Intown : le retour performant de la PAC sur boucle d’eau

L?ancien siège de la SNCF a laissé la place à un immeuble à haut niveau énergétique. Pour s?adapter aux contraintes, il reprend le concept des pompes à chaleur sur boucle d?eau.

Comment traiter le confort de quelque 21 300 m² de locaux tertiaires rénovés tout en contournant les difficultés techniques et architecturales d’une rénovation ?

 

En participant à l’équipement thermique de l’immeuble Intown, propriété de Scor, situé près de la gare Saint-Lazare, dans le 9e arrondissement de Paris, l’industriel rennais France Énergie apporte une solution spécifique et riche d’enseignements.

 

Situé à l’angle de la rue de Londres et de la place de Budapest, cet ouvrage conçu fin des années 70 a été livré à la SNCF en 1980 qui en a fait son siège social. Acquis par le réassureur Scor en 2002, il vient d’être inauguré début mars dernier ; ce R+6 composé de plateaux d’environ 3 000 m² sera uniquement occupé par la Banque de France.

 

Un bâtiment délicat à rénover

 

La nouvelle architecture produite par l’Agence d’Architecture A. Bechu & Associés, mandataire du projet, en association avec l’agence François Leclerc, urbaniste, et avec Volume ABC pour l’aménagement intérieur, devait relever de nombreuses contraintes.

 

La partie ancienne porte l’une des caractéristiques principales des constructions tertiaires de cette période : une hauteur sous-plafond réduite – 2,55 m dans la plupart des cas, 2,60 m et 2,70 m dans quelques étages – qui occasionne un réel manque d’espace pour les passages de gaines.

 

Cet immeuble – un grand quadrilatère aux limites de son foncier avec un vaste patio – a par ailleurs été complété d’un immeuble-passerelle en travers de la cour intérieure. Le défi consistait donc à trouver une solution idoine pour traiter les volumes derrière quatorze façades différemment exposées

 

 

L’ouvrage initial a été complété d’un bâtiment-passerelle qui divise le patio. Les hauteurs sous plafond sont d’environ 2,55 m. ©Photos B. Reinteau

 

Des pompes à chaleur sur boucle d’eau

 

Pour chauffer, rafraîchir et ventiler, les concepteurs avaient dans un premier temps prescrit un traitement d’air par centrales avec une distribution par gaines verticales et circulation en allège.

 

Mais les faits sont têtus, et les contraintes aussi basiques que les poutres en travers du cheminement ou la réduction de la gêne visuelle et sonore des équipements en terrasses ont eu raison de cette disposition classique.

 

En contact avec l’entreprise générale Bouygues Rénovation Privée, France Énergie a proposé sa solution basée sur des unités thermodynamiques de confort intérieur (UtCI).

 

 

Posées en allège, les unités de confort intérieur (UTC) conçues par France Énergie, sont dimensionnées pour traiter deux ou trois trames.

 

En clair, un module en allège composé d’une petite pompe à chaleur eau/air capable d’assurer le chauffage et la climatisation sur une boucle d’eau tempérée, et un petit groupe de ventilation double flux.

 

Justement, afin d’alimenter la boucle d’énergie, l’immeuble Intown est sur le trajet des réseaux de chaleur urbain CPCU (Compagnie parisienne de chauffage urbain) et de distribution d’eau glacée Climespace.

 

 

Ces modules compacts d’une puissance maximale de 800 ou 1 000 W sont alimentés en énergie par une boucle d’eau à basse température.

 

Réseaux de chaleur et apports gratuits

 

La proposition de ce fournisseur présentait des avantages en termes d’adaptation à cette construction, mais elle devait répondre à un cahier des charges précis et pointu – compacité, silence, souplesse d’aménagement des espaces de bureaux…

 

Car la solution rappelle celles mises en œuvre dans de nombreuses tours dans les années 60-70 et pouvait légitimement soulever la crainte de désagréments tels que le bruit, l’encombrement, l’hygiène, la voracité énergétique… D’autant qu’avec un module pour deux ou trois trames de 1,35 m chacune, l’immeuble allait devoir être équipé de 700 appareils dotés d’un compresseur d’une puissance à plein régime de 800 ou 1 000 W.

