Introduction illicite sur le site de Lafarge à Val-de-Reuil : neuf militants seront jugés

Le 10 décembre 2023, lors d'une journée nationale de mobilisation de militants écologistes contre les cimentiers, une centaine de personnes s'introduisaient sur le site industriel de Lafarge à Val-de-Reuil.

Le 10 décembre 2023, lors d'une journée nationale de mobilisation de militants écologistes contre les cimentiers, une centaine de personnes appartenant, entre autres, aux "Soulèvements de la Terre" s'introduisaient sur le site industriel de Lafarge (groupe Holcim) à Val-de-Reuil, dans leur tenue d'apparat traditionnelle : combinaisons blanches, gants et masques.

Action, réaction. Pour cette intrusion lors de cette action climat, dix-sept personnes, tous majeurs, ont été interpellées (seize l'ont été en Normandie, un en Seine-Saint-Denis) puis placées en garde à vue, selon Rémi Coutin, le procureur d'Evreux.

 

 

 

"Le béton tue", selon les militants des "Soulèvements de la Terre"

Sur ce site de Lafarge, les militants avaient empêché l'agent de sécurité de sortir de son local avant de se livrer à "d'importantes dégradations", selon le parquet, et en particulier des tags inspirés, fruits, vraisemblablement, d'un long travail de recherche :

– "Demain sera sans béton ou ne sera pas" ;

– "Lafarge terroriste" ;

– "Le béton tue" ;

– "Drogués au béton ? Qui est votre dealer ? Macron ? Daesh ? JO ?"

 

Ce dimanche 10 décembre 2023, et malgré une interdiction préfectorale, des militants étaient venus manifester aussi près d'un site Lafarge, à Cournon-d'Auvergne. © Laurent Pastural / FTV

 

 

En outre, le symbole des Soulèvements de la Terre, soit ?, un collectif écologiste radical et contestataire français, avaient été relevés à "plusieurs endroits".

 

 

 

450 000 euros de dégradations

En plus des tags, les militants avaient propulsé de la mousse expansive à l'intérieur de plusieurs appareils, introduit du béton dans une arrivée d'eau, ou encore éventré un contenant de billes de polystyrène et des sacs de ciment et brisé des vitres. Une pluralité de dégâts évalués à plus de 450 000 euros.

Toutefois, le jour même, les activistes avaient pu prendre la fuite "à l'arrivée d'une patrouille de police du commissariat de Val-de-Reuil en bousculant les policiers". Une enquête, confiée à la SDAT (Sous-Direction Anti-Terroriste) de la Direction nationale de la police judiciaire et la Direction territoriale de la police judiciaire de Rouen, s'ouvrait alors sous les chefs d'inculpation de séquestration, destructions et dégradations graves en réunion, participation à une association de malfaiteurs et violences sur personnes dépositaires de l'autorité publique sans incapacité.

En parallèle, à cette même date, d'autres actions avaient eu lieu, notamment devant des sites Lafarge en Ardèche, à Paris, dans le Maine-et-Loire, dans l'Allier ou encore dans le Puy-de-Dôme. Selon les professionnels, la production de ciment et de béton représente 8 % des émissions de CO2 mondiales, soit plus que le transport aérien et le transport maritime réunis.

 

 


200 personnes manifestent en soutien aux 17 gardés à vue

À Rouen, dès le lendemain de l'interpellation, et à l'appel du mouvement des Soulèvements de la Terre, quelques 200 manifestants se sont rassemblés en soutien aux dix–sept interpellés, dont Stéphane Martot, le secrétaire régional d'EELV en Normandie : "Il ne faut rien lâcher pour les copains en garde à vue". Même son de cloche du côté d'Alexis Vernier, le conseiller municipal LFI de Sotteville-lès-Rouen et conseiller à la métropole de Rouen, qui s'est insurgé : "On envoie les services de police liés au terrorisme pour une action bon enfant alors que Lafarge est accusé de liens avec Daech". Quant à Sam, un manifestant se disant proche des personnes interpellées, il surenchérit : "Lafarge est l'une des entreprises les plus toxiques du monde. Nous revendiquons l'arrêt définitif de l'artificialisation des sols".

Dans un communiqué, un large panel d'associations, collectifs ou syndicats, dont les fameux Soulèvements de la Terre, ou bien Attac, ou encore la Confédération paysanne de Seine-Maritime, sans oublier l'Union syndicale Solidaires, arguaient que l'intervention avait duré, selon eux, "une dizaine de minutes", s'étonnant de "l'usage récurrent de l'antiterrorisme pour diaboliser spécifiquement les mobilisations qui menacent les lobbys industriels [...]. Elle marque à quel point ce gouvernement leur est inféodé".

 

Une banderole du mouvement des Soulèvements de la Terre. © Loïc Venance / AFP

 

 

 

Neuf militants seront jugés en juin

Alors que neuf des dix–sept militants interpellés seront jugés le 27 juin 2024, cinq d'entre eux ont été placés sous contrôle judiciaire jusqu'à la tenue de l'audience, comme l'indique le procureur d'Evreux, précisant que l'ensemble "des neuf personnes poursuivies seront jugées pour les infractions de séquestration pour préparer ou faciliter la commission d'un crime ou d'un délit avec libération volontaire avant le septième jour, dégradations aggravées par deux circonstances et association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement". En sus, trois d'entre elles le seront pour "l'infraction de refus de se soumettre aux mesures de relevés signalétiques".

Les huit autres interpellés ont été remis en liberté "en raison de l'insuffisance des charges réunies à leur encontre", précise encore le procureur



Source : batirama.com / AFP / Laure Pophillat

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