Viessmann persiste et mise gros sur la pile à combustible

Viessmann développe deux technologies de pile à combustible simultanément (PEFC et SOFC) et parie sur un fort développement du marché d?ici 3 ans.

Une pile à combustible, c’est l’inverse de l’électrolyse. Dans une électrolyse de l’eau, un courant électrique traverse l’eau et la décompose en oxygène et en hydrogène. Dans une pile à combustible, on combine de l’oxygène et de l’hydrogène sur une matière particulière, ce qui produit de l’eau pure, de la chaleur et de l’électricité.

 

La plupart des piles à combustibles actuelles ne sont pas directement alimentées en hydrogène. Elles sont raccordées à un réseau gaz naturel. Le gaz naturel contient en effet une forte proportion de méthane (CH4). Le reformer, - c'est un composant clef de la pile à combustible -, extrait l’hydrogène du méthane pour alimenter la partie pile à combustible proprement dite.

 

Le fait qu’une pile à combustible produise de l’eau pure, de la chaleur et de l’électricité, sans aucun sous-produit polluant, en fait une machine idéale dans la perspective du développement durable.

 

 

 

La Vitovalor 300-P est une pile à combustible de type PEFC, développée par Viessmann autour de la pile fournie par Panasonic. ©PP

 

Viessmann développe deux piles à combustible différentes

 

C’est visiblement ce qui pousse Viessmann à investir en même temps dans deux technologies de piles à combustibles différentes, tout en arrêtant le développement d’autres technologies de micro-cogénération, comme les chaudières à moteur Stirling.

 

Le premier type de pile à combustible, le plus avancé, déjà disponible et commercialisé en France, est un co-développement avec le japonais Panasonic, entamé en 2012. Panasonic fournit la pile à combustible proprement dite, de technologie PEFC pour Proton Exchange Membrane Fuel Cell.

 

Viessmann développe le reformer et tout ce qui entoure la pile à combustible pour l’adapter au marché européen et parvenir au système complet : le Vitovalor 300-P. Le second type est mis au point par Hexis, une société suisse qui appartient en totalité à Viessmann depuis 2015. Hexis développe une pile SOFC pour Solid Oxyde Fuel Cell ou pile à combustible à oxyde solide : la Vitovalor 300-S.

 

 

Les piles à combustible Vitovalor 300-P sont alimentées en gaz naturel. Un reformer (en bas à droite) extrait l’hydrogène du gaz naturel pour alimenter la pile. Une chaudière murale gaz à condensation (en haut à gauche) complète l’installation. ©Viessmann

 

Un plan d’amélioration jusqu’en 2019

 

Lors d’une visite du Centre de Recherche (Technikum) de Viessmann à Allendorf en Allemagne le 18 octobre dernier, Jean-Pierre Vial, responsable produit des piles à combustible, a présenté la roadmap (plan de développement) pour les deux piles à combustible Vitovalor 300-P et -S.

 

Pour l’instant, la Vitovalor 300-P offrira une puissance électrique de 0,75 kW, une puissance thermique de 1,10 kW avec une température de fonctionnement de 1000C dans la pile, un rendement électrique de 37% et un rendement global de 92% sur PCS. Elle est peu bruyante - <43 dB(A) – et la pile est donnée pour une durée de vie de 70 000 heures aujourd’hui, 80 000 heures en 2019. Ce qui, avec 4 000 cycles marche-arrêt, se traduit par 10 ans de fonctionnement aujourd’hui, 12 ans en 2019.

 

Pendant la durée de vie de la pile, son rendement de production d’électricité baisse de 15% et atteint environ 28% en fin de vie. Une Vitovalor 300-P subit chaque jour un cycle de régénération pour limiter la dégradation du rendement de production d’électricité. Durant cette période, elle ne produit ni électricité, ni chaleur. Mais la chaudière associée fonctionne normalement.

 

Depuis août 2017, Viessmann a réduit la hauteur de la Vitovalor 300-P à 2 m contre 2,25 m auparavant. Elle est accompagnée d’une chaudière gaz murale à condensation de 25 kW contre 19 kW auparavant et d’un ballon d’ECS de 300 l pour un débit de puisage d’ECS de 33 l/minute.

