Enduits à la chaux : quel type d’application en rénovation ?

Conjugant qualités esthétiques et performances techniques, les enduits à la chaux héritent d'une mise en ?uvre ancestrale.

 

La mise en œuvre des enduits traditionnels à la chaux doit répondre à deux principes de base : une application en trois ou deux couches, un dosage en liant (chaux) dégressif entre chaque couche.

 

Chaux aérienne (sa consistance grasse donne des enduits souples, onctueux, très maniables) ou chaux hydraulique, dans tous les cas, c’est le taux de chaux libre qui caractérise la perméance d’une chaux. Plus le taux de chaux libre est élevé, plus le mur respire.

 

Tout un savoir-faire !

 

Tout un savoir-faire notamment lorsque l’enduit est fait “maison”, fabriqué sur le chantier à partir d’un mélange sable + liant + eau + pigments et ce, malgré de nombreuses contraintes comme l’utilisation des sables secs, de bonne granulométrie pour ne pas voir apparaître, avec le temps, diverses pathologies.

 

Pour simplifier les temps de préparation, les fabricants proposent des enduits sous forme de poudre prête à gâcher s’appliquant mécaniquement (deux cou­ches) ou manuellement (trois couches) ou, intermédiaire en­tre l’enduit fait “maison” et le prêt-à-l’emploi, des liants de chaux à mélanger sur chantier avec les sables locaux.

 

 

AVIS D'EXPERT


 
Jean-Jacques Etxeberri
Artisan maçon et lauréat du concours 2011
des Trophées de la Chaux



« Un diagnostic du support est essentiel »

 

« Un diagnostic en profondeur du support est essentiel avant toute intervention pour déterminer le type d’enduit à mettre en œuvre et assurer un résultat durable : appliqué sur un mur fragile, un enduit trop dosé en chaux trop hydraulique et rigide (pauvre en chaux aérienne) peut entraîner une fissuration des enduits ou un arrachement du support.

 

Sur des murs anciens, un enduit très fermé bloque la circulation de la vapeur d’eau et favorise la condensation. La préparation du support est une autre étape indispensable. Les anciens enduits doivent être décrépis ou décapés (lorsqu’ils sont de nature organique), les joints piqués, dépoussiérés à sec.

 

Les murs piqués doivent être asséchés avant la réalisation d’un enduit à la chaux qui peut ensuite s’appliquer en 2 ou 3 couches avec des produits prêts-à-l’emploi ou faits “maison”.

 

Lorsque l’enduit est préparé sur le chantier, ce sont les sables de région et les pigments utilisés qui déterminent la ­couleur et permettent de restituer ­l’harmonie colorée propre à un patrimoine. Ces enduits peuvent également être badigeonnés en fonction des traditions territoriales.

 

Les enduits prêts-à-l’emploi sont, quant-à-eux teintés dans la masse avec des colorants permettant d’obtenir une couleur uniforme. »

 

Solution n° 1 : Manuelle en 3 couches

 

 

C’est la technique traditionnelle par excellence préconisée sur support remis à nu et piqué. Les mortiers utilisés peuvent être faits “maison” ou prêts-à-gâcher mais doivent avoir un dosage en liant dégressif.

 

La première couche, appelée gobetis, régule la porosité au support de maçonnerie, assure l’adhérence des couches ultérieures d’enduit. Projetée en une couche de 5 mm d’épaisseur, la surface de ce mortier fortement dosé en liant doit rester rugueuse pour faciliter l’accrochage de la deuxième couche.

 

Il faut attendre 48?h minimum avant d’effectuer cette seconde couche qui forme le corps d’enduit. Appliqué sur le gobetis réhumidifié la veille, le corps d’enduit de 15 à 20 mm d’épaisseur est appliqué en deux passes ou plus, dressé à la règle, serré à la taloche mais pas taloché pour conserver sa rugosité.

 

Il sert à imperméabiliser et à redresser le support. L’épaisseur cumulée des deux premières couches doit être comprise entre 15 et 20 mm et assurer en tout point un recouvrement d’au moins 10 mm.

 

Après 7 à 9 jours de séchage minimum, selon la nature du liant du corps d’enduit, la dernière étape consiste en une couche de finition de 3 à 7 mm d’épaisseur exécutée en une ou plusieurs passes selon le type de mortier et l’aspect recherché (taloché, lissé, structuré…).

