux d’envergure, car les sites concernés sont souvent difficiles, voire entièrement à créer au-dessus du périphérique, au-dessus des boulevards des Maréchaux, sur des terrains fragiles, etc. Bref, au cours de la première moitié de ce nouveau siècle, l’Île-de-France sera le plus grand chantier d’Europe, de très loin.

 

Intermat 2018 est le meilleur endroit pour organiser la rencontre des fabricants de matériels et des entreprises qui devront réaliser les travaux du Grand Paris. Par conséquent, de nombreux exposants mettent en avant des matériels susceptibles d’être utilisés sur les énormes chantiers de terrassement du Grand Paris.

 

Chaque exposant dont un matériel est déjà utilisé sur l’un des chantiers du Grand Paris s’empresse de le souligner. D’autres suggèrent combien il serait avantageux pour les entreprises du Grand Paris de recourir à telle niveleuse, excavatrice, broyeuse de gravats, etc. Liebherr a même édité une brochure spécifique.

 

 

 

Un chantier d’excavation pour la création de parois moulées est largement une opération de pompage et d’injection. Surtout dans le cas de creusement par fraisage. ©PP, Liebherr

 

 

 

Quels sont les matériels concernés ?

 

L’une des caractéristiques communes aux divers chantiers du Grand Paris est l’espace réduit. Logiquement, les matériels conçus pour évoluer dans des espaces contraints deviennent spécialement intéressants.

 

Par exemple, souligne Liebherr, pour la construction des deux tours Duo dans le XIIIe arrondissement – conçues par Ateliers Jean Nouvel pour Ivanhoé Cambridge avec une Maîtrise d’ouvrage déléguée attribuée à Hines –, l’entreprise Capocci utilise la pelle à câbles sur chenilles Liebherr HS 8050 HD. Elle est capable de lever 50 tonnes, son mât atteint 50 m de longueur (référence 1310.17) et la partie grue pivote dans un rayon de 4,050 m.

 

La plus grande grue à tour de Liebherr, la High-Top 1000 EC-H Litronic exposée à Intermat doit être ensuite directement livrée au groupement Vinci Construction / Spie Batignolles. Chargé du lot T3C du métro ligne 15 Sud, ce groupement a commandé deux exemplaires de 1000 EC-H 40 Litronic, capables de soulever 40 tonnes avec deux chariots et un quadruple mouflage, une portée maximale de 81,4 m, une charge maximale de 11,5 tonnes en bout de flèche et- une hauteur maximale sous crochet de 81,4 m.

 

Bon, avouons qu'avant d’aller à Intermat, votre serviteur ignorait ce qu'était un mouflage appliqué à une grue et encore plus qu’il puisse être simple, double, voire quadruple. Un mouflage consiste à faire passer le câble par de nombreuses poulies pour augmenter la capacité de levage de la grue et pouvoir travailler à des vitesses plus lentes, donc avec une précision plus grande. Le simple mouflage fait appel à deux brins et un chariot.

 

Le double mouflage recourt à quatre brins et à un double chariot, ... Ce qui, en pied de flèche, donne la puissance du double mouflage et, en pointe de flèche, celle du simple mouflage. Il existe même des grues à changement de mouflage automatique – capables de passer du simple au double -, mais l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) a publié une mise en garde contre les changements de mouflage de certaines marques et modèles de ces grues à mouflage automatique.

 

Outre les grues à tour, les exposants d’Intermat mettaient en avant leurs grues télescopiques sur chenilles ou à roues, leurs bouteurs, chariots télescopiques, pelles sur pneus et sur chenilles, leurs chargeurs sur pneus et sur chenilles – comme la chargeuse sur chenilles Liebherr LR 636 employée pour le terrassement en taupe de la future ligne 15 -, tous leurs engins de manutention, dont chez Liebherr la machine de transbordement LH 26 M Industry Litronic, développée pour la manutention de ferrailles, de bois, le recyclage et la gestion des déchets.

 

 

 

Les chantiers du Grand Paris Express sont équipés de leurs propres centrales à béton, à production de boues chargées en bentonite, d’épuration des boues extraites, etc. ©PP

 

 

 

Fondations spéciales

 

Mais le Grand Paris sera un énorme consommateur de béton pour toutes sortes d’usages, dont les fondations spéciales requises par les gares enterrées. Il existe pour cela de nombreux matériels spécialisés qui ont été mis en avant à Intermat. Commençons par les machines destinées aux fondations spéciales. Il s’agit notamment de pelles à câbles avec bennes à parois moulées, capables de construire les parois des futures stations enterrées.

 

A villejuif, la station sera à 55 m sous terre. A Romainville, les parois moulées de la station « Place Carnot » sur le prolongement de la ligne 11 descendront à 42 m de profondeur. Les fondations spéciales mettent en scènes les engins de forage et de battage pour la mise en place de palplanches et de pieux de fondation ou pour la réalisation de parois d’étanchéité.

