Individualisation des frais de chauffage : les raisons d’une polémique (1/2)

Le décret sur l'individualisation des frais de chauffage selon la quantité de chaleur réellement consommée en immeubles collectifs fait débat.

La déception risque en effet d’être au rendez vous dès janvier 2017…

 

Débattue depuis le début des années 70, déjà présente dans les lois Grenelle de 2009 et 2010, et remise en avant dans les articles 26 et 27 de la loi de transition énergétique d’août 2015, la répartition des frais de chauffage sur la base de la consommation réelle des résidents fait actuellement l’objet de joutes verbales homériques.

L’Association de Journalistes de la Construction a réuni début mars, au siège parisien de la Capeb, une tribune d’intervenants pour faire le point sur ce sujet. Ce premier article fait le point sur les sujets de conflits.

Les sujets de conflits sont en effet nombreux : la date d’application mentionnée dans les premières versions du décret d’application de l’article 26, le 1er janvier 2017, est jugée précipitée ; le coût de mise en œuvre serait élevé ; la pénalité de 1 500 € par immeuble en cas de non-respect de la mesure est très mal perçue ; cet équipement ne produirait qu’une maîtrise partielle de la charge de chauffage ; et ce texte risque de générer des conflits de voisinage.

 

 

Le débat animé par l'AJC donnait la parole à Bruno Macré, directeur de Techem, Hervé de la Giraudière, directeur général adjoint d'Immobilière 3F, Rachid Laaraj, directeur général de Syneval, Christian Cardonnel, président de Cardonnel Ingénierie et David Rodrigues, juriste de l'association CLCV.

 

Répartir sur des bases réelles



Pour en finir avec une répartition des frais de chauffage aux tantièmes dans les immeubles collectifs équipés d’un chauffage central, l’idée de mesurer les quantités réelles de chaleur consommée est présentée comme plus égalitaire et équitable : on ne paie que ce que l’on consomme !

Déjà, ce postulat est vivement critiqué. Surtout, pour y parvenir, il faut équiper les appartements.
Deux cas de figures existent. Le premier, et le plus courant (90 % des cas), est celui des immeubles dotés d’un réseau de distribution vertical.

On utilise alors des répartiteurs de frais de chauffage. Ils se fixent sur la face avant de chaque radiateur de l’appartement (au milieu et aux trois quarts de sa hauteur). Ces appareils dûment normés (NF EN 834) doivent être calibrés selon le pouvoir calorifique des émetteurs.

Retard en matière de comptage d’énergie



Le second cas est celui des réseaux de distribution horizontaux vers chaque appartement depuis une colonne technique (10 % des immeubles en France). La solution proposée est celle du compteur d’énergie, un équipement dérivé du comptage d’eau qui mesure le débit d’eau de chauffage et, à l’aide de deux sondes, les températures sur les canalisations aller et retour du logement. Des modèles à ultrasons peuvent aussi être exploités.

Selon Bruno Macré, directeur général de l’entreprise Techem, fournisseur de répartiteurs et compteurs d’énergie, 150 millions d’appareils de ce type sont en exploitation en Europe depuis déjà des décennies… et 10 % du parc en France.

Le retard est patent, puisque 2,3 millions de logements en copropriété et 1,3 million de logements sociaux doivent en être munis. Pour lui, ce matériel a réellement la vertu de réduire les consommations d’énergie d’environ 20 %. En se basant sur une dépense de chauffage de 900 € par an, il note un gain net annuel d’une centaine d’euros.

Des compteurs et des thermostatiques



Les gestionnaires proposent le montage de ces équipements dans le cadre de contrat, généralement d’une durée de dix ans. Sur cette base, selon Bruno Macré, le coût des répartiteurs est d’environ 40 € par an et par appartement, celui des compteurs d’énergie de 70 € par an par appartement. Dans les deux cas, les relevés s’effectuent à distance.

Le décret d’application de l’article 26 de la loi de transition énergétique n’en reste cependant pas là. Il précise qu’avant la pose des compteurs d’énergie, les radiateurs devront être équipés de robinets thermostatiques. Mesure élémentaire, mais coûteuse.

Venu présenter le cas de l’Immobilière 3F, Hervé de la Giraudière, directeur général adjoint de ce bailleur social, détaille ce dernier point : « Sur 78 000 logements en Île-de-France, 51 000 sont dépourvus de thermostatiques. Leur installation coûtera 21 millions d’euros. » On rencontre la même situation dans le logement collectif privé.

Notre second article évoquera les problématiques liées au fonctionnement thermique des logements et des copropriétés.

 

 

Source : batirama.com / Bernard Reinteau

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