 

Mais les arguments en faveur de cette solution méritaient d’être entendus. Déjà, en s’affranchissant des gaines et circulations aérauliques, le maître d’ouvrage était sensible au gain d’environ 400 m² de plateau. Ensuite, l’hydraulique et le génie climatique allaient prendre le relais.

 

 

Henri Marraché, directeur général de France Énergie, devant un exemplaire d’unité compacte de chauffage, rafraîchissement et ventilation.

 

Une sous-station CPCU

 

Pour cette rénovation promise à un haut niveau environnemental – labels HQE Bureaux de niveau « Exceptionnel », BBC et Breeam « Very Good » – et équipée d’une façade thermiquement performante, France Énergie a conçu des unités fonctionnant avec une température d’eau très basse.

 

Cette énergie est fournie par une sous-station CPCU dotée de deux échangeurs de 600 kW, et par une sous-station Climespace à deux échangeurs de 600 kW. En été, la température de départ est fixée à 10 °C pour un retour à 18 °C ; en hiver, l’alimentation en eau à 18 °C revient en local technique à 10 °C.

 

Le circuit hydraulique séparé en deux boucles principales – une pour chaque façade opposée – qui, chacune, fonctionne en recirculation afin d’épuiser le gisement thermique jusqu’aux limites de consigne.

 

 

La chaleur et le froid sont fournis par des sous-stations CPCU et Climespace.

 

Ce qui signifie qu’entre ces seuils (10/18 °C), les réseaux urbains sont très peu sollicités, les pompes à chaleur des UtCI assurant le confort de manière quasiment autonome. Un tel niveau de source froide permet d’assurer des coefficients de performance élevé des unités décentralisées : 7 en mode chauffage et 7,2 en mode rafraîchissement.

 

Cette solution globale a aussi permis d’éviter l’installation d’équipements de production de froid en terrasse ou en sous-sol. Les terrasses ont ainsi été aménagées en aires de repos paysagées.

 

 

Les terrasses sont vides de tout équipement thermique. Elles ont été végétalisées et habillées d’une dalle, d’un banc et de muret en Ductal, un béton blanc de très haute performance mis au point par Bouygues il y a près de vingt ans.

 

Ventiler sainement et discrètement

 

Chacune de ces unités décentralisées ventile les locaux. Une prise d’air neuf et un rejet sont placés en façade. Esthétique oblige, les bouches rondes sont reliées à une grille de format rectangulaire qui circule sous les appuis de fenêtres. Le traitement architectural de la façade les efface du regard.

 

Pour assurer la qualité d’air intérieur, l’unité est équipée d’une filtration F6/F8, c’est-à-dire, capable de retenir des particules très fines. Les débits peuvent aller largement au-delà de la consigne réglementaire de 25 m³h.

 

Les unités de confort sont intégrées dans le mobilier périphérique des espaces de travail et intercalées entre les rangements. Conçues pour des locaux tertiaires en perpétuel réaménagement, ils peuvent être débranchés du réseau par les robinets et intervertis pour des raisons de puissance…

 

 

Entrée d’air neuf et sortie d’air vicié sont cachés en façade derrière un bandeau grillagé qui file sous les appuis de fenêtre.

 

Une consommation d’énergie de - 40 % par rapport à du classique

 

Par ailleurs, les espaces de réunion sont dotés de modules où chauffage/rafraîchissement sont dissociés de la ventilation. Ce qui permet d’utiliser des modules plus puissants et d’un débit d’air plus important.

 

Cette solution adaptée à ce site se distingue aussi par son intérêt en termes d’investissement, de maintenance. Pour le maître d’ouvrage délégué Bouygues Immobilier, cette solution revient globalement à l’installation d’une climatisation basique deux tubes / deux fils.

 

Quant à la consommation d’énergie, elle serait 40 % inférieure à celle d’un équipement classique. Ce choix évite aussi une somme considérable de suivi d’installations thermodynamiques et les inconvénients d’un encrassement des gaines de ventilation ; si le changement de 1 400 filtres pèsera dans le budget d’exploitation, la qualité d’air sera largement mieux maîtrisable.

 


Source : batirama.com/ Bernard Reinteau

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