 

D’autres machines se chargent de l’exécution de parois moulées. Ce sont des constructions murales moulées en profondeur dans le sol, faites de béton, de béton armé ou de liants. Elles fournissent d’abord une résistance statique et font office de barrière d'étanchéité qui permettra l’excavation sereine du volume délimité par les parois moulées : un accès à une station de métro souterraine, par exemple.

 

Lors de la réalisation d'une paroi moulée, des tranchées individuelles sont creusées dans le sol. En même temps que l’excavation des tranchées, un fluide de support – de la bentonite – est injecté dans la tranchée pour éviter son effondrement. S’il s’agit d’une excavation en une phase, la suspension auto-durcissante injectée demeure dans le sol. Les chantiers du Grand Paris Express utilisent plutôt des procédés en deux phases. Lorsque la tranchée atteint sa profondeur finale, une armature métallique est introduite dans la tranchée, ensuite le fluide de support est extrait par pompage et simultanément remplacé par du béton.

 

Le creusement des fondations spéciales selon Liebherr

 

 

 

Les chantiers du Grand Paris Express sont d’énormes consommateurs de toutes sortes d’engins et d’équipements pour les Travaux Publics et le Bâtiment, depuis les pelles et chargeurs, jusqu’aux banches et tables à béton. ©PP

 

 

 

Transport et pompage du béton

 

 

Les millions de m3 de béton des travaux du Grand Paris au sens large devront être produits, transportés et pompés sur site. Les chantiers les plus importants s’équipent de centrales à béton sur site. Pour les autres, des norias de bétonnières seront nécessaires. Dans tous les cas, il faudra des pompes à béton automotrices sur pneus ou sur chenilles.

 

Putzmeister a créé une division particulière, baptisée Concrete Project Division - pour conseiller ses clients sur l’organisation et l’équipement des grands chantiers à propos de pompage du béton sur longues distances, sur grandes hauteurs, de bétonnage sous l’eau ou encore du pompage de bétons fibrés, plus légers mais à grosse granulométrie.

 

A Intermat 2018, l’entreprise mettait en avant ses bétonnières de 6 à 12 m3 et son savoir-faire dans le développement et la construction de malaxeurs spéciaux : sur rail, en tunnel, avec une ou plusieurs remorques, etc. Pour les grands chantiers, Putzmeister dispose aussi des mâts stationnaires de la gamme MX pour l’épandage du béton, avec des portées horizontales de 23,8 m, 31,6 m ou 35,5 m. Ils peuvent êtres montés soit sur des colonnes spécifiques, soit sur des mâts de grues.

 

Putzmeister mettait aussi en avant sa gamme Pumi pour les petits chantiers. Un Pumi réunit sur un même véhicule à 4 axes, les fonctions pompe, bétonnière et flèche de répartition. Le Pumi 21-3.67 Q, par exemple, comporte 3 bras pliés, capables d’une portée de 20,6 m en hauteur et 16,9 m à l’horizontale et embarque un malaxeur de 7 m3 avec un réservoir d’eau de 650 l et une pompe à béton de 58 m3/heure de débit.

 

Les deux autres modèles de PUMI disponibles chez Putzmeister embarquent le même volume de béton et d’eau, mais poussent les portées verticales à 24,5 ou 27,5 m et les portées horizontales nette à 17,3 ou 20,3 m. Les chantiers du Grand Paris Express vont durer au moins jusqu’en 2030. Nous avons le temps de voir d’autres matériels adaptés lors des prochains salons Intermat.

 

 

 

Putzmeister estime que le marché français est particulièrement friand de ses PUMI, des malaxeurs-pompes 3-en-1 qui associent les fonctions pompe, bétonnière et flèche de répartition. ©PP

 

 

 

La pompe à béton sur chenilles BSC 1409 D4 de Putzmeister est notamment conçue pour les travaux en tunnels horizontaux. ©PP

 

 

 

Tandis que la pompe à béton sur chenilles Wetkret3 de Putzmeister est destinée à la projection de béton dans les tunnels difficiles d’accès avec des pentes inclinées à 30° au maximum. L’engin possède une double motorisation : diesel de 17,9 kW pour ses déplacements et électrique de 11 kW pour la pulvérisation. L’engin est pilotable à distance. ©PP

 

La réalisation des tunnels du Grand Paris Express

 



Source : batirama.com / Pascal Poggi

L'auteur de cet article

photo auteur Pascal Poggi
Pascal Poggi, né en octobre 1956, est un ancien élève de l’ESSEC. Il a commencé sa carrière en vendant du gaz et de l’électricité dans un centre Edf-Gdf dans le sud de l’Île-de-France, a travaillé au marketing de Gaz de France, et a géré quelques années une entreprise de communication technique. Depuis trente ans, il écrit des articles dans la presse technique bâtiment. Il traite de tout le bâtiment, en construction neuve comme en rénovation, depuis les fondations jusqu’à la couverture, avec une prédilection pour les technologies de chauffage, de ventilation, de climatisation, les façades et les ouvrants, les protocoles de communication utilisés dans le bâtiment pour le pilotage des équipements – les nouveaux Matter et Thread, par exemple – et pour la production d’électricité photovoltaïque sur site.
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