Histoire du sapin (3) : Comment construire avec le roi des forêts ?

Histoire du sapin (3) : Comment construire avec le roi des forêts ?

Le bois d’œuvre est un débouché important du sapin en France. Mais à notre époque, les nouveaux ouvrages qui jouent délibérément la carte du sapin en structure sont encore rares.




Légende 1-Maison des paysans : La Maison des paysans, à Fribourg, pionnier de la construction administrative allemande multi-étage, recourt au sapin pour toutes les faces vues. © JT

 

En avril dernier, le séminaire dédié au sapin, qui s’est tenu dans le cadre du Forum International Construction Bois, a présenté plusieurs ouvrages français récents en sapin : l’extension du négoce Vray à St Chamont, une crèche et jardin d’enfants dans le parc national du Pilat, le groupe scolaire d’Amancey dans le Jura.

 

On s’aperçoit qu’à chaque fois, le sapin ne fournit qu’une partie des solutions bois. Chez Vray, le sapin est utilisé en charpente, en plafond traité autoclave M1, et comme poutres en lamellé-collé pour les parties couvertes.

 

Dans les monts du Pilat, le sapin séché est utilisé du côté de l’école en ossature en section courante 45x160 mm, séché à 12% ; en solivage 75x250 mm, et comme poutre massive pour l’abri extérieur, en alternative d’une poutre en lamellé-collé. Du côté du centre de ressources du parc national, le sapin sert pour les chevrons, les voliges et aussi pour un plancher en planches de sapin clouées verticalement (traitées autoclave M1).

 

 

  

   Planches de sapin en qualité menuiserie chez le négociant Hirsch&Sohn à Rheinstetten. © JT

 

De multiples usages

 

Dans le Jura, le sapin a trouvé près d’une dizaine d’applications : en montants, chevrons, bois de charpente, voliges, lambris, dalle de toiture, bardage. Il apparaît cependant que le sapin pectiné du Jura de moyenne altitude (670 m) est en majorité classé C18, alors qu’il faudrait du C24 pour les lamelles composant des poutres lamellées-collées.

 

Les quelque 750 m3 de sapin fournis par les forêts locales se répartissent en trois qualités : 77 m3 seulement de qualité B, 193 m3 de qualité C et 472 m3 de qualité D. A noter que ce classement visuel, établi notamment en fonction de la nodosité, ne préjuge aucunement d’un classement structurel.

 

Plus ou moins noueux, le sapin employé ne dépasse guère ici la classe de résistance C18, ce qui signifie que le choix du sapin implique un dimensionnement spécifique des poutres, fermes treillis et des dalles bois. L’épicéa est privilégié pour les pièces de charpente visibles.

 

  

     Table de montage « maison » et élément à ossature bois chez le charpentier artisanal Weingärtner à Baden-Baden. © JT

 

Le problème du bois collé

 

Les initiatives françaises sont d’autant plus intéressantes que chez nous, le recours aux bois collés n’est pas systématique comme en Allemagne.

 

Les participants français au récent voyage d’études en Forêt Noire ont eu la surprise de constater que le charpentier Weingärtner, à Baden-Baden, utilise couramment pour ses ossatures des montants contrecollés de 60, voire 80 mm de large.

 

Pratiques pour agrafer les panneaux de contreventement, ces montants sont aussi devenus outre-Rhin plus économiques que le massif en 45x145 mm. La construction bois, en Allemagne, se fait surtout avec des bois collés. Et c’est précisément sur ce segment que le sapin accuse un net retard sur l’épicéa.

 

 

     Essai de collage de panneaux CLT en sapin chez le grand scieur alsacien Schilliger à Volgelsheim. © JT

 

Une qualité visible onéreuse

 

Même le scieur Echtle de Nordrach, en pointe sur l’aboutage et la troisième transformation du sapin, ne dispose pas à ce jour d’une certification de lamelliste. Ses plateaux sont collés à la colle blanche non résistante à l’extérieur.

 

Pour autant, Echtle déclare maîtriser le process de collage de poutres contrecollées Duo ou Trio en sapin, à l’aide de colle PU. Comme les lamelles de sapin n’affichent pas toujours un degré de siccité homogène au départ du processus de séchage, il arrive que des lamelles en ressortent trop sèches, ce qui complique la prise de la colle à cet endroit.

 

De sorte qu’en complément d’un séchage deux fois plus long, le collage des lamelles de sapin se fait lui aussi avec une durée dédoublée, par sécurité.

 

Tout cela se répercute sur le prix de revient de poutres déjà d’autant plus chères que l’on choisit une qualité visible. Et contribue au fait qu’à l’heure actuelle, sur le marché, le sapin collé est rarement demandé.

 

 

    L’espace commercial Geroldsauer Mühle à Baden-Baden est présenté comme le plus grand ouvrage actuel en sapin de structure.© JT

 

Références allemandes

 

Le site allemand du Forum Weisstanne affiche un certain nombre de références en sapin, mais pour l’essentiel, il s’agit de projets architecturaux où le sapin en qualité menuiserie est employé en revêtement ou en bardage.

 

C’est le cas pour la Maison des paysans à Fribourg, un bâtiment R+3 tout en bois (noyau en béton) qui affiche le sapin local en façade et en revêtement intérieur. Les bois collés structuraux, masqués, et notamment les panneaux CLT, sont en épicéa de pays.

 

Une nouvelle étape a été franchie avec le bâtiment de la Geroldsauer Mühle, à la sortie de Baden-Baden. Conçu comme un chalet surdimensionné, ce dernier, inauguré en 2015, fait cette fois appel au sapin en structure apparente.

 

Sapin en structure apparente

 

Les poteaux de l’espace commercial ont une section massive avec des fentes assumées. La toiture proéminente protège bien la charpente extérieure et le revêtement de façade. Une fois encore, le sapin est associé à des bois collés en épicéa pour les parties non visibles.

 

Fort opportunément, le voyage d’étude français s’est achevé chez le lamelliste Wiedmann près de Bâle, qui a évoqué quelques difficultés rencontrées au moment du collage de lamelles de sapin à destination de ce chantier.

 

Difficile de savoir si cela serait à mettre au crédit d’un charpentier habitué à l’épicéa, ou à des aspects techniques qui restent encore à clarifier. (A suivre)

 

 

    Détail de la charpente extérieure apparente. © JT

 

 

 

    Structure intérieure avec poteau massif fendu. © JT

 




Source : batirama.com / Jonas Tophoven

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