Metsä Wood : un 3e Hackathon à l'école d'architecture de Nancy

Afin de mieux faire partager sa plateforme collaborative Opensourcewood, le Finlandais Metsä Wood a organisé son troisième Hackathon français à l?école d?architecture de Nancy.

La coopérative Metsä Wood est sans doute la marque finlandaise de systèmes constructifs bois la plus connue en France. Les charpentiers français manient le Kerto depuis des décennies, un peu comme un joker, tant ses performances mécaniques sont exceptionnelles.

 

Le Kerto est un Lamibois ou LVL à base d’épicéa déroulé, recollé à la manière d’un contreplaqué surépais et commercialisé sous forme de panneaux ou, recoupé, en lame ou poteau-poutre. Associé à une âme en OSB, le Kerto est utilisé pour fabriquer des poutres en I ou des caissons de grandes dimensions (Kerto Ripa).

 

Le LVL s’en mêle

 

Longtemps, le Kerto était unique, mais ces dernières années, les fabricants de LVL se sont multipliés de par le monde. Notamment, le géant finlandais Stora Enso, grand rival de Metsä Wood, a installé une unité de production de LVL .

 

Stora Enso qui vise parallèlement au leadership mondial en matière de volumes de production de CLT. De fait, on parle beaucoup de CLT alors que le LVL est peut-être le produit de la génération d’après.

 

Le déroulage de l’épicéa permet une meilleure exploitation de la matière première que le sciage, et l’exemple de la BauBuche de Pollmeier montre qu’il est possible d’appliquer cette technologie aux feuillus. Ce serait formidable de pouvoir valoriser les feuillus français de cette façon, à des fins constructives. Malheureusement, le coût d’investissement dans une ligne de production est si élevé que personne n’a jusqu’ici tenté l’aventure en France.

 

Kerto, le joker

 

En attendant, le Kerto est un produit d’appoint idéal, à condition de savoir en exploiter les capacités. Le LVL de Metsä Wood est commercialisé dans le monde entier et  il a déjà suscité, grâce à des partenariats avec des grandes agences d’architectures, des ouvrages bluffants comme le Parasol de Séville.

 

« Nous nous sommes rendus compte que les architectes du monde entier trouvent au Kerto des usages souvent étonnants et auquel nous n’avons jamais pensé », explique Xavier Colin, le responsable prescription de Metsä Wood France. De fil en aiguille, l’idée de créer une plateforme collaborative autour des produits-phares de Metsä Wood a germé.

 

 

Les quatre équipes imaginent un ensemble de 200 logements étudiants

 

Nouveau monde

 

On connaît le open source comme démarche collaborative dans le monde de l’informatique : les utilisateurs et surtout les programmeurs partagent leurs développement et peuvent puiser chez ceux des autres. La transposition de ce modèle au vieux monde de l’industrie et du bâtiment n’est pas forcément facile.

 

De par le monde, les utilisateurs du Kerto, par exemple, préfèrent garder leurs recettes d’application pour eux. Toutefois, la plateforme de Metsä Wood s’inscrit dans une aventure nouvelle qui est en gros la construction modulaire et le hors site.

 

Les Kerto et les produits dérivés peuvent se faire une place de choix sur ce marché émergent, à condition seulement que les concepteurs prennent en compte les qualités du Kerto en termes de finesse et de robustesse.

 

Tremplin

 

Aujourd’hui, tant les concepteurs australiens, canadiens, européens ou sud-africains sont confrontés aux défis du hors-site. Plutôt que de réinventer la poudre chacun dans son coin, Metsä Wood leur propose de partager leurs solutions, conscient par ailleurs de la créativité incomparable des concepteurs.

 

Selon les Finlandais, la mise en réseau représente aussi une  opportunité de notoriété pour ces acteurs ingénieux, et pourquoi pas un tremplin d’affaires sur un marché qui se globalise.

 

Afin de faire connaître la nouvelle plateforme et de susciter son emploi, Metsä Wood en a dérivé une transposition de la formule de l’Hackathon. A nouveau, il s’agit d’un emprunt du monde informatique, où sont organisés des compétitions en équipes pour relever des défis concrets de programmation.

 

Tout aussi inhabituel dans le Bâtiment que le open source, la formule du Hackathon revient à réunir pour une journée différents type d’acteurs de la construction bois (étudiants, ingénieurs, architectes, industriels), de constituer des équipes mixtes et de les faire plancher sur un sujet précis.

