Maçonnerie de pierre traditionnelle : structure ou décor ?

Maçonnerie de pierre traditionnelle : structure ou décor ?

Mur massif à l’ancienne, mur de parement associé à un autre matériau, ou simple habillage, la pierre offre de multiples possibilités aux amoureux d’une esthétique traditionnelle, ou résolument moderne.




 

Souvent associée à la restauration du patrimoine, la pierre serait aussi présente dans 10 à 15 % des logements neufs. Elle totalise 6 à 8 % des matériaux de construction. Mais le marché de la pierre de construction est en perte de vitesse depuis deux décennies. De nombreuses carrières artisanales ont fermé leurs portes en dépit d’une matière exploitable abondante. La pierre naturelle pourrait bénéficier du regain d’intérêt que connaissent les matériaux naturels avec les impératifs de développement durable. A condition que la filière développe une offre accessible au grand public.

 

Un label Européen


Le label européen Pierre Naturelle, mis en place fin 2008, est un premier pas dans ce sens. Quelques pratiques ressurgissent dans l’habitat collectif, comme la construction en blocs homogènes tendres. Dans l’individuel, l’essentiel de la demande reste la maçonnerie traditionnelle, dite “limousinerie”. Quelles que soient les mises en œuvre, la pierre massive se heurte à des exigences de performances fortes : RT 2005 et bientôt RT 2010… Toutefois, ce matériau noble a des atouts dans des constructions hybrides qui l’associent à des matériaux complémentaires, modernes ou traditionnels…

 

Source: batirama.com / E. Jeanson

 




 

Solution n° 1 : La pierre massive

 

1 • L’appareillage de blocs taillés (pierre dimensionnée)

 

structure1-406.jpgSur toute une façade ou limité aux encadrements des ouvertures, il demande un calepinage précis. Les blocs, bruts ou prétaillés, souvent en 50 x 30 et 25 x 30 cm d’épaisseur, sont façonnés et réajustés sur site (sauf les éléments techniques, taillés en atelier), puis posés sur un mince lit de mortier de chaux hydraulique naturelle et sables locaux, généralement dosé selon une recette “maison”. Les appuis des ouvertures, les sorties de toit, sont constitués de pierres plus dures, de même que le soubassement, une ou deux rangées de blocs levés sur des fondations “classiques”. Pour la première assise, le mortier est souvent plus fortement dosé en liant.

 

2 • La maçonnerie de moellons (pierre de forme quelconque et de dimensions variables, dont la face de parement est brute ou travaillée).

 

structure2-406.jpgElle demande une grande quantité de mortier bien dosé en chaux, dans lequel est noyée aléatoirement de la pierre “tout venant” ou du moellon équarri, sur une épaisseur d’environ 45 cm. Aligné de chaque côté, le mur de moellons demande une technicité particulière et du temps (8-9 h de travail par m²) : 2 équipes travaillent face à face. Les levées, de 60 à 80 cm de hauteur maximum par jour, sèchent en 2 ou 3 jours. Traditionnellement, la partie centrale est souvent comblée avec de petites pierres, bois, paille, chanvre…, qui réalisent une isolation partielle. Le jointoiement est réalisé au mortier chaux-sable ou au mortier pierre, ou bien la maçonnerie est couverte d’un enduit à la chaux permettant les échanges gazeux.

 

A RETENIR :

 

Intérêts : confort d’été lié à la forte inertie du matériau ; mur respirant” qui régule l’humidité intérieure ; matériau naturel et durable répondant aux critères de la démarche HQE : bilan carbone très intéressant, extraction peu “impactante”, réutilisable à l’infini, déchets réemployés ; esthétique et harmonie avec le milieu environnant ; entretien peu onéreux, comparé à une solution béton (ravalement considérablement retardé) : plu-value du bâti.

 

Limites : construction pas aux normes ; résistance thermique quasi nulle et étanchéité pas toujours assurée. Pour obtenir une résistance thermique correcte, un mur massif, de 20-22 cm par exemple, sera nécessairement isolé par l’intérieur, de 10 cm de laine de verre, roche, bois, chanvre… ; exigence d’une main d’œuvre qualifiée ; coût à peu près équivalent dans les 2 cas, supérieur à une construction ordinaire (autour de 500 €/m²).

 

Remarque : en collectif, la pierre massive peut s’avérer moins chère que le béton et la pierre agrafée (4 postes de main d’œuvre : mur en parpaings, pierre agrafées, doublage isolant intérieur, finition). En épaisseur relativement mince (20 cm), elle ne nécessite que 3 postes : le mur de pierre qui fait parement extérieur, le doublage isolant intérieur et la finition (en forte épaisseur, dans certaines conditions, on pourrait même se passer d’isoler et elle pourrait aussi servir de parement intérieur !).

 




 

Solution n°2 : Le parement maçonné

 

1 • Cas d’un mur double

 

- En Bretagne, un mur de granit de 15 cm est couramment doublé de béton banché et isolé.

 

structure3-406.jpg- En région Centre, un mur de moellon et encadrements en pierre taillée de calcaire, est souvent doublé d’un mur isolant, en brique monomur ou béton cellulaire, épais de 25 à 30 cm qui lui sert de coffrage. L’épaisseur de pierre, de 20-22 cm, est maçonnée contre le mur intérieur, selon le même principe que précédemment, et liée par agrafage : des “épingles” métalliques saillent du mur isolant et sont liaisonnées au joint de mortier.

