La Capeb s’inquiète de la disparition des qualifications professionnelles

Le projet de loi Sapin II, inquiète les artisans de la Capeb. L?organisation craint que la politique actuelle du gouvernement ne finisse par « tuer l?entreprise classique ».

L'article 43 du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique inquiète profondément la Capeb. Ce projet propose de supprimer l'exigence de qualification professionnelle qui existe aujourd'hui pour exercer un certain nombre d'activités artisanales,

 

Son président, Patrick Liébus, s’est ainsi exprimé devant la presse pour manifester une nouvelle fois son inquiétude face aux décisions gouvernementales. Il observe en effet que l’article 43 du projet envisage de modifier l’article 16 de la loi Raffarin du 5 juillet 1996.

 

Or, celui-ci stipule que « la construction, l’entretien et la réparation des bâtiments ne peuvent être exercés que par une personne qualifiée professionnellement ».  Dans le projet de loi, les obligations de qualification professionnelle applicables aux activités artisanales découleront en effet de deux critères.

 

Révision des critères pour l’obligation de qualification

 

Le premier critère concerne le risque pour la santé et la sécurité des personnes (consommateurs comme professionnels) et, le second, l’activité effectuée au sein d’un même métier et non plus le métier dans son ensemble (à titre d’exemple, le montage d’un mur porteur exigera une qualification…mais pas celui d’une cloison !).

 

Ce que déplore la Capeb tient en plusieurs points. En premier lieu, la suppression du critère de la complexité des métiers, qui ne tient pas compte de l’évolution des techniques, ni de l’augmentation du nombre des normes qui accompagnent ces innovations technologiques.

 

A cela s’ajoute la RT 2018, qui fait également évoluer très rapidement les métiers, allant encore plus loin en termes de performances énergétiques, d’environnement, de qualité de l’air et d’énergies renouvelables.

 

Destructuration du secteur artisanal

 

« On ne tient pas compte de l’évolution de nos métiers, s’insurge Patrick Liébus. Sans compter les normalisations de Bruxelles qui compléxifient encore nos missions. » Autre grief important : le « saucissonage »  des métiers, désormais définis par une « addition «  d’activités, qui équivaut pour la Capeb à une déstructuration du secteur artisanal du bâtiment.

 

« Il est impossible de scinder les métiers entre une partie relevant d’une qualification professionnelle et une autre n’en relevant pas. Il ne peut pas y avoir un maçon à deux vitesses ».

 

Les artisans redoutent également la suppression des qualifications professionnelles initiales et exigibles à l’installation d’une entreprise. Une suppression qui va conduire inévitablement à une hausse de la sinistralité et, partant à une hausse prévisible des primes d’assurance pour toutes les entreprises.

 

Hausse des primes d’assurances ?

 

D’autant que, n’étant plus en mesure de disposer des critères objectifs liés aux qualifications initiales, les assureurs pratiqueront une révision de leurs tarifs. « La loi Raffarin sécurisait les artisans et leurs clients en obligeant à une qualification professionnelles. Les professionnels devront-ils pratiquer leur métier sans aucune assurance ? », s’interroge Patrick Liébus.

 

La profession avait pourtant fait de gros efforts pour la montée en compétences des professionnels du bâtiment, notamment depuis le premier Grenelle de l’Environnement, puis du programme PACTE pour la transition énergétique.

 

A ce jour Qualibat dénombre ainsi 65 000 qualifications RGE et 89 000 stages de formation dispensés aux entreprises. « Nous sommes face à des ministres dont une partie disent qu’il faut monter en compétence (Ségolène Royal), tandis que l’autre dit l’inverse (Michel Sapin). 

 

Or la véritable valeur d’un ouvrier du bâtiment, c’est sa qualification !», martèle Patrick Liébus, qui s’inquiète aussi du fait que ces dispositions seront officialisées par un décret pris en Conseil d’Etat et ne seront donc pas soumises à l’avis des professionnels.

 

Le problème des micro-entreprises

 

Le président de la Capeb a par ailleurs rappelé que, dans son article 37, le projet de loi Sapin indique le doublement du seuil de la micro-entreprise sur deux années, permettant de bénéficier de la franchise de TVA de 65 800 € au lieu de 32 900 € en prestations de services.

 

 «  Ceci n’est rien d’autre qu’un bel avantage fiscal accordé à ce type d’entreprises, au détriment de nos entreprises artisanales. En outre, 40% des auto-entrepreneurs sont dans ce régime pour un complément de revenu et ne créent pas d’autre emploi que le leur», précise-t-il.

 

Pour enfin conclure : « Si l’on ajoute à tout ceci l’ouverture sans frein des travailleurs détachés, on voit que le gouvernement a trouvé toutes les solutions pour tuer l’entreprise classique ».



Source : batirama.com / Michèle Fourret

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