 

 

 

Avant que Helix soit acquise par Viessmann en 2015, sa pile à combustible SOFC s’appelait Galileo. Rebaptisée Vitovalor 300-S, elle offre un meilleur rendement de production d’électricité, mais moins de souplesse d’exploitation que la pile PEFC. ©Viessmann

 

Plus compacte, mais un prix non-négligeable

 

En 2018, Viessmann proposera la partie pile à combustible seule, avec un kit permettant de la raccorder à une chaudière gaz existante, murale ou au sol. La température maximale de retour du circuit de chauffage a été portée à 50°C, de manière à adapter la Vitovalor 300-P non-seulement à la construction neuve, mais aussi à la rénovation. 

 

En 2019, enfin, la chaudière murale gaz associée passera à 32 kW de puissance pour augmenter les performances d’ECS. La période d’entretien de la pile à combustible passera à 5 ans et la durée de fonctionnement quotidienne atteindra 22 heures plus 2 heures de régénération. Viessmann propose à ses clients une assurance sur 10 ans, qui englobe la maintenance et le remplacement des pièces.

 

La Vitovalor 300-P est commercialisée en Allemagne et en France. En Allemagne, Viessmann la vend à l’installateur 12 749 € HT. En comptant la marge de l’installateur (30%), les accessoires, la pose et la TVA, cela donne un prix de vente TTC au client final de 26 097 € sur le marché allemand. En déduisant les subventions disponibles en Allemagne pour les pile à combustibles domestiques, le prix réel pour le client final est de 16 000 €.

 

En France, compte-tenu d’une subvention de 2000 € accordée par GrDF pour les cinquante premières machines installées et d’une aide Européenne, le client final paye sa Vitovalor 300-P environ 10 900 € TTC. Viessmann envisage de vendre 900 Vitovalor 300-P en 2017, 1500 en 2018 et 40 000 en 2019.

 

 

La Vitovalor 300-S est un développement entièrement européen. La pile est en partie haute, un échangeur de chaleur en dessous est alimenté à la fois par la pile et par le module chaudière gaz à condensation. Le reformer pour l’extraction de l’hydrogène depuis l’alimentation en gaz naturel et l’inverter pour la régulation du courant électrique produit par la pile se trouvent en partie basse. ©Viessmann

 

> 90% de rendement pour la pile SOFC

 

Par rapport à la technologie PEFC de Panasonic, la pile SOFC Vitovalor 300-S de Viessmann, développée par sa filiale suisse Hexis, fonctionne à 800°C, offre des puissances électrique et thermique variables : 0,4 à 1,5 kWel, 0,5 à 1,9 kWth. Son rendement électrique atteint 40% et son rendement global sur PCS dépasse 90%.

 

Avec un niveau sonore inférieur à 50 dB(A), elle est un peu plus bruyante que sa proche cousine PEFC. Elle requiert une maintenance tous les deux ans. La durée de vie de la pile atteint 40 000 heures, mais elle ne peut pas être arrêtée facilement. Sur une durée de vie de 10 ans, seulement 50 cycles de marche-arrêt sont prévus.

 

La Vitovalor 300-S est accompagnée d’une chaudière gaz modulante à condensation de 20 kW. La Vitovalor 300-S et la Vitovalor 300-P seront dotées d’une connexion en WiFi dès 2018 (communication en TCP/IP et donc un Webserver dans chaque machine). Les applications gratuites, Vicare pour le client final et Vitoguide pour l’installateur – sauront les prendre en compte, ainsi que tous les autres générateurs Viessmann.

 

Encore des marges de progression sur la technologie SOFC

 

La Vitovalor 300-S n’est pas vendue en France. Sur le marché allemand, Viessmann la vend 17 000 € HT à l’installateur. Avec la marge de l’installateur (30%), les accessoires, l’installation et la TVA, cela aboutit à un prix TTC de 34 050 € pour le client final. Avec les subventions disponibles, ce coût est ramené à 18 000 € pour le client final.

 

Viessmann n’indique pas d’objectif de vente pour la Vitovalor 300-S. Mais l’entreprise indique qu’il existe encore des marges de progression sur cette technologie SOFC : rendement électrique accru, durée de vie plus longue, etc. Bref, Viessmann garde la foi.

 

Là où la quasi-totalité de ses grands concurrents européens ont jeté l’éponge face aux coûts et aux difficultés du développement des piles à combustible, Viessmann persévère. C’est un pari. Pour autant, comme le montrera le prochain article, l’entreprise ne met pas tous ses œufs dans le même panier.



Source : batirama.com / Pascal Poggi

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