 

- La paroi extérieure en pierre peut aussi être doublée par une seconde paroi poreuse, séparée de la première lame d’air continu. L’espace peut également être partiellement rempli par une isolation thermique (laine de verre, de chanvre, etc.)

 

A RETENIR :

 

Intérêts : plus économique car le mur intérieur est monté rapidement et permet de réduire l’épaisseur de la maçonnerie de pierre. Celle-ci ne devant être alignée que sur une face, est plus rapide à mettre en œuvre ; le mur intérieur en matériau “complémentaire” apporte l’étanchéité et la résistance thermique adaptées aux normes en vigueur ; l’inertie de la pierre joue et apporte une fraîcheur estivale : durabilité ; esthétique : l’aspect est identique à celui du mur massif.

 

Limites : exigence d’une main d’œuvre qualifiée.

 

2 • Cas d’un mur sandwich

 

Pour une apparence “ancienne” de part et d’autres, un parement, par exemple, de moellon de calcaire, peut également être monté sur la face interne. Dans ce cas, le mur extérieur en pierre est doublé d’un isolant rigide. Un placage de pierre épais de 10-12 cm est maçonné en face interne et fait office de contre cloison porteuse.

 

A RETENIR :

 

Intérêts : esthétique identique au massif ; isolé

 

Limites : le coût augmente et un compromis doit être trouvé pour qu’il reste raisonnable ; compétences difficiles à trouver pour la partie maçonnerie traditionnelle : intervenants plus nombreux.

 

3 • Cas d’un mur plaqué

 

structure4-406.jpgUn mur classique (béton, parpaing, brique, etc.) reçoit un placage de pierre mince, de 1 à 5 cm, en général, et jusqu’à 10 cm environ. Cette “peau” est collée ou agrafée selon les cas. L’agrafage de plaquettes est plutôt réservé aux grandes surfaces des immeubles isolés par l’extérieur. Le collage de pierre à même le support ou sur un enduit de dressage et d’étalochage, se pratique sur les petites façades, pour des maison individuelles. Il existe par exemple, un placage de granit épais de 1 cm, collé sur un enduit ou en béton banché, qui donne un rendu esthétique semblable au massif (pour 230 €/m²).

 

A RETENIR :

 

Intérêts : résout les problèmes de ponts thermiques et d’étanchéité ; coût (écart d’environ 50 à 80 € par m², entre un placage collé de 10 cm et un mur pierre de 25-30 cm) ; poids de pierre réduit et transport facilité ; mise en œuvre simple et rapide.

 

Limites : pas d’inertie

 




 

La construction en pierre est-elle couramment mise en œuvre ?


Vraiment à l’ancienne, pas énormément. La “limousinerie” exige un savoir-faire qui s’est fait rare ces dernières décennies et que nous cherchons à retrouver pour le diffuser plus largement aux jeunes générations de tailleurs de pierre, de maçons et d’architectes. Certaines régions sont beaucoup mieux organisées que d’autres dans ce domaine, notamment dans le Sud de la France.

 

La pierre est-elle intéressante en parement ?


L’inertie de la pierre, qui apporte un confort d’été, joue aussi lorsqu’en épaisseur de 25 à 30 cm, elle est associée à un autre matériau, comme la brique. En restauration comme en neuf, les caractéristiques d’un tel mur mixte sont intéressantes.

 

La construction de pierre a-t-elle de l’avenir ?


En tant que matériau de pays, exploitée localement, son coût peut être abaissé mais la main d’œuvre reste le poste important. Cependant, elle a toute sa place dans les constructions durables en cours et à venir. Elle apporte un confort de vie incomparable si elle est bien employée, et offre de multiples possibilités architecturales. La ressource est importante et la pierre peut être réemployée sans perdre ses qualités.

 





 

 

LECTURE

 

Revue spécialisée Pierre Actuel :www.pierreactual.com

"Construction et restauration des bâtiments en pierre" : www.proroc.fr

"La conception bioclimatique" de JP Oliva, éditions Terre Vivante (2006)

 

SITES UTILES

 

Centre technique des matériaux naturels de construction : www.ctmnc.fr

Syndicat national des industries de la roche ornementale et de construction : SNROC

UNICEM : 01 44 01 47 01 www.unicem.fr

Association pierres du Sud : www.pierres-du-sud.com

Maisons et paysages de bretagne : www.tiez-breizh.com

 

REFERENCES

 

♦ Pierre : DTU 20.1 – version 2008, « Ouvrages en maçonnerie de petits éléments – Parois et murs »

♦ Enduits, consolidation de maçonnerie, badigeons : DTU 26.1

 

Synonyme de durabilité

 

Granits, marbres… la pierre semble défier le temps. Même le plus tendre des calcaires se constitue une protection naturelle au cours des années d’exposition : le calcin. Les constructions en pierre reçoivent parfois des traitements de protection, de nettoyage, de consolidation, etc. Mais si certains produits donnent des résultats satisfaisants, leur mise en œuvre est souvent délicate, onéreuse, et nécessite des tests préalables, qui déterminent leur comportement, en fonction du type de pierre, du contexte d’utilisation, et dans le temps. Leur usage est en général cantonné à quelques monuments historiques.

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