 

La compétition débouche sur une contribution concrète à la plateforme Open Source Wood. De sorte que les participants sauront comment s’y prendre à l’avenir.

 

 

La dernière phase révèle la dextérité des dessinateurs.

 

Quatruple mixte

 

La France est clairement championne des Hackathons de Metsä Wood, dans le sens où elle a déjà accueilli trois événements sur un total de six. Le premier a eu lieu dès le lancement de la plateforme, fin 2017 à l’Ecole Supérieure du Bois de Nantes. Une seconde session a suivi en 2018 à Strasbourg.

 

La troisième et dernière en date s’est déroulée le 21 mars à l’école d’architecture de Nancy. Organisé afin de se greffer sur le 2e colloque Hors-Site du 20 mars, mais aussi en prélude au Forum International Bois Construction, ce Hackathon n’a pas tant mobilisé les étudiants en architecture, pour la plupart partis en stage, que les étudiantes ingénieures de l’ENSTIB d’Epinal.

 

S’ajoutaient des bureaux d’études comme Barthès Bois ou Archimen, des agences d’architecture comme Presle ou Xulontek, des industriels comme PopUp House ou Ami Bois.

 

Trois actes

 

Quatre équipes réparties par les organisateurs se sont pliés aux règles désormais bien établies d’une compétition de 5 heures en 3 étapes. Le sujet était de concevoir 200 logements étudiants, hors site et réutilisables, ce qui a d’emblée guidé toutes les équipes vers la modularité 3D. Par contre, la forte présence des jeunes usagers a quelque peu contrecarré le réflexe d’un empilement de boîte à chaussures.

 

Après une heure de cogitation, un premier tour de table a incité les équipes à formuler leurs idées générales sur l’implantation de l’ouvrage. Les deux étapes suivantes, sur le même modèle, ont conduit progressivement les participants à concentrer leur réflexion sur la conception d’un élément de leur projet à l’aide de la boîte à outils Metsä Wood.

 

Un outil de dessin très utilisé : Sketch up

 

Pour les observateurs extérieurs, le plus surprenant est qu’il sort vraiment quelque chose de tout cela. Non seulement le brassage des équipes et le temps limité stimule la concrétisation des idées, mais la présence d’ingénieurs donnent tout de suite aux idées un tour concret.

 

Enfin, et c’est sans doute l’aspect le plus spectaculaire de l’épreuve, les équipes en lice ont toutes fait preuve d’une incroyable dextérité dans le maniement d’outils de dessin comme Sketch Up.

 

Au final, le jury a eu le plus grand mal à départager deux équipes, dont l’une avait développé intelligemment une approche par modules de 1,5 x 3 m fermés seulement sur deux côtés, ce qui permettait par exemple, entre autres, de constituer des circulations libres de 3 mètres de large.

 

Restait cependant à préciser la solution technique pour la réalisation de ces modules. C’est pourquoi le premier prix est revenu à une équipe qui a pensé et dessiné un module constitué de portiques prenant appui sur un seul côté, les lames verticales de Kerto, à intervalle rapproché, servant par la même occasion de rangements. La face opposée était ainsi dégagée pour une large baie vitrée, ou pour doubler l’espace avec un module du même type en vis-à-vis.

 

Avant-Forum

 

Xavier Colin tirera les enseignements de ce troisième Hackathon français dans le cadre de l’atelier C6 du Forum Bois Construction consacré le vendredi 5 avril à la numérisation. Pour qui veut, les quatre contributions du Hackathon de Nancy sont déjà consultables en ligne sur la plateforme.

 

La solution primée, un concepteur de kiosques en bois pourrait par exemple s’en inspirer à bon escient. Il reste cependant à effectuer tous les calculs et à définir les assemblages. Un jour, sans doute, les bureaux d’études injecteront de telles données en open source, comme les informaticiens du monde entier qui ont voulu créer une alternative aux logiciels standards de Microsoft.

 

En attendant, on se demande si l’industriel ne devrait pas faire l’effort de proposer à partir des propositions une solution calculée, même si cela entraîne des questions de responsabilités.

 

En quelque sorte, il va falloir encore adapter un petit peu ces concepts du monde informatique pour qu’ils soient pleinement opérants dans le Bâtiment. Et pour que le LVL résiste effectivement à la déferlante du CLT.

 

 

 

Présentation finale du travail réalisé par chaque équipe.


Source : batirama.com/ Jonas Tophoven

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