 

En plus de son rôle décoratif, cette couche de finition protège le corps d’enduit pour qu’il conserve toutes ses caractéristiques d’imperméabilisation.

 

Intérêts :

la mise en œuvre permet de retrouver les aspects de façade d’autrefois et de redresser des supports anciens très irréguliers.

Limites :

le dosage en liant des différentes couches de mortier est délicat. Un sous-dosage du gobetis se traduira par une mauvaise adhérence sur le support donc un risque de décollement. Un surdosage du corps d’enduit ou de la finition entraînera une fissuration de retrait. Un temps de mise en œuvre long.

 

Solution n° 2 : Mécanique en 2 couches

 

 

La mise en œuvre, sur supports remis à nus, s’effectue au moyen d’un pot pneumatique ou d’une machine à projeter. Les enduits utilisés sont, la plupart du temps, prêts-à-gâcher, permettant ainsi d’obtenir, à coup sûr, la fluidité adéquate au pompage mécanique.

 

La première couche d’une épaisseur de 10 à 15 mm a un triple rôle : assurer l’adhérence de l’enduit au support, participer à son imperméabilisation et rattraper ses éventuelles irrégularités.

 

Le mortier, fortement dosé en liant, doit être à consistance plastique. Le malaxage est donc à effectuer mécaniquement. Ce corps d’enduit est dressé à la règle mais non taloché pour lui conserver sa rugosité.

 

La deuxième couche va donner sa forme définitive à l’enduit et constituer un complément d’imperméabilisation. Elle ne devra être exécutée que lorsque la première couche aura fait une partie de son retrait.

 

Le délai d’attente est donc de 7 jours minimum. Cette dernière couche de 8 à 12 mm d’épaisseur doit être appliquée sur le corps d’enduit réhumidifié, en une ou plusieurs passes. La compacité du mortier est obtenue par un serrage énergique et uniforme du mortier à la taloche.

 

L’épaisseur moyenne des deux couches doit être de 20 à 25 mm de façon à assurer en tous points un recouvrement d’au moins 15 mm. La finition peut être écrasée, grattée, épongée… seul le lissage à la truelle est déconseillé pour éviter les remontées de laitance ayant pour effet d’augmenter la sensibilité de l’enduit au faïençage et à la fissuration.

 

Intérêts :

l’application mécanique diminue la pénibilité du travail. Il est possible d’utiliser des produits prêts-à-gâcher adjuvantés.

Limites :

l’uniformité d’aspect étant difficile à garantir avec cette technique, l’enduit peut-être complété par une peinture, un badigeon…

 

Solution n° 3 : Mécanique en 1 couche

 

 

Les fabricants proposent des mortiers associant performances des monocouches d’imperméabilisation des constructions modernes et caractéristiques propres aux enduits traditionnels.

 

Également à base de chaux + liant hydraulique, ces mortiers (colorés, à forte épaisseur) sont applicables mécaniquement, sans gobetis, en une seule couche mais passes serrées successives (jusqu’à 5 cm), frais sur raffermi (espacement de 2 à quelques heures pour que la première passe ait “tiré”) et après regarnissage des joints.

 

Selon l’aspect recherché, le nombre de passes et l’épaisseur finale vont varier : pour une finition grattée par exemple, l’enduit est appliqué en une ou deux passes de 15 mm d’épaisseur totale ; une finition ribbée comporte une passe d’au moins 10 mm et une deuxième de 3 mm talochée en imprimant un mouvement vertical, horizontal ou circulaire suivant l’effet désiré.

 

Il est toutefois conseillé d’éviter des épaisseurs supérieures à 20 mm qui risquent d’engendrer des fissurations. Contrairement aux techniques traditionnelles en 2 / 3 couches où chaque couche est constituée d’un mélange ou d’un produit différent, dans le cas présent, c’est le même produit qui est appliqué en corps d’enduit et en finition.

 

Ces enduits, soumis à un Avis technique du CSTB bloquant les échanges gazeux entre l’extérieur et l’intérieur, ils ne sont pas adaptés à la restauration des constructions anciennes en pierre, brique ou torchis.

 

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Source : batirama.com / Virginie Bourguet

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