Coup d’envoi des ordonnances Macron 

Le Projet de loi habilitant le gouvernement à prendre par ordonnance des mesures pour le renforcement du dialogue social va être discuté devant le parlement.

Rappelons que l’article 38 de la Constitution de 1958 permet au gouvernement de légiférer par ordonnance sur habilitation du Parlement, qui précise dans quels domaines et pendant quelle durée le Gouvernement peut prendre des dispositions à caractère législatif.

 

Le texte qui prévoit le renforcement du dialogue social tant dans l’entreprise que dans la branchesera discuté à compter du 4 juillet. Un des points importants de ce texte est la limitation et la sécurisation des contentieux

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Plusieurs mesures importantes sont prévues.

 

On sait aujourd’hui qu’une irrégularité de procédure peut entraîner un licenciement sans cause réelle ni sérieuse (ex : lettre de licenciement non motivée ou insuffisamment motivée). Il est prévu de revenir sur ce principe.

 

Raccourcir les délais de contestation

 

Un levier permettant de limiter le risque contentieux est celui de la prescription. Un bref délai de contestation découragera immanquablement les salariés qui disposeront de peu de temps pour s’informer et organiser leur défense, mais également il éteindra toute action ultérieure et interdira au juge d’examiner la licéité de contrats antérieurs.

 

L’analyse du droit comparé indique que les délais de contestation suite à un licenciement sont souvent brefs. Ainsi, le droit allemand fixe à trois semaines le délai d’introduction de l’instance à compter du terme du contrat ; le droit espagnol fixe ce délai à 20 jours. Il est de trois mois en doit belge ou luxembourgeois, 60 jours ouvrables au Chili, quatre mois en Suède….

 

S’agissant de la France, on se souvient qu’avant la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, la prescription était de 5 ans en matière de salaire et de… 30 ans en matière de dommages intérêts.

 

Des délais revus à la baisse en 2013

 

Toutefois, la discussion reprit en 2013 et la loi de sécurisation de l’emploi n° 2013-504 du 14 juin 2013 modifia encore ces délais à la baisse : l'action en paiement ou en répétition du salaire passait désormais de 5 à 3 ans à compter du jour où celui qui exerce une action en justice a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

 

Quant à l’action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail, elle se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. Ce schéma connaît toutefois des exceptions Le projet de loi d'habilitation prévoit une fois de plus de "réduire les délais de recours contentieux en cas de rupture du contrat de travail".

 

Instaurer un référentiel obligatoire de dommages-intérêts

 

Ce souhait de plafonner les indemnités de rupture abusive afin d’ôter aux employeurs toutes les craintes et contraintes économiques excessives en cas de licenciement, peut tout à fait se comprendre. Qui plus est, il serait paradoxal de rejeter le plafond des indemnités de rupture abusive et de l’admettre (comme cela est le cas en droit français) pour les indemnités de rupture elles-mêmes.

 

Les professionnels savent bien que toute contestation d’un licenciement par un salarié constitue une épée de Damocles pour le chef d’entreprise. Encore faut-il déterminer un barème équilibré pour toutes les parties !

 

Suggérons la mise en œuvre d'un système de plafonnement simple, pratique, proche du terrain (et s'inspirant des conditions de mise en œuvre du référentiel devant le bureau de conciliation).

 

Ce système pourrait aboutir à trois mois de salaire si le salarié justifie chez l'employeur d'une ancienneté inférieure à deux ans, six mois de salaire entre deux ans et moins de huit ans d'ancienneté, dix mois de salaire entre huit ans et moins de quinze ans d'ancienneté, quatorze mois de salaire entre quinze ans et vingt-cinq ans d'ancienneté, dix-huit mois de salaire si le salarié justifie chez l'employeur d'une ancienneté supérieure à vingt-cinq ans.

 

Sécuriser les contestations en cas d'inaptitude

 

Le projet de loi d'habilitation entend revenir sur la loi Travail qui a modifié les règles relatives à l'inaptitude. Le texte entend sécuriser les modalités de contestation de l'avis d'inaptitude.

 

A peine la loi Travail  promulguée et le décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017 publié au JO, il va falloir réformer la réforme !Le projet de loi d'habilitation prévoit également de "clarifier les obligations de l'employeur en matière de reclassement pour inaptitude".

 

Favoriser la conciliation

 

En 2014, un rapport effectué par le français Alain Lacabarats alors président de la Chambre sociale de la cour de cassation, constatait que la juridiction prud'homale « ne fonctionne pas dans des conditions conformes aux exigences des standards européens et connait de graves carences ».

 

Deux arguments pouvaient motiver cette affirmation : alors que les conseils de prud'hommes connaissent un plus faible nombre d'affaires par rapport aux tribunaux de commerce, aux tribunaux d'instance et aux tribunaux de grande instance, leurs délais moyens de jugement et leurs taux d'appel étaient du double ou du triple des autres juridictions.

 

Qui plus est, alors que 90% des litiges devant les conseils de prud’hommes au XIXe siècle étaient réglés par la conciliation, ce chiffre serait aujourd’hui de 6% Il semble que le gouvernement entende franchir un pas supplémentaire en prévoyant "d'encourager le recours à la conciliation devant la juridiction prud'homale en modifiant les règles de procédure applicable durant la phase de conciliation".



Source : batirama.com / François Taquet

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